le Samedi 19 avril 2025
le Vendredi 14 mai 2004 0:00 | mis à jour le 20 mars 2025 10:35 Francophonie

Problème financier à l’AFCY La radio écope

Problème financier à l’AFCY La radio écope
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Face à l’ampleur du déficit auquel l’Association franco-culturelle de Yellowknife (AFCY) doit faire face, le conseil d’administration de l’organisme a dû se résoudre à faire fonctionner la radio communautaire sans employé. « Nous ne pourrons pas renouveler le contrat de Sylvie. Nous abolissons le poste jusqu’à ce que l’on trouve d’autres fonds pour la réengager ou faire quelque chose d’autre. Mais là, c’est impossible de soutenir la radio tel quel », a fait savoir le nouveau président de l’AFCY, Jean-François Pitre.

Ce dernier ne peut cependant pas dévoiler de chiffre exact pour illustrer le déficit accumulé par l’organisme francophone. « Nous n’aurons pas de chiffre avant deux ou trois jours avant l’assemblée générale annuelle du 9 juin prochain. Je ne veux pas alarmer les gens, mais oui, il s’agit d’un gros déficit. Cependant, c’est possible d’en revenir. Il faudra travailler fort, couper et avoir davantage recours aux bénévoles », dit le président.

La directrice actuelle de la radio, Sylvie Boisclair, avait déjà signé un contrat qui s’étendait du 16 août 2004 au 25 juin 2005. Cette dernière avait renoncé à recevoir une rémunération pendant sept semaines, à l’été, pour faciliter l’embauche d’un étudiant. De plus, Mme Boisclair avait consenti à ne travailler que 25 heures par semaines pour la durée de son prochain contrat. « On est venu m’annoncer qu’on n’avait pas les moyens d’avoir cet étudiant et du même souffle, on m’a annoncé que l’on résiliait mon contrat », de raconter celle qui dit vivre « une peine d’amour ».

Au cours des prochains mois, donc, l’AFCY compte sur le dévouement des bénévoles pour faire fonctionner la radio communautaire francophone de Yellowknife. « Nous voulons retourner à un niveau plus communautaire, avec les bénévoles. On veut trouver une dizaine de bénévoles qui feraient, peut-être, une heure chacun par semaine », dit M. Pitre.

Selon lui, il sera possible de continuer à avoir une programmation régulière avec une équipe composée de bénévoles. « C’est évident que ce ne sera pas facile et ce ne sera probablement pas trois heures par jour, mais je sais que ça se fait à d’autres endroits, dans des écoles ou des collèges. Il y a toujours des bénévoles à qui ça tient à cœur et qui le font », dit le nouveau président qui en profite pour lancer un appel aux personnes intéressées.

Pour maintenir sa licence de diffusion, accordée par le CRTC, Sylvie Boisclair rappelle que la radio se doit de fournir un minimum de 15 heures de programmation locale par semaine, ainsi que des nouvelles locales. Selon elle, la réponse aux exigences du CRTC dépendra dorénavant de la mobilisation de la communauté. « Pour faire de la radio, ça prend le petit feu à l’intérieur. Ce n’est pas la même chose qu’organiser un événement ponctuel. Il faut revenir à toutes les semaines et apprendre à ne pas s’ennuyer avec soi-même. Les gens qui ont ce feu sacré sont très rares », dit-elle, rappelant qu’au cours de ses deux années passées à la radio, elle a vu un bon nombre de bénévoles arriver avec un haut taux de motivation qui, finalement, s’estompait au bout de quelques semaines.

Jean-François Pitre croit qu’il sera possible, par différents moyens techniques, de remplir les exigences de l’organisme fédéral chargé d’émettre les licences de diffusion aux stations de radio et de télévision. Par exemple, le président de l’AFCY (qui œuvre professionnellement dans le milieu de l’audio-visuel), verrait d’un très bon œil la diffusion d’émissions en différé.

Du côté de l’Alliance des radios communautaires du Canada (ARC), on croit aussi qu’il est possible de faire fonctionner une radio communautaire avec le seul concours des bénévoles. « Avec la technologie qu’on a aujourd’hui, c’est envisageable. Il reste que si l’on veut abolir le poste permanent qui veillait à toute l’administration des contrats de publicité ou de placements, il faudra une équipe de bénévoles bien rodée et bien avisée pour pouvoir faire face aux obligations futures de la station et respecter les engagements pris envers le CRTC. Ce n’est donc pas impossible, mais ça va nécessiter la mise en place d’un comité et il faudra identifier correctement les tâches à accomplir et les personnes responsables », dit le secrétaire général de l’organisme national, Serge Paquin, qui rappelle que plusieurs stations de radio fonctionnent de cette manière.

Pour ce qui est des relations entre l’ARC et Radio Taïga, le secrétaire général « s’attend à ce que, dans une période de transition, on identifie clairement une personne avec qui nous aurons des contacts sur une base régulière pour que l’information et la communication se poursuivent entre l’association nationale et son membre (CIVR) ».

La situation ramène à l’avant-plan le dossier de la survie des petites radios francophones en milieu minoritaire. Rappelons que le ministère du Patrimoine canadien subventionne la mise sur pied de ces radios, mais qu’ensuite, ces radios doivent trouver le moyen de voler de leurs propres ailes. « Le dossier a avancé, dit M. Paquin, nous avons rencontré la ministre du Patrimoine canadien, Mme Chalifour Scherrer, ainsi que son directeur général du programme d’appui aux langues officielles, et la question a été soulevée. Je pourrais dire qu’il y a une ouverture qu’il n’y avait pas avant, pour ce qui est de considérer l’importance de soutenir la programmation locale dans les petits marchés », fait savoir M. Paquin.

Celui-ci ne va pas jusqu’à évoquer la possibilité que le ministère fédéral finance l’embauche d’employés pour les radios, mais plutôt d’aider à produire un nombre déterminé d’heures de programmation, sur une base hebdomadaire ou annuelle. « Au cours des prochaines semaines et des prochains mois, nous revendiquerons l’importance de mettre ça sur pied et je reste confiant que si ce n’est pas cette année, ce sera sûrement l’année prochaine ».

Sylvie Boisclair dit qu’elle voyait pointer les bonnes nouvelles à l’horizon, bien qu’elle pressentait la prochaine année comme étant « l’année d’extrême pauvreté ». « J’arrivais dans une portion pauvre économiquement, mais faste, parce que je sentais qu’après, on commencerait à toucher quelque chose de plus profond, plus ancré et plus stable. J’aurais consacré mes 25 heures par semaine à polir les projets de développement en place. Ça devrait être difficile de préserver le momentum » dit celle qui croit que les actions politiques entreprises au cours des derniers mois « auront un impact incroyable ».