L’Arctique canadien occidental a subi un réchauffement de près de 2°C pendant le siècle dernier. « Demandez à un résident du Nord de vous livrer ses observations sur les changements de température survenus ces dernières années et vous aurez droit à plusieurs histoires. J’ai discuté avec un homme d’Holman (Île Victoria) qui faisait de la motoneige sur les lacs fin mai, début juin, mais qui sillonne maintenant les terres en véhicule tous terrains à pareille date », a raconté le chef de la section du Nord à Environnement Canada, Jesse N. Jasper. Rien de scientifique dans cette histoire qui n’est pas unique, ni inhabituelle.
Les causes du réchauffement climatique ne sont pas clairement définies, bien que certains suggèrent que la hausse de température observée dans plusieurs endroits est due à l’augmentation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Quelle que soit votre position à ce sujet, les statistiques d’Environnement Canada en témoignent : l’année 1998 a été la plus chaude jamais enregistrée.
Aux T.N.-O., la vallée et le delta du fleuve Mackenzie est la région la plus touchée par les changements climatiques. Elle a connu des élévations de température de l’air qui figurent parmi les plus importantes au Canada durant le siècle dernier. Quelques degrés de plus ont des effets sur la faune. Une des conséquences possibles du réchauffement est la fréquentation assidue de nos dépotoirs par des ours.
Ces derniers se nourrissent de phoques et de bélugas lors de leurs ballades sur les glaces. En fait, ils raffolent de graisse de phoque. Une nourriture riche en graisse et en poisson leur permet de survivre aux longs mois d’hibernation. Or, si les glaces se dissipent plus rapidement à cause d’un réchauffement climatique, cela signifie moins de temps sur les lacs pour s’alimenter. Les mammifères se tournent donc vers les restes humains : les déchets dont les dépotoirs sont remplis. Le réchauffement dans les hautes latitudes favorise donc de plus longues saisons d’eau libre. Cette situation crée de graves problèmes, non seulement aux ours, mais également aux canards de mer. Ces oiseaux vivent sur les falaises et plongent pour aller chercher du poisson. Ces volatiles profitent des ouvertures dans les glaces pour aller facilement chercher le poisson qui se tient en bande compacte à la surface de l’eau pendant l’hiver. Par contre, lorsque les glaces disparaissent, les poissons réintègrent les profondeurs du lac, ce qui rend leur capture laborieuse pour les volatiles, a expliqué le Dr Kevin McCormick.
Les changements climatiques ont une incidence sur la stabilité du pergélisol qui se définit comme un sol gelé en permanence et imperméable. Ce dernier recouvre plus de 50 % de la masse continentale canadienne. Sa température n’atteint jamais plus de 0°C, même durant l’été. La couche sur laquelle on marche se nomme la couche active, elle gèle durant la période hivernale et dégèle pendant l’été. Sous cette couche se trouve le pergélisol composé en partie de glace, ce qui le rend sensible aux changements climatiques. De plus, lorsque l’eau gèle, son volume augmente de 9 %. En conséquence, si le pergélisol dégèle, les fondations des édifices et immeubles risquent de s’affaisser. La stabilité des infrastructures dépend directement des matériaux congelés. Par ailleurs, un réchauffement du sol dégraderait plusieurs constructions comme les routes, les fondations, les services publics. « Combien d’argent supplémentaire sommes-nous prêts à investir dans la réparation des routes ? », demande le chercheur Stephen Wolfe de Ressources naturelles Canada. « Cela représente beaucoup d’argent pour les contribuables ainsi que pour les compagnies minières », ajoute ce dernier.
Certaines entreprises doivent investir des sommes considérables car elles utilisent les propriétés du pergélisol. Dans certaines parties de la mine, un sol gelé en permanence assure que les digues demeurent bien en place comme c’est le cas pour la mine Ekati BHP au Lac de Gras. D’ailleurs, lors de la construction des infrastructures du site du projet minier de BHP, les ingénieurs ont inclus un réchauffement climatique d’environ un degré dans leurs plans. Selon un représentant du ministère des Affaires Indiennes et du Nord canadien, Dave Nutter, près de 30 % de l’audience venue assister au colloque environnemental provenait du milieu des affaires et du gouvernement territorial.
Lors de la conclusion de ces rencontres, les représentants d’Environnement Canada ont insisté sur plusieurs facteurs déterminants pour s’adapter aux changements. Parmi ces derniers, voici les plus importants : l’urgence d’agir pour pallier aux effets négatifs du réchauffement, l’importance d’informer les gens et de faire passer le message. Toutefois, les scientifiques s’entendent pour dire que les impacts environnementaux du réchauffement global sont encore méconnus et qu’il existe des lacunes en ce qui concerne les changements climatiques.
Pour faire à ce phénomène, un comité organisationnel a vu le jour au colloque. « Réunissant sept membres triés sur le volet, ce comité va se rencontrer mensuellement afin de discuter des impacts et de coordonner l’adaptation aux changements climatiques », a affirmé l’ingénieur géologue Larry Dyke de Ressources Naturelles Canada. « Le comité doit compter un nombre restreint de membres afin de demeurer productif, a ajouté M. Dyke. Toutefois un effort sera fait pour accueillir d’autres personnes intéressées, y compris des membres de nations autochtones. Ces derniers, non représentés dans le comité, ont demandé à en faire partie. En coulisse, certaines personnes ont exprimé la crainte que la présence autochtone complique le processus de discussion. Pourtant, les changements climatiques les concernent essentiellement.