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le Vendredi 22 septembre 2006 0:00 Économie

Projet gazier du Mackenzie 630 kilomètres à vélo

Projet gazier du Mackenzie 630 kilomètres à vélo
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C’est sur un coup de tête que Martin Dubeau a choisi de prendre une semaine de congé pour faire le trajet Yellowknife-Fort Providence à vélo en traînant derrière lui un tuyau vert orné de l’inscription « Make the pipeline green ».

« Mon vélo n’est pas prêt pantoute. J’ai plein de trucs à préparer », confie-t-il tout en posant de nouvelles chambres à air sur ses roues, moins de 24 heures avant son départ pour ce périple qui devrait durer cinq jours.

Une semaine plus tôt, Martin Dubeau dînait avec une poignée d’amis défavorables comme lui au mégaprojet promu par les pétrolières Exxon Mobil, Shell et Connoco Phillips. « Comme 14 autres personnes de Yellowknife j’avais participé aux audiences de l’Office national de l’énergie [au début août], raconte-t-il. Tout le monde qui a parlé cette journée-là était contre le pipeline – ou alors pas d’accord avec le projet tel que présenté. Mais quelques jours plus tard un journal de l’Alberta a écrit que presque personne ne prenait part aux audiences, ça m’a vraiment fait suer. Alors on s’est rencontré pour trouver une façon originale d’attirer l’attention sur les audiences publiques. »

C’est Doug Ritchie d’Ecology North qui a proposé l’idée du voyage en vélo et Martin, qui avait déjà fait le voyage jusqu’à Hay River, s’est porté volontaire. « C’est un coup médiatique. On ne s’en cache pas. »

Même si Martin admet volontiers son opposition au gazoduc tel que proposé, il affirme d’abord vouloir inciter les citoyens à prendre la parole. « Le message que j’envoie c’est d’utiliser votre droit démocratique : participez aux audiences que vous soyez pour ou contre ou ambigu, dites ce que vous pensez. On n’a pas besoin d’être un expert pour se présenter devant la Commission. Tout le monde a le droit d’être entendu. »

Il estime en outre que les appuis politiques au projet, comme celui exprimé par le premier ministre Harper lors de son récent passage aux TNO, minent la crédibilité du processus d’audiences en envoyant le message que la décision est déjà prise et que l’avis des gens du Nord ne comptera pas. « Je suis tanné de voir les processus démocratiques écorchés. Parfois j’ai l’impression que nos leaders ne nous représentent pas nous, les citoyens ; mais plutôt les intérêts des grosses compagnies […] Je pense qu’il y a beaucoup de gens qui ne sont pas en faveur du projet, mais qui n’osent pas le dire parce qu’ils pensent que ça va se faire de toute façon. »

Si tout se déroule comme prévu, Dubeau arrivera à Fort Providence juste à temps pour les audiences publiques de l’Office national de l’énergie, qui seront de passage à l’embouchure du fleuve Mackenzie le 25 septembre. Il y prendra part comme porte-parole de l’organisme Ecology North, dont il est un membre.

Puisque Ecology North a le statut d’intervenant, l’organisme a le droit de poser directement des questions aux promoteurs. Dubeau devrait les questionner sur l’impact environnemental du transport ainsi que sur la création d’un « dépôt de sécurité » qui obligerait les promoteurs à mettre de côté un fonds d’urgence que le gouvernement pourrait saisir en cas de catastrophe écologique.

Sans voiture

Martin Dubeau est fier de dire qu’il fera tout le trajet sans jamais s’arrêter à une station-service.

« Il y a moyen de vivre sans essence. Je vais me rendre à Fort Providence sans gazer une seule fois », dit-il.

C’est dans cet esprit qu’il effectue chaque été depuis cinq ans un long voyage dans le Nord en vélo ou en canot. En été 2002, suivant la piste de l’explorateur Samuel Hearne, il a rejoint l’océan Arctique en canot en partant de la baie de Yellowknife. C’était sa première longue expédition de canot.

Coïncidence, son périple tombe pile pour la journée internationale sans voiture, célébrée depuis six ans chaque 22 septembre. « Je ne le savais pas, mais on peut dire que je fais ça pour la journée sans voiture, si tu veux. Ça a l’air d’une bonne idée. »