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le Vendredi 17 juin 2005 0:00 Éditorial

Un dialogue de sourds?

Un dialogue de sourds?
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En voyant le tas de documents reliés au projet gazier du Mackenzie (voire photo en page 2), on croirait que la commission d’évaluation conjointe a décidé de participer au Défi d’une tonne : une tonne de papier qui, d’ici un an, se retrouvera au recyclage (enfin, on espère que ça ne se retrouvera pas à la poubelle). Plusieurs groupes communautaires ont exprimé le désir que les audiences prévues à la fin du mois soient reportées à plus tard. Quand on sait que ces groupes fonctionnent sans employé ou avec un petit nombre seulement, on peut comprendre leur demande de retarder ces audiences jusqu’à l’automne. Il ne faut pas croire cependant que cela sera reporté de trois mois.

En effet, il y a déjà beaucoup de pression fait par les grandes pétrolières afin que le projet avance plus rapidement. On se plaint de la bureaucratie entourant l’évaluation environnementale pour souligner l’impatience de ces multinationales. Est-ce vraiment la bureaucratie en question qui est le problème ou est-ce plutôt que leur projet soit assujetti à un examen environnemental? En cette ère de sensibilisation accrue aux questions environnementales, ça paraîtrait mal de dire : « On est tanné du processus d’évaluation. Laissez-nous simplement le construire ce foutu pipeline.» Non, ça paraît mieux de dire que la bureaucratie entrave le projet.

Ah, mais elles ne sont pas les seules, ces pétrolières, à ne pas exprimer franchement le fonds de leur pensée. À n’en pas douter, certains groupes qui s’opposent au projet, peu importe les garanties offertes en matière environnementale, vont utiliser tous les arguments pour justement retarder le projet. Ces groupes perdraient la face devant le public s’ils se contentaient simplement de dire : « Nous, on en veut pas du tout de ce projet! Le retarder de quelques mois est déjà bon en soi». C’est préférable de dire « Il y a beaucoup de documents, laissez nous le temps de les analyser ».

C’est à se demander quels types de discussions auront lieu lors de ces audiences. Sans parler d’un dialogue de sourds*, on assistera probablement à des discussions entre des groupes aux philosophies irréconciliables qui, en plus, n’oseront même pas exprimer franchement leur véritable point de vue.

* sourds : malentendants.