Un rapport du gouvernement canadien, publié cet été, fait état d’une triste situation dans le parc national de Wood Buffalo.
Le parc chevauchant la frontière de l’Alberta et des TNO, site inscrit au patrimoine mondial de l’UNESCO pour ses paysages, sa biodiversité et ses habitats fauniques exceptionnels, pourrait être placé sur la liste des sites du patrimoine mondial en péril.
Le rapport fédéral, adressé à l’UNESCO, reconnaît que le parc Wood Buffalo est en déclin dans 15 de 17 indicateurs suggérés par l’agence onusienne.
C’est d’abord et avant tout le développement industriel que le gouvernement fédéral identifie comme menace au parc. L’exploitation des sables bitumineux, l’édification de barrages sur les affluents du basin de même que le changement climatique et les cycles naturels sont autant de facteurs qui expliquent la triste mine du joyau naturel.
La baisse du débit et l’assèchement des deltas des rivières la Paix (-9 % de débit) et Athabasca (-26 %) est au centre des malheurs de l’habitat.
Dans la mire des auteurs du rapport : la construction par la Colombie-Brittanique du barrage Bennett sur la rivière la Paix, la fonte de glaciers des Rocheuses et l’extraction des sables bitumineux de l’Athabasca qui nécessite le pompage de grandes masses d’eau à même la rivière.
Une cascade de conséquences
La baisse des débits d’eau a entraîné toute une cascade de conséquences : une réduction de l’habitat du bison, de plus en plus de plantes envahissantes remplacent la végétation indigène, la baisse du nombre d’oiseaux migrateurs, la raréfaction des rats musqués autrefois trappés par les Premières Nations, et la mortalité de poissons dans une eau stagnante faible en oxygène.
Les bas niveaux d’eau concentrent aussi des polluants chimiques : les œufs d’oiseaux contiennent des métaux lourds et des hydrocarbures, alors que la concentration de mercure dans les poissons augmente.
Les sables bitumineux sont mis en cause, mais on ne peut pas déterminer pour l’instant l’origine des contaminations. L’hypothèse des feux de forêt, de l’agriculture et des activités forestières en amont sont également émises.
UNESCO
Le document fédéral faisait suite à une requête de l’UNESCO qui avait déploré, en 2016, le déclin du parc Wood Buffalo.
L’investigation a été lancée à l’appel de la nation crie Mikisew qui a contacté l’UNESCO dès 2014 pour lui signaler ses craintes quant à l’état du Parc. Dans son rapport, l’agence onusienne évoque « des preuves de longue date, concevables et cohérentes de graves problèmes environnementaux et de santé humaine ».
Les membres de la communauté ne boivent plus l’eau des lacs et rivières du parc par crainte de contamination. Ils ne peuvent plus accéder à certaines régions du parc en raison de la baisse du niveau des rivières, et ont rapporté des goûts et des difformités anormales dans les poissons et le gibier sauvage prélevés.
L’UNESCO émettait 17 recommandations pour améliorer la situation du parc national et donnait au Canada jusqu’en décembre 2018 pour déterminer comment les efforts de conservation seraient ajustés.
L’UNESCO, demandait que le Canada et l’industrie trouvent des solutions de gestion et de conservation du parc qui incluent, de manière significative, les peuples autochtones et leur savoir traditionnel.
Le gouvernement fédéral a depuis engagé un budget de 27 millions de dollars pour le parc, mais le développement industriel, municipal et agricole en amont perdure. Des projets de barrage (site C sur la rivière la Paix) et de développement pétrolier (Teck Resources, 30 km au sud du parc) présentement à l’étude pourraient éprouver davantage les affluents du parc.
Établi en 1922, le plus grand parc au Canada a été désigné au patrimoine mondial de l’UNESCO en 1983. Il abrite une grande harde de bisons des bois, le plus grand barrage de castor au monde, le seul site de nidification des grues blanches et le plus grand delta intérieur de toute la forêt boréale.
La décision finale de l’UNESCO sur le statut du parc Wood Buffalo sera prise en 2019.