C’est du 20 au 24 août que s’est déroulée la conférence Tu beta Ts’ena « L’eau c’est la vie », à Fort Smith, où plus de 200 déléguées autochtones et allochtones se sont rencontrés pour échanger, apprendre et unir leurs voix sur les enjeux que soulèvent l’eau, son utilisation et sa protection.
Avec des chefs de bandes et des aînés du Nord de la Saskatchewan, de l’Alberta et de la Colombie-Britannique venus discuter avec leurs homologues ténois, c’est tout un territoire connecté de rivières et de lacs qui se concertait. Partageant les mêmes eaux, bénéficiant des mêmes ressources de Dame nature, ces hommes et femmes connaissent les mêmes inquiétudes face à l’avenir.
Comme l’explique le maître de cérémonie de la conférence, Joe Tambour, de la réserve K’atlodeeche, le partage est source de connaissances. « Nous nous réunissons pour bénéficier du savoir de tout le monde. L’information des conférenciers et les connaissances de l’audience sont bénéfiques à tous. C’est pour ça que les dirigeants de nos nations ont été invités à cette conférence, c’est pour qu’ils soient présents et suivent ce qui se passe de vive voix, C’est important qu’il n’y ait pas de perte d’information avec un message qui passe par plusieurs intermédiaires ».
Le conseil des aînés
Lors de la première journée, les aînés ont tenu l’avant scène à l’occasion de l’adoption de quatre résolutions qui seront transmises aux différents chefs pour qu’elles soient mises en oeuvre dans les communautés.
La première était toute désignée pour inaugurer la conférence : « L’eau est sacrée pour nous. C’est ce dont nous avons besoin pour survivre et ce dont Dame nature a besoin pour survivre. Nous devons nous éveiller et travailler ensemble comme un tout pour protéger notre eau pour nos enfants, petits-enfants et les générations futures ». La deuxième s’est dirigée vers les chefs de demain : « Les jeunes doivent participer aux conférences et autres activités reliées à l’environnement, les jeunes doivent apprendre les enseignements des aînés et ils doivent commencer à prendre le leadership dans tout effort pour protéger nos terres et nos eaux ». La troisième a annoncé la volonté de prendre position au niveau des futures décisions qui peuvent mettre en jeu la stabilité de l’environnement : « Avant que tout prochain développement ne naisse, nous requerrons une obligation de compte-rendu de la part du gouvernement ainsi que notre pouvoir prépondérant pour assurer que des négociations en règle aient lieu pour protéger l’environnement et qu’aucun de nos droits ne soit, de ce fait, destitué ». Finalement, la dernière proposition en appelle au respect des ententes signées entre la couronne d’Angleterre et les Premières nations. Ces traités ont été conclus en respect de l’un et de l’autre et les Premières nations clament qu’elles les ont signés pour partager les terres et non pour abandonner leurs terres, eaux et droits.
Tous contre les sables bitumineux
Si la conférence s’est voulue instructive sur la nécessité d’une eau de qualité dans son ensemble, la majorité des intervenants a ciblé le problème des sables bitumineux de la région Athabasca. Le député fédéral Dennis Bevington, le député territorial Michael Miltenberger et l’invité d’honneur Justin Trudeau ont décrié le projet de quintupler les installations de Fort MacMurray. Ce dernier a spécifié qu’il ne fallait plus s’intéresser uniquement au présent et que l’on devait changer notre vision à court terme. « Nous nous sommes étendus jusqu’aux limites de notre planète. Nous en avons cartographié chaque recoin. Maintenant nous nous battons pour savoir qui aura le plus d’argent en banque avant que la ressource ne disparaisse. Au Canada, nous sommes les plus gros consommateurs d’eau par jour par personne. En ce moment, l’industrie des sables bitumineux utilise une fois et demie la quantité d’eau dont la ville de Calgary a besoin. C’est déjà une pression massive sur les réserves. Nous devons repenser comment nous utilisons nos ressources et à quelles fins. » Cette conférence a démontré la détermination des Premières nations à vouloir mieux défendre leur environnement. Herb Norwegian, le Grand chef des Premières nations du Deh Cho, souligne qu’il est essentiel de rassembler les efforts pour permettre aux Autochtones de diffuser un fort message aux gouvernements. « C’est un enjeu de première importance pour nous. Ce colloque représente une seconde étape après la conférence de l’année dernière au Deh Cho. Nos idées progressent et forment une vague déferlante. »
«C’est seulement depuis la fin du mois d’avril que nous nous sommes attelés à l’organisation, indique Josie Weninger. Une vingtaine de bandes sont représentées en plus des intervenants extérieurs comme des organisations environnementales et des invités du secteur industriel comme ATCO, Shell Canada et la Société d’énergie des Territoires du Nord-Ouest». D’après elle, si ces compagnies prêtent attention aux discussions, la conférence remplira un de ses objectifs. Mme Weninger rappelle que cet événement a été organisé avec une saveur toute septentrionale, car en plus d’assister aux Jeux de mains et à la danse du tambour, les participants ont dégusté du poisson provenant du Grand lac des Esclaves et de la viande de bison.
