Si certains étaient encore sceptiques sur les changements climatiques, l’année 2006 leur démontre que le climat se réchauffe vraiment.
Selon Environnement Canada, l’hiver 2006 a été le plus chaud de l’histoire des TNO, le printemps aussi a été le plus chaud de l’histoire, l’été a été le quatrième plus chaud et l’automne est demeuré dans les normales climatiques – sauf pour la région du delta du Mackenzie et pour les îles arctiques qui ont reçu des températures jusqu’à six degrés au-dessus de la normale saisonnière, comme au Nunavut d’ailleurs.
Ces anomalies climatiques ont causé des torts importants à l’industrie minière qui a dû s’accommoder d’une saison de routes de glace écourtée de plusieurs semaines. Ce sont des dizaines de chargements d’équipements et de carburant qui n’ont pas pu être acheminés aux mines de diamants. Les cargaisons les plus indispensables ont été envoyées par hélicoptère ce qui a fait exploser les coûts de production et retardé certains travaux, dont l’ouverture de la mine Snap Lake qui a été reportée à l’été 2007.
Devant ce fiasco, le premier ministre Handley en est venu à proposer la construction d’une route quatre saisons jusqu’aux mines. Une idée qui a été décriée par l’opposition. Les scientifiques qui sondent les changements climatiques constatés dans le Nord nous ont servi, à tour de rôle, de bien pessimistes études. En janvier le National Center for Atmospheric Research publiait les résultats d’une étude sur le pergélisol. D’après le centre basé au Colorado, tout le pergélisol de la planète pourrait avoir fondu d’ici l’an 2100. Ces prévisions ne font pas consensus dans le monde scientifique.
Les conséquences d’une telle dégelée pourraient être inquiétantes pour les communautés perchées sur le pergélisol. Dans une entrevue accordée à L’Aquilon en mars dernier, l’ingénieur géologue Réjean Couture, co-auteur d’un rapport de Ressources naturelles Canada sur la fonte du pergélisol à Norman Wells et à Tuktoyaktuk, expliquait le genre de perturbations auxquelles ces communautés peuvent s’attendre dans les années à venir. Selon lui, les grosses constructions comme les aéroports et les hôpitaux, de même que les routes et les voies de transport sont les plus susceptibles d’être endommagés par la fonte du pergélisol. « Faites attention aux routes et aux pistes d’atterrissage. Il faut faire plus d’opération de maintenance », mettait-il en garde.
Un autre effet pervers de la fonte du pergélisol est que cela envoie du méthane dans l’atmosphère. Ce gaz, prisonnier du sol gelé, est considéré comme le plus actif des gaz à effet de serre. Donc plus le pergélisol fondera, plus le climat se réchauffera.
Autre préoccupation : la fonte des glaces polaires. Cette année encore le couvert glacé de l’océan Arctique a anormalement rétréci durant la saison estivale. À la fin août, le Passage du Nord-Ouest était pratiquement ouvert à la navigation. De quoi donner des munitions au ministre de la Défense, Gordon O’Connor, qui s’est mis en tête de « palper chaque lopin de terre et chaque plan d’eau que possède le Canada » et donc de militariser le Grand Nord.
Plus récemment, une étude de ce même Center for Atmospheric Research avançait de nouvelles prédictions inquiétantes quant aux glaces arctiques. Selon cette recherche l’océan pourrait être entièrement libre de glace d’ici l’été 2040. Dans 33 ans.
Si le retrait de la banquise risque de faire se multiplier le nombre de bateaux et de soldats dans l’Arctique, cela va probablement, à l’inverse, décimer la population d’ours polaires. C’est d’ailleurs pour cette raison que nanuq a, pour la première fois cette année, fait son apparition sur la Liste rouge des espèces menacées publiée par l’Union mondiale pour la nature. Un biologiste australien nommé Tim Flannery, auteur du controversé livre Les faiseurs de pluie, a pour sa part déclaré que les ours blancs du Canada seront tous disparus, d’ici quinze à vingt ans.
Pas de quoi rester froid.
