Une résidente de Yellowknife n’en peut plus des visites à l’hôpital territorial Stanton de Yellowknife.
« Je préfère rester chez moi et endurer ma douleur plutôt que d’être confrontée aux services offerts à l’hôpital Stanton. Je ne suis pas capable d’avoir du service en français et toutes mes lettres, je les reçois en anglais. » C’est le cri de détresse de Suzanne Houde, une résidente de Yellowknife qui utilise fréquemment les services de l’hôpital. Elle est mécontente que les brochures d’information soient toutes rédigées en anglais. Madame Houde, qui doit prendre une décision avertie concernant une opération au genou, dit que faute d’information en français, elle ne comprend pas les exercices qu’elle devrait effectuer avant cette chirurgie, ni les conséquences de cette opération. Elle avance que toute la documentation concernant ses traitements de physiothérapie ainsi que ses rapports d’examens mammographiques sont en anglais. Cette patiente reconnait que des services d’interprétation en personne et par téléphone lui ont été offerts, mais qu’ils n’ont pas répondu à ses besoins.
Dans le plan stratégique sur les communications et les services en français du GTNO, il est indiqué que lorsque le public est mécontent de la non-disponibilité, de la prestation incomplète ou de la mauvaise qualité des services en français, une plainte officielle peut être formulée par l’entremise du coordonnateur des services en français de l’établissement ou auprès du Secrétariat aux affaires francophones. Un individu peut également s’adresser à la commissaire aux langues des TNO. Une tâche peu aisée alors que seule la voie électronique est proposée sur le site unilingue du commissariat aux langues officielles des TNO.
Suzanne Houde a choisi de se plaindre à la coordonnatrice des services en français de l’Administration de santé territoriale Stanton (ASTS).
Après avoir décrit la piètre justesse des termes médicaux traduits en français par les services d’interprétation médicale à l’hôpital, Suzanne Houde a obtenu comme réponse qu’en février 2016, l’ASTS avait essayée en vain de recruter un employé au poste d’interprète médical et que d’autres démarches sont en cours avec le ministère des Ressources humaines. Actuellement, sur le site de recrutement des services de santé territoriaux, aucune offre d’emploi ne mentionne l’utilisation de la langue française, même dans les offres touchant les quatre collectivités désignées comme ayant une demande importante en matière de communications et de services en français, soit Yellowknife, Hay River, Fort Smith et Inuvik.
Pour la collectivité, non l’individu
Suzanne Houde a également sollicité l’aide de la fédération franco-ténoise (FFT) dans ce dossier qui peut être conflictuel. Jean de dieu Tuyishime, directeur de la FFT, est bien au fait des défis que représente la livraison des services de santé en français. Ayant lui-même expérimenté certaines limites du système ténois, et surtout ayant été le coordonnateur du Réseau Santé TNO en français, il compatit aux exhortations de Suzanne Houde. Mais M. Tuyishime rappelle que la Fédération ne peut se faire la porte-parole d’un individu, car elle se doit de représenter politiquement la communauté francophone dans son ensemble. « Nous avons aidé Suzanne dans ses démarches, mais les services que l’on reçoit à l’hôpital sont individuels, ils ne sont pas offerts en groupe. [La FFT] ne peut pas s’avancer devant les instances territoriales et mettre de l’avant seulement un cas précis. » Si, selon le directeur de la FFT, personnifier un cas n’est pas la meilleure façon de faire, il dit qu’une des démarches éventuelles pour faire progresser les services en français est d’exprimer le niveau de qualité des services désiré par la communauté devant le comité de consultation et de coopération. Créé lors du plan stratégique sur les communications et les services en français, ce comité se compose des trois sous-ministres (Santé et des Services sociaux, Ressources humaines et Éducation, Culture et Formation), du directeur du Secrétariat aux affaires francophones ainsi que de représentants de la FFT. « On est au niveau où il y a une entente à mettre en œuvre. Alors oui, le fait que les individus testent cette offre de services est important. Mais est-ce que ça prend une personne ou dix personnes pour se rendre compte qu’il n’y a pas de service? C’est une question à poser au gouvernement » interjette Tuyishime. Ce dernier reconnait également que le comité de consultation et de coopération ne s’est pas réuni depuis le 25 septembre 2014.
Ce n’est pas la première fois que Suzanne Houde se plaint des services de santé qu’elle reçoit en français. En 2003, elle faisait partie des plaignants individuels qui ont confronté le GTNO aux côtés de la FFT et L’Aquilon sur la prestation de services en français au territoire. Concrètement, une visite idéale à l’hôpital pour Suzanne Houde serait qu’elle puisse s’exprimer en français lorsqu’elle arrive à l’accueil, sans ressentir de discrimination. Elle voudrait ensuite avoir accès au service d’un interprète médical si le docteur ou le spécialiste ne parle pas français et obtenir de l’information médicale en français. Elle dit que ses préoccupations ne concernent pas les aptitudes des travailleurs de la santé, mais bien les malentendus qui peuvent résulter d’une mauvaise communication.
La direction de l’ASTS a répondu à quelques questions de L’Aquilon concernant la qualité des services en français, et L’ASTS affirme qu’elle « est engagée à s’assurer que des services puissent être livrés au public francophone de façon constante au sein de son organisation. L’ASTS possède un coordonateur des services en français; sept travailleurs de liaison (des travailleurs de la santé ou des individus bilingues certifiés pour les termes médicaux) disponibles après les heures de travail et les weekends; neuf employés qui reçoivent un bonus de bilinguisme afin d’offrir des services d’interprétation sur demande ainsi qu’un contrat avec CanTalk offrant une interprétation téléphonique 24 heures sur 24.