le Samedi 19 avril 2025
le Vendredi 12 mars 1999 0:00 | mis à jour le 20 mars 2025 10:34 Francophonie

Le fédéral s’en lave les mains Services en français aux Territoires du Nord-Ouest

Le fédéral s’en lave les mains Services en français aux Territoires du Nord-Ouest
00:00 00:00

Les représentants du gouvernement du Canada, participant au Forum sur les français aux T.N.-O., ont bien établi leur position quant à la Loi sur les langues officielles des T.N.-O. : le gouvernement fédéral n’a aucune responsabilité légale en la matière.

Me Michel Francoeur, directeur des services juridiques du ministère du Patrimoine canadien, a laissé un message très clair aux participants du Forum sur le français aux T.N.-O. : bien que le gouvernement fédéral se sente une responsabilité morale de supporter et de promouvoir le français aux T.N.-O., il n’a aucune responsabilité légale quant au respect de la loi territoriale en matière de langues officielles.

Lors de ce forum sur le français, qui a eu lieu les 4 et 5 mars derniers à Yellowknife, un panel de juristes et de représentants gouvernementaux a tenté de cerner la situation du français tant du point de vue de l’évolution historique du fait français dans le Nord que par rapport à l’état des services en français offerts par le gouvernement territorial.

Outre ces experts, quelques représentants des communautés francophones des T.N.-O. participaient aux débats.

Les participants au Forum ont pu constater que la prestation de services en français par le gouvernement territorial est loin d’être satisfaisante. En effet, lors d’une vérification externe de la disponibilité des services en français au sein du gouvernement territorial, 98% des bureaux contactés ne faisaient aucune offre active de leur services en français bien que 14% des préposés étaient en mesure d’offrir ces services. De plus, le service a pu finalement être obtenu en français dans seulement 40% des cas.

Cette situation n’a rien d’étonnant si l’on se fie à une analyse de la Politique gouvernementale effectuée par Me Michel Doucet, doyen de l’École de droit de l’Université de Moncton. La politique du gouvernement territorial en matière de services en français et les lignes directrices adoptées en 1997 «ne sont pas, sous plusieurs aspects, conformes à la Loi sur les langues officielles des Territoires du Nord-Ouest.»

Selon Me Doucet, le principal défaut de la Politique et des lignes directrices est d’être réducteur par rapport aux droits accordés par la Loi. L’introduction de la notion «d’accès raisonnable» semble au coeur de cette limitation des droits.

D’après l’Entente de coopération Canada-T.N.-O. sur le français et les langues autochtones, le gouvernement fédéral s’engage à assumer, en permanence, la totalité des coûts liés à la prestation de services en français par le gouvernement territorial. Or, d’année en année, le montant accordé par le gouvernement fédéral diminue et les services en français se font rares. De plus, des représentants de la communauté ont exprimé des doutes quant à l’utilisation correcte de ce financement par le GTNO.

À qui la faute? Selon Lise Picard, du ministère du Patrimoine canadien, les rapports d’activités soumis annuellement par le gouvernement territorial «ne sont pas passés à la loupe». Le gouvernement fédéral maintient une politique respectant l’autonomie du gouvernement territorial dans la gestion du financement public qui lui est accordé.

Cette autonomie du gouvernement territorial a d’ailleurs suscité un court débat juridique. Selon l’une des positions, il serait possible que le gouvernement territorial puisse être assimilé à une institution fédérale puisque, contrairement aux provinces, les territoires n’ont aucune reconnaissance constitutionnelle et sont des créations du gouvernement fédéral. Cette possibilité ne reçoit cependant pas l’appui de la jurisprudence, dans son état actuel. Ce serait plutôt la thèse opposée, celle s’appuyant sur une interprétation plus restrictive de la portée des garanties constitutionnelles en matière de droits linguistiques des minorités, qui aurait une longueur d’avance. Ainsique le mentionnait Me Michel Francoeur, il faudra attendre un jugement de la Cour suprême du Canada pour trancher définitivement cette question.

Les participants au Forum ont terminé leurs travaux en acceptant 28 recommandations visant principalement à inciter le gouvernement territorial à améliorer sa prestation de services en français et demandant au gouvernement fédéral d’appuyer la communauté francophone des T.N.-O. dans ses démarches pour obtenir ces services.

De plus, ces recommandations ouvrent la porte à la Fédération Franco-TéNOise en vue d’intenter des poursuites judiciaires pour faire respecter les droits linguistiques de la communauté.