La soirée a été longue, le 1er août dernier, alors que les audiences de l’Office national de l’énergie se sont terminées vers 23 h. Au total, 14 personnes se sont adressées au comité d’audience au cours de cette soirée, alors que cinq autres l’ont fait en d’autres occasions durant la semaine et demie pendant laquelle les audiences ont eu lieu.
Alors que la majeure partie des audiences de l’Office national de l’énergie constituent des échanges très complexes touchant l’ingénierie et la faisabilité économique du projet, la partie concernant les présentations orales des citoyens se voulait beaucoup plus terre-à-terre. En fait, les 19 personnes qui se sont présentées devant le comité ont fait part de leurs préoccupations face au projet actuel.
Plusieurs des intervenants ont exprimé leur crainte de voir l’environnement du Nord se détériorer au cours de la construction du gazoduc et alors que celui-ci sera en opération. « Notre planète brûle et il n’y a pas de raison de l’ignorer », a éloquemment fait savoir Lami Cook, qui avait aussi fait connaître ses préoccupations à la Commission Berger à la fin des années 1970. Cette dernière, comme plusieurs autres, a appelé Imperial Oil à rechercher des ressources d’énergie alternative pour combler les besoins du marché.
Plusieurs intervenants ont aussi exprimé leurs craintes de voir le gaz naturel du Nord aller directement vers les sables bitumineux de Fort McMurray. Rappelant la culture altruiste des Ténois, Lois Little a mentionné que d’aider le développement des sables bitumineux de l’Alberta « était inconsistant avec les valeurs du Nord ». De son côté, Jim Paulson a grandi à Fort McMurrray. Il a longuement parlé de son expérience personnelle avec les sables bitumineux et les dommages causés à l’environnement. « Je suis venu dans le Nord pour m’enfuir de la pollution. Je ne veux pas que les TNO deviennent comme l’Alberta », a-t-il dit. Ce dernier a aussi parlé des impacts sociaux du développement des sables bitumineux sur la communauté de Fort McMurray.
Au cours des audiences de l’Office, l’avocat du Sierra Club, Paul Falvo, a bien tenté d’établir un lien entre le gaz du Nord et les besoins énergétiques pour l’extraction du sable bitumineux de l’Alberta. Jusqu’à présent, Imperial Oil a refusé de confirmer que le gaz était destiné aux sables bitumineux, prétextant qu’une fois dans le réseau, il était impossible de déterminer où le gaz irait.
« Comment peut-on savoir si c’est dans l’intérêt du pays si on ne sait pas si le gaz servira à chauffer les hôpitaux ou bien à extraire le pétrole des sables de l’Alberta? », se demande l’avocat.
Plusieurs intervenants ont aussi parlé du manque d’information donné à la population par la compagnie pétrolière et du petit nombre d’emplois disponibles lorsque la construction du gazoduc sera complétée.
D’autres ont dénoncé la rapidité avec laquelle on prévoit extraire le gaz des réserves de la mer de Beaufort. « Pendant combien de temps pourrait-on chauffer les maisons d’Inuvik avec ce gaz? Le futur serait beaucoup mieux avec des petits projets à caractère durable », a mentionné Ben Nind.
« Que quelqu’un vienne ici pour nous dire que nous avons absolument besoin du gazoduc, je trouve ça très présomptueux », a-t-il ajouté.
« Quelle est la stratégie à long terme? Qu’est-ce qu’on va faire quand il n’y aura plus de gaz? » s’est demandé Alexandre Beaudin, candidat du Parti vert au cours des dernières élections.
Ce dernier s’est aussi inquiété ouvertement des cultures autochtones des TNO et des impacts cumulatifs d’un tel projet. « Est-ce qu’on veut créer les problèmes et passer notre temps à les régler ou simplement les éviter à la source? », s’est-il demandé, invitant les membres du comité d’audience à y réfléchir.