le Mardi 1 juillet 2025
le Lundi 30 juin 2025 18:21 Francophonie

Francophonie dans le Nord : les ministres appelés à changer d’approche

La ministre Caitlin Cleveland prend la parole lors de la conférence de presse de clôture, entourée des autres ministres membres du Conseil sur la francophonie canadienne. — Photo Cristiano Pereira
La ministre Caitlin Cleveland prend la parole lors de la conférence de presse de clôture, entourée des autres ministres membres du Conseil sur la francophonie canadienne.
Photo Cristiano Pereira
Réunis à Yellowknife fin juin 2025, les ministres de la francophonie ont entendu un appel venu du Nord : adapter les politiques aux réalités isolées et uniques des TNO. La FFT a porté ce message, relayé dans plusieurs échanges au fil de la rencontre.
Francophonie dans le Nord : les ministres appelés à changer d’approche
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À l’occasion de la rencontre annuelle du Conseil des ministres sur la francophonie canadienne (CMFC), qui s’est tenue à Yellowknife les 26 et 27 juin 2025, la Fédération franco-ténoise (FFT) a lancé un appel clair aux ministres : il est temps d’adapter les politiques linguistiques aux réalités du Nord. Ce message, diffusé dans une lettre ouverte, a alimenté des échanges au cours des deux journées de discussions. Il n’est toutefois pas certain que tous les ministres aient pu en prendre connaissance, en raison de contraintes dans sa distribution.

« Dans ce contexte nordique unique, l’accès aux services, aux infrastructures et à une main-d’œuvre bilingue ne peut reposer sur des approches génériques », affirme la FFT dans son message adressé à l’ensemble des ministres. L’organisme, porte-parole de la francophonie aux Territoires du Nord-Ouest, y décrit une communauté « dynamique, résiliente, mais encore trop souvent négligée dans les politiques nationales ».

La lettre appelle les gouvernements à reconnaitre les défis propres au territoire, à « soutenir les projets structurants issus des Territoires du Nord-Ouest » et à « garantir un engagement équitable et durable envers toutes les communautés francophones du pays ». Pour la FFT, « le Nord doit avoir voix au chapitre » afin de bâtir « une francophonie forte, diversifiée et inclusive ».

Le gouvernement fédéral doit faire preuve de flexibilité. Ce qui va fonctionner pour une province au sud ne fonctionnera pas nécessairement pour un territoire.

— Steven Guilbeault, ministre fédéral des Langues officielles

Le ministre fédéral Steven Guilbeault, en visioconférence depuis l’extérieur du territoire, répond à une question de Médias ténois lors de la conférence de presse de clôture. À sa droite, sur place à Yellowknife, la ministre Caitlin Cleveland écoute attentivement. 

Photo Cristiano Pereira

Pour plus de souplesse

Ce message a trouvé écho auprès de quelques ministres présents à Yellowknife.

Le ministre fédéral des Langues officielles, Steven Guilbeault, a reconnu la pertinence de l’appel. « C’est évidemment l’un des sujets qui a été discuté au cours des derniers jours, a-t-il répondu à Médias ténois en conférence de presse. Le gouvernement fédéral doit faire preuve de flexibilité. Ce qui va fonctionner pour une province au sud ne fonctionnera pas nécessairement pour un territoire. » Et d’ajouter : « Même entre provinces, il y a des réalités qui sont très différentes d’un bout à l’autre du pays. Est-ce qu’on peut faire encore mieux ? Je pense que oui. »

Une approche sur mesure

Du côté du Québec, Jean-François Roberge, ministre responsable de la Francophonie canadienne, a tenu un discours similaire. Il a rappelé que les membres du CMFC se sont entendus pour s’opposer à une approche uniforme : « On ne veut pas des mêmes politiques d’un océan à l’autre. Il faut tenir compte des particularités. » Selon lui, cela implique « de faire des partenariats avec les provinces, les territoires » et d’abandonner l’idée « que le gouvernement canadien va faire une politique de la francophonie, et qu’elle s’appliquera partout. Ça ne fonctionne pas. »

Même à l’intérieur d’un même territoire, a souligné M. Roberge, il existe des différences régionales qu’il faut prendre en compte. « Et c’est ça le message qu’on a passé, ce qu’on a dit à Ottawa : écoutez, ça doit se faire ensuite en bilatéral avec chaque province ou avec chaque territoire. »

Construire ensemble

La ministre de l’Éducation, de la Culture et de l’Emploi des TNO, Caitlin Cleveland, a quant à elle souligné les bénéfices d’un dialogue entre les juridictions. « Même si on met souvent en avant les différences entre nos juridictions à travers le Canada, il y a en réalité énormément de points qui nous rassemblent et sur lesquels on peut bâtir ensemble », a-t-elle dit.

Faisant écho aux préoccupations de la FFT sur la rétention des francophones dans le Nord, Mme Cleveland a évoqué l’importance d’offrir des services qui permettent aux familles de s’enraciner durablement. « Comment rendre les services disponibles pour que les francophones puissent vraiment s’enraciner ici, fonder une famille et s’épanouir ? »

Elle a aussi insisté sur la nécessité d’éviter une mise en concurrence entre les langues : « Il s’agit de soutenir une communauté francophone florissante tout en continuant à encourager la revitalisation linguistique locale, sans opposer les communautés linguistiques entre elles. »

La lettre ouverte de la FFT espère que ce moment de dialogue mènera à « des engagements concrets et adaptés à nos besoins ». Si plusieurs ministres ont exprimé une écoute attentive, la suite des actions gouvernementales dira si l’appel lancé depuis le Nord portera ses fruits.