De passage à Yellowknife, une ancienne Ténoise reflète sur son implication dans les territoires.
Beaucoup d’eau a coulé sous les ponts de la francophonie ténoise depuis le 4 avril 1988, jour où a débarqué à l’aéroport de Yellowknife, gros comme la maison bleue, Line Gagnon pour venir travailler comme journaliste à L’Aquilon. L’Acadienne installée désormais au Yukon depuis 2004 se souvient de l’absence d’infrastructures aux TNO, des moyens archaïques, des gens accueillants et chaleureux qui s’entraident. Elle revoit cette communauté vivante, engagée, impliquée; des bénévoles qui font tout, dont ceux de la radio qui a maintenant des employés à temps plein.
Après un an à L’Aquilon, un travail au musée et cinq années à la gérance de la librairie Book Cellar, cette voyageuse qui possède l’entreprise Calypso Communications a travaillé pour la première députée autochtone Ethel Blondin-Andrew pendant trois ans.
« Je me suis rendu compte que les députés fédéraux étaient là pour aider les gens. […] J’ai appris tellement de choses sur le gouvernement canadien, sur les différents ministères, et pourquoi ils sont là. »
Elle se souvient de la dévotion de Mme Blondin-Andrew envers les Territoires et les gens d’ici, surtout les plus démunis.
Son emploi suivant, aux Affaires autochtones, lui a aussi permis d’apprendre beaucoup sur les revendications territoriales, les sites contaminés, « sur comment en fait le gouvernement canadien a pris les Territoires et la façon dont il gérait les trois territoires ». Selon elle, les choses ont changé depuis ce temps-là, mais la mise en œuvre des revendications territoriales prend beaucoup de temps et le gouvernement canadien ne peut pas simplement se retirer et disparaitre, puisque de toute façon, ce sont les Relations Couronne-Autochtones et Affaires du Nord Canada qui gèrent la mise en œuvre des revendications.
Parallèlement à ses emplois en politique et en communication, celle qui s’est beaucoup impliquée aux conseils d’administration des différents organismes communautaires francophones à Yellowknife établit des similitudes entre la situation linguistique des Acadiens dans les années soixante et celle des Premières Nations du Yukon, qui sont ses clients principaux. Il y a une radio francophone à Iqaluit depuis longtemps, à Yellowknife aussi, mais aucune à Whitehorse, étonnamment. Des pourparlers seraient en cours.
Au Nouveau-Brunswick, « c’était très important qu’on ait le droit et l’opportunité de s’exprimer dans notre langue. Eux sont rendus là où nous on était quand l’assimilation était une vraie question et vraiment une menace ».
« J’ai commencé à m’impliquer pour ma langue quand j’étais adolescente, d’ajouter Madame Gagnon. C’était mon cœur, ça fait partie de moi-même, c’est juste naturel. La lutte actuelle va dans le même sens. Tout le monde a le droit d’avoir sa culture et son identité, surtout les Autochtones. »
Si les francophones du Canada ont obtenu, au cours des trente dernières années, énormément de gains sur le plan des infrastructures, des institutions, de la reconnaissance globale de leur langue et de leur droit de vivre, d’étudier et de travailler dans cette langue, il reste beaucoup de travail à faire pour que les Premières Nations, les Inuits et les Inuvialuits puissent jouir des mêmes privilèges et puissent vivre au quotidien dans la langue de leur choix.
Avec des propos recueillis par Nicolas Servel lors de l’émission RadTäg