le Vendredi 23 mai 2025
le Vendredi 2 juin 2006 0:00 Éditorial

Feux de paille?

Feux de paille?
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Il y a quelque chose d’un peu ironique dans le comportement du gouvernement des Territoires au sujet du jugement de la juge Moreau. Le gouvernement se retrouve avec un document qui n’est pas dans sa langue de préférence. En tant que francophones, ça nous est arrivé souvent de se faire dire qu’un document n’était pas disponible dans notre langue, mais ça n’empêchait pas le gouvernement de fonctionner. Pourrait-on obtenir un délai supplémentaire si, par exemple, une limitation du nombre de prises quotidiennes n’était pas disponible en français pour les pêcheurs francophones? Si une date limite pour participer à un concours, non publié en français, était passée et qu’on prenait connaissance de ce concours par hasard? Je ne crois pas!

Pourtant, c’est la position actuelle du gouvernement territorial : tant que c’est pas traduit, ça ne nous lie pas. Hum… Je sens que je vais faire de bonnes pêches cet été si, après vérification, je ne parviens pas à obtenir les documents pertinents en français d’ici ma prochaine sortie de pêche.

La déclaration suivante du député Jackson Lafferty est réjouissante :« La préservation de notre mode de vie traditionnel dépend fortement de notre langue » . Il s’agit d’un concept central qui soutient tous les efforts des groupes francophones dans leur lutte pour préserver la langue : langue et culture sont indissociables. Sans la langue, la culture se perd. Cela vaut pour les francophones et cela vaut aussi pour les autochtones.

Pendant des années, le gouvernement territorial a refusé de répondre à ses obligations linguistiques en utilisant de nombreux prétextes. Un des plus insidieux, qui répond davantage au principe de «diviser pour régner », était de justifier l’absence de services en langues autochtones pour refuser les services aux francophones. Résultat : personne n’a obtenu le respect intégral de ses droits linguistiques. En 20 ans d’application de la Loi sur les langues officielles des TNO, le gouvernement a lamentablement échoué tant pour les francophones que pour les autochtones, groupes qui sont également aux prises avec de dangereux problèmes d’assimilation. Pour les communautés autochtones, le gouvernement territorial est le descendant direct des écoles résidentielles et son inertie est tout aussi coupable.

Plusieurs députés s’expriment dans leur langue à l’Assemblée législative. En tant que modèles de citoyens, ce geste est important. J’espère simplement que cela ne finira pas comme les autres soubresauts de fierté des années passées alors que les députés revenaient rapidement à utiliser copieusement la langue anglaise durant les travaux de l’Assemblée ; « business as usual ».