Le Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC) tient ces jours-ci une série d’audiences en vue du renouvèlement des licences du diffuseur public Radio-Canada. Sans surprise, les communautés francophones d’un bout à l’autre du pays ont profité de cette occasion pour faire connaitre leur mécontentement quant à leur piètre représentation dans les médias de la société d’État (voir texte en p.11).
Ce sont des griefs légitimes. Bien que l’enjeu soit soulevé à chaque occasion depuis des décennies, le diffuseur public de langue française s’entête dans son montréalisme exigüe et donne trop souvent l’impression que notre grand pays d’un océan à l’autre et à l’autre commence à Montréal-Est et se termine à Verdun. En écoutant les rendez-vous phares de Radio-Canada, tels que «Tout le monde en parle» ou «La soirée est encore jeune», on croirait se faire servir le carnet mondain d’une poignée de quartiers de la métropole plutôt que le menu de grandes émissions nationales. Certains acteurs importants de l’actualité canadienne n’ont pratiquement aucune visibilité dans ces émissions dont le mandat est pourtant pancanadien, alors que des sensations hyperlocales y sont routinièrement magnifiées. Le maire de Rosemont est plus vite invité sur ces plateaux que le premier ministre du Nouveau-Brunswick.
Dans le Nord canadien, cette invisibilité est encore plus flagrante. Hormis pour le facteur d’exotisme, ce qui se passe au nord du soixantième n’atteint pas la tour de Radio-Canada. Malgré tout, si nous avions pris part à ces audiences, nous aurions sans doute plutôt présenté les fleurs que le pot. S’il est vrai qu’il y a encore bien à faire pour offrir aux francophones du Nord une tribune équitable sur les ondes des Radio-Canada — à commencer par la production de bulletins d’information régionaux —, on reconnait qu’énormément de progrès a été accompli au cours des dernières années.
La création de postes de journalistes multiplateformes aux Territoires du Nord-Ouest et, plus récemment, au Nunavut fait une énorme différence pour les francophones d’ici. Cet ajout nécessaire au paysage médiatique permet non seulement une participation accrue des citoyens à la vie civile, il raffermit la vitalité de nos communautés et confère de la légitimité à notre existence.
La présence de Radio-Canada dans le Nord canadien demeure très modeste et reste, pour l’essentiel, confinée à des plateformes en ligne inadéquates dans un environnement mal branché comme le nôtre. Or, en comparaison de rien du tout, la différence est remarquable et ne pas le souligner serait faire preuve de mauvaise foi. Nous souhaitons tous que la qualité et l’ampleur du service soient étendues, mais nous nous réjouissons qu’il y en ait un.