Pour sa défense, le gouvernement fédéral n’a fait comparaître qu’un seul homme, Louis Chagnon.
À l’emploi de Patrimoine canadien, Chagnon est gestionnaire pour la région des Prairies et du Nord dont les bureaux sont situés à Winnipeg. C’est lui qui siège à la table de négociations quand les deux paliers gouvernementaux discutent du financement des services en français aux TNO.
Selon lui, le fédéral ne traite pas les TNO différemment des autres provinces et territoires. Il fournit les fonds nécessaires à la prestation des services en conformité avec l’évaluation des besoins faite par le territoire. Les fonds sont attribués dans la mesure que le cadre financier du gouvernement fédéral le permet.
Ces limites, a-t-il admis, causent certaine lacunes. « Il y a un manque de capacité général [partout au pays] », a déclaré Chagnon. Et même la capitale nationale, où le nombre de francophones en chiffres réels et en pourcentage de la population est plus élevé qu’aux TNO, ne fait pas exception à cette règle.
« L’application de la Loi est une lutte constante entre un idéal et la réalité », a-t-il expliqué..
Chagnon, qui a travaillé au Nunavut, considère que les TNO sont « de loin » en avance sur ce territoire au chapitre des services en français. Aux dires du témoin, au Nunavut, il y aurait des lacunes « dans tous les domaines ».
Le Franco-manitobain a expliqué que ces lacunes étaient excusables compte tenu que le territoire fait face à des défis hors du commun : c’est un endroit éloigné et difficile d’accès, la population est petite et étalée sur un vaste territoire. Bref, c’est similaire aux TNO.
Voilà qui fait dire au témoin que le travail entrepris pour donner des services dans leur langue aux Franco-ténois, s’il est entaché par « des problèmes majeurs », est quand même appréciable.
Chagnon se dit même d’accord avec l’affirmation selon laquelle le gouvernement des TNO aurait fait, au cours des dernières années, « des progrès remarquables » quant à l’offre de services en français.
L’avocat du gouvernement des TNO, Me Maxime Faille, l’a questionné sur l’attitude de son client lors des négociations avec Patrimoine canadien. Est-ce que les TNO ont toujours fait montre de vouloir se conformer à leurs obligations? « Oui », répond le témoin. De bonne volonté? « Oui. » Du désir d’augmenter le nombre de services offerts? « Oui. » De mauvaise foi? « Non. »
Chagnon a aussi opiné à l’affirmation que le gouvernement des TNO est « chanceux d’avoir des personnes aussi compétentes » que l’équipe de négociation, au sein de sa fonction publique.
L’avocat de la Fédération Franco-Ténoise, Me Roger Lepage, semblait dubitatif vis-à-vis de toutes ces fleurs lancées au gouvernement des TNO. Il a réussi à lui arracher que ses opinions quant aux « progrès remarquables » du gouvernement ne tenait pas compte d’une lettre signée par la sous-ministre adjointe du ministère de l’Éducation, de la Culture et de la Formation, dans laquelle on indiquait la FFT était « très critique » du travail accompli. Il ne tenait pas compte, non plus, de l’existence même du présent procès.
Quant aux fonctionnaires exceptionnellement compétents, Chagnon a été capable d’en nommer au moins deux : Jean-Marie Mariez, qui jusqu’à récemment était le responsable des programmes d’enseignement en français au ministère de l’Éducation, et Mark Cleveland, le sous-ministre de l’Éducation, de la Culture et de la Formation.
Étape suivante
Depuis lundi, la Cour est libérée afin de laisser aux avocats le soin de préparer leurs plaidoiries respectives. Durant trois jours à compter de ce mardi, le débat final aura lieu au Palais de justice de Yellowknife.
C’est à ce moment-là que seront présentés les arguments concernant le statut légal des territoires. À savoir si ce sont des entités autonomes, comme les provinces, ou des institutions du gouvernement fédéral.
Me Roger Lepage, pour les demandeurs, ouvrira le bal et disposera de toute la première journée pour étayer son argumentaire. Puis ce sera la représentante de la commissaire aux langues officielles du Canada, Me Pascale Giguère qui fera sa présentation. Elle disposera de deux heures. La parole revient ensuite au gouvernement des TNO. Me Maxime Faille prendra une journée pour faire valoir son point. Le gouvernement fédéral, représenté par Me Alain Préfontaine et Me Marie Crowley, devra être plus succinct. Il n’a que quelques heures pour plaider. Me Lepage aura, enfin, un second droit de parole.