Une victoire pout le respect des langues officielles, selon Serge Petitpas
Les charges contre Serge Petitpas, qui contestait une infraction de stationnement, ont été abandonnées vendredi dernier en Cour territoriale des TNO,en raison de l’incapacité de la municipalité à offrir un procès en français dans des temps raisonnables. « Ce n’est pas parce qu’il ne s’agit que d’une infraction à un règlement de stationnement qu’il n’y a pas violation des droits fondamentaux a dit la juge Christine Gagnon, qui présidait au procès. La mise en oeuvre du droit à être jugé en français a été déficiente. Les citoyens francophones reçoivent un service de second ordre parce que leurs droits ne sont pas souvent invoqués. La ville a fait des efforts et ils ne sont pas critiqués. Mais l’article 530 du Code Criminel ne veut rien dire si les autorités ne sont pas en mesure d’offrir les services en français. Le délai est déraisonnable, je déclare l’arrêt des procédures.»
L’article 530 du Code Criminel réfère au droit d’un accusé à être dans une des langues officielles du Canada. La juge Gagnon a également invoqué l’article 11B de la Charte des droits et libertés, qui traite des délais, et l’article 9 de la Loi Territoriale, sur l’usage des langues officielles dans les tribunaux des TNO. L’avocat Serge Petitpas, qui se défendait lui-même, risquait six mois de prison ou 2000$ d’amende. Il s’est déclaré satisfait du jugement. «C’est une victoire pout le respect des langues officielles, a-t-il affirmé. Le tribunal a reconnu que le français n’est pas une langue de second ordre et que le délai engendré par les défis administratifs n’est pas justifié dans les circonstances.»
Une simple contestation
Il s’est passé 359 jours entre l’émission du constat d’infraction, émis à Serge Petitpas 22 mai 2013 pour avoir stationné sur un terrain privé, et le jugement final en Cour territoriale le 16 mai 2014. Serge Petitpas contestait l’infraction et l’amende de 50$ pour des arguments légaux sur les règlements municipaux et voulait être jugé en français. Le procès a été ajourné à plus de quatre reprises. Lors du dernier épisode de cette saga, la municipalité de Yellowknife était représentée par l’avocat Paul Falvo, et on a fait appel à un interprète. Maître Falvo a fait appel à deux témoins, Douglas Gillard, responsable du maintien des lois municipales, et Kerry Penney, gestionnaire des services légaux et des politiques à la ville de Yellowknife. Le premier a expliqué les procédures lors d’infractions aux règlements municipaux. Il peut s’écouler entre six et huit mois pour aviser une personne de la tenue d’un procès en contestation, a-t-il dit. Yellowknife est une ville où les gens bougent beaucoup et il est parfois difficile de les retrouver.
Kerry Penney est avocate, peut lire et écrire en français, mais ne se sent pas à l’aise de mener un procès en français. Elle a principalement témoigné en Cour des démarches de la ville pour trouver un francophone qui puisse la représenter. Aux moments des dates de procès, les employés de la ville parlant français étaient soit en vacances soit en congé maladie. «Nous avons ensuite contacté le gouvernement territorial pour trouver un avocat parlant français, explique-t-elle, puis le gouvernement fédéral, qui avait quelqu’un de disponible mais était en conflit d’intérêt parce qu’il connaissait le défendant.» Les démarches ont encore continué jusqu’à ce que Paul Falvo puisse reprendre la cause
Plaidoiries
Lors de la plaidoirie finale, le procureur Paul Falvo a découpé les délais en deux segments, le premier en 2013 et le second en 2014. Le premier délai était d’ordre administratif, a-t-il expliqué, reprenant le témoignage de Doug Gillard sur le fait que Yellowknife soit une ville où l’on déménage beaucoup et que cela allonge les procédures. «. Le français n’est pas la langue de la ville à tous les jours, a-t-il ajouté, ni celle de la Cour territoriale. Il y a eu deux courts délais et la ville n’en était pas responsable. Serge Petitpas n’a pas démontré qu’il avait souffert de préjudices, qu’il avait perdu des témoins, ou que sa capacité à se défendre a été diminuée. Ce n’est pas une cause sérieuse et il n’y a pas de danger qu’il perde son emploi.»
Maître Petitpas a rétorqué qu’il avait subi l’inconvénient de se rendre en cour à plusieurs reprises et que très peu des délais lui étaient attribuables. Il a rappelé qu’il risquait six mois de prison ou 2000$ d’amende. « Les témoins, a-t-il souligné, ont expliqué les délais mais ne les ont pas justifiés. Le seul remède c’est l’abandon des procédures.»
Lors de son jugement, Christine Gagnon a dit qu’elle avait été tentée d’ajourner sa décision afin de donner des motifs plus étoffés mais qu’afin de ne pas ajouter des délais additionnels, elle le ferait maintenant et rendrait ultérieurement ses motifs par écrit. Elle a donné raison au procureur d’identifier deux types de délai, le premier étant institutionnel. «Mais, a-t-elle souligné, l’application aveugle de cette politique est préjudiciable à ceux qui ne bougent pas. Serge Petitpas n’avait pas déménagé et était facile à repérer.»