En 1966, on compte le nombre alarmant de 48 grues blanches dans le parc national Wood Buffalo. Pour empêcher la disparition de l’espèce, un programme de rétablissement est mis en place à cette époque. On célèbre le 50e anniversaire de ce partenariat canado-américain en 2016.
Un 50e anniversaire heureux, puisqu’environ 329 oiseaux parcourent 5 500 kilomètres pour se rendre au Refuge faunique national d’Aransas, au Texas, cette année.
« [Dans le parc national Wood Buffalo — situé à la frontière entre le Nord de l’Alberta et les Territoires du Nord-Ouest], le moyen principal pour repeupler le territoire est de protéger l’habitat et les grues. Une fois que nous avons compris qu’elles faisaient leurs nids là, on a désigné la région de zone protégée, en limitant l’accès au public. Il s’agit d’un territoire de 4 000 kilomètres carrés », expose Stuart MacMillan, responsable de la conservation des ressources de Parcs Canada.
Parmi les défis de conservation, mentionnons celui de veiller à ce que les grues blanches ne soient pas perturbées lors de la gestion des incendies de ce vaste territoire et à ce que le public soit sensibilisé à leur condition fragile.
« Sur la route de la migration, c’est là qu’il y a le moins de contrôle, puisqu’il arrive qu’elles soient chassées. Les gens croient que c’est une autre espèce ou ne savent pas qu’il s’agit d’une espèce menacée », ajoute M. MacMillan.
Entre les TNO et le Texas, la question d’habitat pèse lourd. Peu d’espaces non perturbés sont à la disposition des grues, en raison des routes et des industries sur leur chemin. Stuart MacMillan explique que des transmetteurs ont été placés sur certains des oiseaux afin d’observer par où ils passent lors de la migration et à quelles menaces ils sont confrontés. Il s’est avéré que les lignes électriques avaient un impact lors de leur descente pour aller se nourrir ou se reposer. Certains ne remarquent pas les lignes électriques, ce qui peut entrainer leur mort.
Reproduction des échassiers à bec pointu
Généralement, la grue blanche pond deux œufs chaque année, mais en n’élève normalement qu’un seul. Bien souvent, le deuxième œuf ne craquera pas ou le deuxième oisillon ne survivra pas, parce que le premier vient au monde un ou deux jours plus tôt et a un avantage à l’égard de la nourriture et de l’attention reçue.
Le deuxième représente ainsi une assurance pour le couple d’avoir au moins un oisillon. Rares sont les occasions où le couple élèvera les deux oisillons, ce qui cependant aide à la repopulation, selon le responsable de la conservation des ressources.
Jeunes grues rebelles
Pendant ce temps, les juvéniles passent leur temps à d’autres endroits dans le Nord du Canada. Comme ils ne cherchent pas encore à être en couple et à se reproduire, ils se nourrissent dans un endroit qui leur paraît attirant, seuls ou avec d’autres jeunes. Les petites grues blanches rejoignent le groupe dans la zone de nidification au moment de la migration vers le sud, en septembre.
Et comment est-ce qu’ils savent qu’il est temps d’aller rejoindre les autres pour la migration?
— Ils sont attentifs aux signaux de leur environnement. L’hiver arrive… il est temps de se diriger vers le sud, vers des endroits plus chauds. Maintenant, le processus de migration est en cours et ils devraient commencer à arriver au Texas, à la Gold Coast.
À l’arrivée des oiseaux au printemps, Parcs Canada, en partenariat avec le Service canadien de la faune, effectue le recensement de cette espèce rare par hélicoptère. « On compte le nombre de nids qu’il y a et où ils sont situés, en mai, pour voir combien de couples on a pour l’année et on retourne en août pour voir le nombre d’oisillons qu’on a », fait savoir le représentant de Parcs Canada.
Écosystème – importance de la biodiversité
« Je pense que ce qui est important c’est de conserver la biodiversité dans notre écosystème. Tous ont un rôle à jouer », déclare M. MacMillan, en donnant l’exemple qu’au Texas, les grues blanches se nourrissent de crabes bleus et qu’eux aussi doivent demeurer en santé. C’est ce sur quoi il se penche, entre autres, dans ses travaux en partenariat canado-américain.
Au chapitre de la conservation, Parcs Canada affirme collaborer avec des groupes de Premières Nations et de Métis des environs, fortement intéressés à préserver l’environnement du parc et des grues blanches. « En plus de la science occidentale, nous sommes toujours à la recherche des connaissances traditionnelles et leur accordons de l’importance. Les groupes de Premières Nations et de Métis sont enclins à préserver les grues blanches et ils étaient au courant que ces dernières étaient ici longtemps avant que les gouvernements le soient, au début des années 1950 », relate M. MacMillan.
Rappelons qu’en 2015, des tours organisés par Parcs Canada pour l’observation de grues blanches avaient été annulés suite à des plaintes de la part du Conseil Métis de Fort Smith et de la première nation de Salt River, qui sonnaient l’alarme concernant l’absence de consultation lors de l’organisation de ce projet.