Pierre Elliot Trudeau a canoté sur les eaux de la rivière Nahanni en 1970, ce fut pour l’ancien premier ministre canadien un coup de cœur total et sauvage. Son périple, il l’a raconté à maintes reprises à ses enfants et cette rivière est devenue une légende chez les Trudeau. « C’était sa rivière préférée. Il nous en parlait toujours. » se rappelle Justin. Suite à sa descente, Trudeau avait fait créer par Jean Chrétien, alors ministre des Affaires du Nord, le parc national Nahanni. Il y a trente ans, il était très important de protéger la rivière. Plusieurs études avaient été menées et le potentiel hydroélectrique de la rivière en intéressait plusieurs. « Ils ont même passé pas mal proche de faire un barrage, mais mon père a dit non, absolument pas. Nous devons protéger cette rivière. » explique avec fierté le jeune homme.
Depuis trente ans, les réalités ont bien changées dans cette région. Justin explique qu’aujourd’hui ce n’est pas seulement la rivière qui doit être protégée. « C’était une région très peu connue, du moins par les Blancs. Et depuis trente ans, plusieurs études ont démontré que toute la région devrait être protégée, les animaux, tout comme le réseau hydraulique. »
L’ancien professeur de 31 ans a donc accepté avec ravissement l’invitation de la Société pour la nature et les parcs du Canada, à prendre la parole pour faire connaître les richesses de la forêt boréale. Bien qu’il ne soit pas un expert en la matière. « Quand on parle de forêt au Canada, on imagine soit les érables du Sud du Québec et de l’Est de l’Ontario ou ces arbres immenses de la côte ouest. » Il a réalisé que la forêt boréale, « c’est tout le reste, de Terre-Neuve jusqu’au Yukon. » Il compare la forêt boréale à l’Amazonie, en expliquant qu’en plus, la forêt boréale joue un rôle important dans le filtrage des réserves d’eaux potables que nous buvons. « C’est le cœur de la vie sauvage canadienne. »
Il a dit comprendre tout à fait que les sols regorgeant de ressources se doivent d’être exploités. Mais il a expliqué qu’il faudrait s’assurer lors de l’élaboration des coûts de production d’une usine, que les coûts de nettoyage soient calculés. « Faut cesser les petites manigances bureaucratiques, où un propriétaire déclare banqueroute et laisse alors ces substances polluantes en place. » Celui qui s’est retrouvé à l’avant d’une classe dit réaliser que les jeunes sont de plus en plus conscients de cette réalité. Il affirme que les jeunes d’aujourd’hui n’ont pas envie de laisser derrière eux ce genre de trace.
Les jeunes et l’environnement, ce sont les deux sujets qui passionnent Justin Trudeau. Il est souvent sollicité pour prendre position sur différentes questions, mais pour l’instant celui qui est président du conseil d’administration de Katimavik et Directeur de l’Association canadienne contre les avalanches s’en tient à ses deux passions. Il fronce les sourcils quand on lui dit qu’il a de l’influence, mais avec le nom et le charisme qui le suivent partout, faudrait être idiot pour ne pas réaliser le pouvoir dont il dispose. « Je sais que pour une raison, ou une autre, les gens m’écoutent quand je prends la parole et je m’efforce donc de transmettre ce que je considère être de bonnes valeurs. »
Il n’en était pas à sa première visite dans le Nord, mais le dernier voyage se faisait loin. Il espère que les Canadiens se tourneront davantage vers le Nord, plutôt que de choisir ces destinations vacances qui jouissent de beaucoup de publicité. « Plutôt que d’aller aux États-Unis, voir le Grand Canyon, ils devraient venir ici, c’est encore plus impressionnant que le Grand Canyon. » assure-t-il.
Lors de la descente, qui a durée huit jours, Justin s’est imaginé son père découvrant comme lui ces endroits majestueux pour la première fois. « Je sais qu’on a du être émerveillés par les mêmes paysages. » L’aventure fut un bon exercice pour le jeune homme qui se dit assez en forme, mais qu’on devine plutôt en excellente forme. « J’ai passé ma vie en canot. Mon père m’a enseigné le canot ; de la rivière, je sais en faire.»
Des canots chavirés aux loups qui passent en meute, alors que lui dort sous la tente, il en aura des histoires à raconter à son tour. Perpétuant ainsi l’image mythique de la Nahanni; la grande légende familiale des Trudeau.