Six jours avant que la saison de pêche 2007 ne débute, Stephen Kendall, le vice-président de la FFMC (l’Office de commercialisation du poisson d’eau douce) est venu rencontrer les pêcheurs commerciaux de Hay River. Une rencontre d’information sur la saison estivale, traduisant le futur instable de l’usine qui possède le monopole de l’exportation des poissons pêchés aux Territoires.
Des rumeurs en ville laissaient croire que l’usine ne rouvrirait pas ses portes après sa fermeture durant l’hiver dernier. C’est seulement au mois de mars que les pêcheurs ont reçu les premiers signes que leurs poissons allaient trouver acheteur à Hay River cet été. La semaine dernière pourtant, Calvin Peddle, l’opérateur de terrain des installations de Hay River était transféré au Manitoba pour assurer un autre poste au sein des bureaux principaux de l’office.
M. Kendall explique la situation : « Nous avons un énorme bâtiment ici avec des frais fixes faramineux. Construit en 1971, il ne répond plus du tout à nos besoins. Il faut dire que depuis 8 à 7 ans le Grand lac des Esclaves est sous pêché. L’effort de pêche n’est plus le même à Hay River et aux alentours. Nous avons ainsi décidé de retirer tous les services que nous fournissions sur place aux pêcheurs. Il n’y aura plus d’essence ou de diesel disponible sur notre site, le matériel pour la pêche ou les pièces de bateaux ne seront plus accessibles à notre comptoir. À partir du 11 juin, la seule chose que nous assurons c’est la présence de quatre employés, pour le secrétariat ainsi que la réception et la préparation au transport des stocks. L’accès à de la glace pour conserver le poisson au frais sera toujours disponible. Le reste peut se faire par nos bureaux au Manitoba, moyennant un délai de livraison. Cette année, nous avons jugé que nous serions capable de récolter 350 tonnes et que vous seriez toujours admissibles à des crédits basés sur 15 % de vos revenus. Ces prêts sont dépourvus d’intérêts si vous les remboursez sans délai ».
Durant la rencontre, les pêcheurs n’avaient pas grand-chose à répondre à ces nouvelles modalités. Certains ont néanmoins questionné la direction de l’office sur les dates de clôture de la saison et les heures d’ouverture pour la réception du poisson. « Vous nous imposez la fin des opérations pour le 15 septembre, mais normalement nous pêchons pendant encore un mois après cette date. Vous n’acceptez nos poissons que pendant les jours de bureaux, vous comprenez bien que si nous revenons de la pêche juste avant une longue fin de semaine, on ne peut pas attendre le mardi suivant pour vous vendre notre livraison ! »
À Stephen Kendall de répondre : « montrez-nous que nous avons tort de croire que vous ne pêcherez pas plus que notre objectif. L’an passé, nous recevions du poisson seulement deux jours par semaines. Si vous pêchez, la date de clôture de la saison peut être changée. Tout dépend de ce que vous nous ramenez ».
D’après la FFMC, c’est bien la faute aux pêcheurs si la situation en est rendue là. L’an passé, le quota de pêche s’élevait à 1700 tonnes de poisson, et d’après le vice-président, seulement 430 000 kilos ont été récoltés pour l’exportation.
Pour les pêcheurs c’est la balance entre les coûts d’entretien de l’équipement, le prix de l’essence et la valeur au kilo que l’office leur propose qui ne fonctionne pas. Douglas Buckley président de la fédération des pécheurs des TNO explique que c’est les nouvelles régulations et toutes les différentes charges qu’ils doivent maintenant assumer, qui rend le travail de pêcheur pas très rentable. « Dans les années 70 la livre de corégone se vendait 1 dollar et quelque chose, la liste qu’ils nous ont donnée aujourd’hui affiche 57 sous la livre. Et le prix de l’essence à la pompe est à 1,28 $ du litre ! Au moins, ils restent ouverts pour prendre nos poissons. S’ils fermaient définitivement, les 15 pêcheurs commerciaux qui restent dans la région n’iraient plus sur le lac. »
Le futur ne dépend que du bon vouloir des deux partis? Stephen Kendall sous-entend qu’une initiative de détruire le bâtiment et de gérer une plus petite industrie est sur la table en ce moment. Seulement cinq ou six pêcheurs contribueraient à l’approvisionnement, mais ils seraient efficaces. Les pêcheurs comprennent que les coûts fixes seraient moins élevés, le prix au kilo pourrait alors s’élever…
Mais une question reste encore dans l’eau chaude. N’y a-t-il pas de marché disponible, permettant de vendre du poisson venant du Grand lac des Esclaves comme du poisson venant du Grand lac? Et non pas vendre ces espèces nordiques comme un poisson canadien, mélangé aux stocks pris dans les Prairies et au Nord de l’Ontario. Le prix du kilo ne serait-il pas bonifié? Le monopole assure la vente c’est certain, mais à quel prix?
La FFMC est une société d’État basée à Winnipeg, financièrement indépendante qui a été créée en 1969. Elle achète, transforme et met en marché le poisson d’eau douce du Manitoba, de la Saskatchewan, de l’Alberta, des Territoires du Nord-Ouest et des parties du nord-ouest de l’Ontario. L’exportation de poissons aux États-Unis représente 70 % de son marché et 14 % est destiné à l’Europe. Le Canada représente 16 % de sa production.