L’Assemblée générale annuelle de la fédération franco-ténoise a attiré à Yellowknife une belle brochette d’acteurs clefs du développement des communautés minoritaires de langues officielles du Canada. En cette période de changement, ils n’ont pas pu s’empêcher de parler de l’arrivée de Stephen Harper à la tête du gouvernement canadien.
Dans une entrevue accordée à la radio francophone CIVR Radio Taïga, la commissaire aux langues officielles du Canada, Dyane Adam, a indiqué qu’elle avait déjà pris soin d’écrire au leader conservateur.
L’ombudsman des langues canadiennes a signifié à Stephen Harper qu’elle s’attendait à ce qu’il nomme un ministre responsable des langues officielles. L’absence d’un tel ministre serait « un recul », selon la commissaire. « Ça prend quelqu’un pour porter une vision ; ça prend un chef d’orchestre », a-t-elle déclaré.
« Lors d’un changement, a-t-elle dit, il y a toujours une période de sensibilisation. » C’est pourquoi, dès le cabinet formé, Mme Adam s’attend à rencontrer « certains ministres clefs » – à savoir le ministre du Patrimoine, le ministre responsable des langues et le chef du Conseil du trésor – de même que monsieur Harper lui-même pour leur rappeler leurs obligations envers la Loi sur les langues officielles.
Dyane Adam compte, entre autres, leur rappeler l’adoption récente de la loi S-3 qui rend exécutoire la partie VII de la Loi sur les langues officielles, partie qui porte sur la promotion du français et de l’anglais .
Le ministre
Le ministre responsable des langues officielles des TNO, Charles Dent, a pris la parole lors de l’Assemblée générale et n’a pas manqué de souligner, lui non plus, l’arrivé des conservateurs.
Le renouvellement de l’Accord de coopération Canada-TNO, l’entente sur le financement des services territoriaux dans les langues officielles autres que l’anglais négociée entre le fédéral et le territorial, n’a pas été conclu l’an dernier avec l’ancienne ministre de Patrimoine canadien en poste, Liza Frulla, a rappelé le ministre. Une situation « un peu frustrante », a-t-il concédé.
« Je vais certainement faire pression sur le nouveau ministre [du Patrimoine] afin de bientôt conclure un accord pluriannuel », a promis Dent.
Le ministre a souligné que le nouvel Accord devra souscrire au principe d’asymétrie pour être accueilli favorablement par le territoire. « Tous les leaders ont indiqué qu’il est logique que les ententes pour le Nord reflètent les coûts et les défis spécifiques au Nord. Nous rappellerons aux nouveaux leaders politiques et aux fonctionnaires fédéraux ces engagements, lors des prochaines négociations. »
Le ministre Dent a aussi indiqué qu’il comptait réclamer un financement accru du fédéral afin de mieux refléter les besoins des Franco-ténois en développement communautaire.
Le directeur général des programmes d’appuis aux langues officielles de Patrimoine canadien, Hubert Lussier, qui se trouvait dans la salle, a certainement prêté une oreille attentive aux propos du ministre. Le grand argentier des communautés francophones hors Québec a admis qu’avec un gouvernement neuf il aura du boulot.
Il va falloir « faire de l’éducation auprès du nouveau ministre [du Patrimoine] », a-t-il dit.
« À Ottawa, a-t-il poursuivit, ce n’est pas évident de comprendre votre réalité, […] le degré d’ignorance est très fort. […] Chacun de vous, dans vos dialogues, vous avez à faire comprendre ce genre de choses. »
La mise en œuvre de la loi S-3 sera un défi du présent exercice, a-t-il renchérit. « Ça va être mon travail, avec votre aide, de faire comprendre [aux parlementaires] qu’ils ont désormais un engagement à votre égard », a déclaré Lussier aux délégués franco-ténois.
Quant aux négociations entourant l’Accord Canada-TNO, Hubert Lussier, confirme l’urgence de reprendre les négociations dès que le cabinet aura été dévoilé. « Il y a des échéances très proches. C’est impératif : nous devons signer une entente avant le 31 mars », a-t-il dit.
FCFA
La directrice de la Fédération des communautés francophones et acadienne du Canada (FCFA), Marielle Beaulieu, était également à l’assemblée générale.
La représentante du lobby francophone s’est dite incertaine des intentions du gouvernement Harper à l’égard des francophones en milieu minoritaire. Comme plusieurs, elle attend le dévoilement du cabinet pour se faire une idée plus claire.
Elle a souligné le peu d’information entourant le projet de Stephen Harper de créer un « secrétariat des affaires francophones ». « C’est une promesse un peu floue, mais elle est là », a-t-elle dit, ajoutant qu’elle espérait que cette structure servira l’intérêt des communautés minoritaires.