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le Vendredi 10 mars 2006 0:00 Francophonie

Le défi d’Alpha : « Redynamiser » la radio

Le défi d’Alpha : « Redynamiser » la radio
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Depuis un mois, CIVR Radio Taïga a quelque chose qui lui manquait depuis trop longtemps : un employé.

Alpha Sow, est le nouveau directeur de la seule radio francophone aux Territoires du Nord-Ouest. D’entrée de jeu, il admet que le défi qu’on lui confie en est un de taille. « Il faut redynamiser la radio », dit-il, laconique.

Après plus d’un an et demi à ne fonctionner qu’avec des bénévoles, Radio Taïga est essoufflée. Si on ne compte pas la série Le Printemps des artistes, animée par Patrice Lapointe et qui sera retirée des ondes après la cinquième émission, il ne reste plus que trois émissions régulières produites dans les studios de CIVR : L’Afrique en musique, émission musicale réalisée par Gaspard Kabanga tous les dimanches, la bi-hebdomadaire alternative Bouge les Bouddas avec la voie persévérante de Benoît Boutin et Par un dimanche au soir… une émission du lundi, que l’auteur de ce texte à le plaisir d’animer depuis septembre 2005.

« Il faut développer de nouveaux contenus », note le nouveau directeur qui entreprend, ces jours-ci, une campagne de recrutement de nouveaux bénévoles. Avis aux expressifs, Alpha espère trouver des gens qui ont envie de prendre le micro. « Il faut créer des émissions originales et qui dureront », lance-t-il en ajoutant que, lui, n’animera pas. « Je n’ai pas ce talent-là », dit-il modestement.

Ceux qui écoutent Radio Taïga savent bien que cette radio-là – quand elle fonctionne – a un son unique en son genre. Bien sûr on y joue de la musique en français. Mais au-delà de cette étiquette linguistique, c’est aussi la seule radio à Yellowknife qui fasse tourner des musiques du monde, de la musique électronique, du métal ou des artistes émergeants. Il faut le dire, c’est en grande partie grâce aux immenses libertés qu’ont prises les bénévoles de la radio quand il n’y avait pas de direction que le 103,5 MF a aujourd’hui, ce son pour le moins éclectique. À part CIVR, il n’y pas beaucoup de radios qui se permettent de jouer à heure de grande écoute « Chérie, tu fourres mieux quand t’es stone » de WD-40…

Le nouveau directeur pense que c’est sur cette image différente que Radio Taïga doit miser si elle veut arriver à reconquérir les tympans de Yellowknife. « Il faut créer une identité à Radio Taïga. Nous sommes des francophones, nous sommes une minorité, nous sommes différents. Je pense que notre radio doit être différente aussi. Depuis deux ans, la programmation de Radio Taïga reflète quand même cette différence, mais je pense qu’il faut la renforcer », insiste-t-il.

Alpha Sow aimerait bien aussi métisser davantage les ondes francophones de Yellowknife, afin qu’elles représentent plus sincèrement la société des Territoires du Nord-Ouest. « Il faudrait créer des liens avec les Autochtones, avec les anglophones aussi », dit le Guinéen naturalisé Canadien, indiquant que des partenariats sont en développement avec CKLB, la radio communautaire autochtone.

Si la musique de Radio Taïga est différente, ça fait par contre longtemps que ce sont les mêmes airs qui tournent en boucle. La banque de chansons du système informatique de la radio francophone n’a pas été renouvelée depuis un bout de temps et les hits de 2004 font encore office de « nouveautés ». Cela est appelé à changer. Bien qu’il n’est pas question, pour l’instant, d’acheter de nouveaux disques, une utilisation plus intelligente de l’imposante discothèque de Radio Taïga est en train de se développer. « On n’utilise pas 5 % de la discothèque », constate Alpha Sow. Déjà, les chansons trop entendues ont commencé à être retirées de la banque et remplacées par de nouveaux refrains.

Il est également question de faire jouer davantage cette excellente musique locale qu’on entend presque jamais ailleurs que dans les bars et les jams privés. Tenez-vous le pour dit, les artistes d’ici, Radio Taïga a l’intention de faire tourner vos albums. N’hésitez donc pas à les faire parvenir à leur studio.

Une présence accrue

« Nous devons êtres plus présents, si nous voulons retenir l’attention du public», pense Alpha Sow.

C’est dans cette optique que Radio Taïga projette d’organiser des événements culturels et d’avoir un kiosque dans tous les grands rassemblements de Yellowknife. « À tous les festivals, on doit être là », lance le directeur.

Radio Taïga sera donc de la fête au Caribou Carnaval, à la fin du mois. Pour cette première manifestation publique de la radio francophone depuis qu’elle a à nouveau un employé, CIVR animera la cabane à sucre de l’Association franco-culturelle de Yellowknife, en diffusant de la musique traditionnelle et folklorique.

« Nous avons aussi une disco mobile », annonce le directeur. En effet, depuis longtemps la radio dispose d’un équipement de sonorisation mobile à faire pâlir d’envie bien des DJ, mais inutilisé, il dort dans les armoires. Alpha Sow, lui, veut s’en servir. « Si vous voulez organiser une fête, dites-le nous. On peut venir avec notre équipement », dit-il en précisant que cela serait à la fois un moyen de faire connaître la radio et de financer ses activités.

CIVR sera aussi présente sur le Web. Le site civr.info n’est pas très garni, mais il fonctionne. On y trouve, notamment, la version la plus récente de la grille des programmes et un formulaire d’inscription pour les bénévoles. Par contre, il n’est pas encore question que la radio diffuse sur le Web, ce qui la rendrait accessible dans toutes les communautés des TNO, et partout dans le monde en fait.

Alpha Sow se dit conscient qu’il y a une demande à cet effet de la part des autres associations francophones du territoire. Il espère que cela se réalisera le plus tôt possible, mais il estime que cela devra attendre « encore au moins un an ».

Le retour des nouvelles ?

Il est enfin question de refaire une place à l’information locale sur CIVR. « Nous avons un projet de bulletin de nouvelles avec L’Aquilon », indique le nouveau directeur qui précise qu’aucune entente formelle entre les deux médias n’a encore été élaborée.

De son côté, le directeur de L’Aquilon, Alain Bessette, est plus précis. La formule la plus plausible, selon lui, serait d’enregistrer un « court » bulletin de nouvelles quotidien, du lundi au vendredi. Il ajoute que tant qu’il n’y aura qu’un seul journaliste dans la salle de rédaction du journal, il n’est pas question de mettre de l’énergie dans l’information à la radio.

Dans le passé, L’Aquilon avait déjà enregistré des bulletins de nouvelles pour Radio Taïga, mais en raison de la débâcle financière qui paralysait la radio communautaire, le projet avait fini en queue de poisson. Cette fois, Alain Bessette prévient que le service de nouvelles devra être élaboré « à nos conditions de participation et selon nos priorités. Chat échaudé craint l’eau froide »