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le Jeudi 12 novembre 2015 10:49 | mis à jour le 20 mars 2025 10:39 Francophonie

Chronique sur la francophonie Un pignon pour tous les francophones…

Chronique sur la francophonie Un pignon pour tous les francophones…
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Il y eut une époque où tous ceux et celles qui parlaient français logeaient à la même enseigne, celle des Canadiens-français. Il en a été ainsi jusqu’au milieu du XXème siècle.
Et puis, il y a eu l’effervescence des années 60 : Révolution tranquille au Québec, éveil identitaire ailleurs. Dans la foulée, Québécois et autres francophones ont fini par percevoir leur différence.
La scission a commencé à paraitre dans les années 70. Il m’a été donné de la voir dans toute son évidence.
C’était en 1974 à la Superfrancofête, une formidable célébration de la francophonie mondiale tout en spectacles et en chansons, dans la Vieille capitale.
La Fédération des jeunes Canadiens-français y avait dépêché des délégations de toutes les provinces. Toutes?! Oui, absolument. Le Québec aussi était convié. On nous avait alors demandé d’illustrer la vie française dans nos coin de pays respectifs, en montant une petite pièce de théâtre. La délégation du Québec s’est sentie à part. Elle ne se reconnaissait pas dans ce qu’elle avait vu.
Le dénominateur commun, soit la langue d’expression, était désormais fractionné. On constatait par le fait même que la fusion des francophones du Canada anglais et du Québec en un bloc monolithique n’était plus faisable. La francophonie pancanadienne au sein de cette génération en pleine croissance s’étiolait déjà.
Il y eut par la suite des métaphores blessantes à l’endroit des minorités; les «Dead Ducks», les «Homards encore chauds de l’Atlantique» et puis les paroles de Jacques Parizeau le soir de la défaite référendaire de 1995. Je ne parle pas de l’outrageant «vote ethnique», mais de l’ouverture de son discours. «Cessons de nous appeler francophones» avait-il dit, distinguant ainsi le Québécois des autres parlant français.
De plus, le Québec a pris l’habitude de se ranger dans le camp adverse quand une cause scolaire aboutit en Cour suprême. Il a récemment plaidé contre les parents Franco-ténois dans la cause qu’ils viennent de perdre.
Bien sûr, tout n’est pas sombre. Lucien Bouchard tendait la main aux francophones du Canada avant le référendum de 1995. Le Secrétariat aux affaires intergouvernementales canadiennes leur apporte aujourd’hui un soutien appréciable. Mais en définitive, le temps a bien délavé l’enseigne commune.
Cela dit, les derniers jours d’octobre ont vu la naissance d’un grand réseau dont Québec se veut le coeur, celui des villes francophones et francophiles d’Amérique. Le maire Régis Labaume, en a pris l’initiative, accompagné de deux villes fondatrices, Lafayette en Louisiane et Moncton au Nouveau-Brunswick.
Quand on se souvient du soulèvement étudiant de 1968 qui avait exposé au grand jour la francophobie du maire de Moncton de l’époque, Leonard Jones, on se dit que le français a pris du galon.
Une cinquantaine de villes veulent monter à bord de ce convoi qui veut toucher à toute la francité d’Amérique. Cela commence par les citoyens qui parlent la langue pour aller jusqu’au coin de terre isolé qu’un francophone aurait foulé de ses semelles, au hasard de ses découvertes dans l’Histoire oubliée.
On y jase tourisme, valorisation culturelle, historique et patrimoniale. Ce serait donc ces thèmes qui rassembleraient maintenant cette francité dispersée. Mais pourquoi ne pas voir les choses autrement? Par exemple, faire de cette nouvelle enseigne commune, une tribune pour protéger la culture française là où rien n’est acquis, où il faut encore demander.
Ces endroits existent encore au Canada. Les parents des Territoire du Nord-Ouest ont sans doute l’impression d’en habiter un. Leur gouvernement ne veut pas leur laisser la liberté d’accueillir qui ils veulent dans leurs écoles.
Il est certes plaisant que la culture française se déploie comme un grand éventail aux quatre coins de l’Amérique. Mais au delà du patrimoine, il y a ce quotidien qui maintient tout ça en vie, par l’effort, le travail et l’engagement. Si le Réseau des villes francophones et francophiles de l’Amérique pouvait en devenir un ardent défenseur…