Attirer des immigrant.e.s francophones dans le Nord est une chose, les garder en est une autre. C’est à ce constat central que s’attaque une nouvelle étude consacrée aux réalités vécues par les personnes immigrantes francophones dans les Territoires du Nord-Ouest.
La recherche se penche sur les régions de Yellowknife, du Slave Sud et d’Inuvik, où les enjeux d’établissement et de rétention sont amplifiés par des contraintes bien connues. Isolement géographique, cout de la vie élevé et pénurie de logements façonnent des parcours migratoires souvent fragiles. Selon la chercheuse principale du projet, Sandrine Mournier, « les Territoires du Nord-Ouest présentent des particularités structurelles qui justifient une attention spécifique ».
Un contexte sous pression
La francophonie y représente une très faible proportion de la population et à cette réalité s’ajoutent une forte mobilité interprovinciale et des défis persistants liés à l’accès aux services en français. « La rétention demeure un enjeu majeur pour la vitalité et la pérennité de la communauté francophone des TNO », souligne Mme Mournier.
Selon elle, les trajectoires migratoires dans le Nord sont rarement linéaires. « Les parcours sont généralement instables », note-t-elle, en raison notamment des difficultés liées au logement, à l’emploi et à la reconnaissance des qualifications professionnelles. Elle explique aussi que la cohabitation avec des communautés autochtones et anglophones, dans un écosystème institutionnel limité, complexifie les processus d’intégration à long terme.
Les Territoires du Nord-Ouest présentent des particularités structurelles qui justifient une attention spécifique.
Donner la parole
Pour mieux comprendre ces réalités, l’étude mise sur une approche participative. Elle repose sur des entretiens individuels et des groupes de discussion, afin de documenter les expériences vécues par les personnes immigrantes francophones. « L’objectif central est de produire des connaissances qualitatives approfondies, ancrées dans les réalités locales », précise Sandrine Mournier.
Selon la chercheuse, cette démarche permet de dépasser les données statistiques existantes. « Il s’agit de donner une voix directe aux personnes concernées », explique-t-elle, en soulignant l’importance de recueillir des récits liés à l’établissement, à l’intégration et à la participation communautaire. Elle note que ces témoignages permettront d’identifier autant les obstacles rencontrés que les facteurs de succès propres au contexte nordique.
Orienter l’action
À court terme, l’étude vise à formuler des recommandations concrètes, adaptées aux contraintes territoriales des TNO. Selon la chercheuse, ces recommandations devront être « directement utiles aux acteurs communautaires et institutionnels ».
Cette étude est coordonnée au niveau local par le Réseau en immigration francophone des Territoires du Nord-Ouest (RIFTNO), un service de la Fédération franco-ténoise, et est entièrement financée par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC).
Une autre étude en parallèle
Parallèlement à l’étude menée aux Territoires du Nord-Ouest, un projet de recherche conjoint entre Montréal et Yellowknife s’intéresse aussi aux réalités des personnes immigrantes francophones. Le Collège nordique francophone et le Centre de recherche et d’innovation en francophonie éducationnelle (CRIFÉ) du Cégep Gérald-Godin ont obtenu une subvention de 55 000 $ sur un an du Réseau des cégeps et des collèges francophones du Canada (RCCFC). L’étude compare deux contextes sociolinguistiques très différents afin de mieux comprendre les réalités linguistiques, sociales et communautaires des personnes immigrantes francophones.
« Il s’agit de mieux comprendre les expériences vécues et de développer une approche commune, adaptée à nos contextes respectifs », explique, dans un communiqué, le chercheur principal du projet au CRIFÉ, Christian Bergeron.
Du côté du Collège nordique francophone, le directeur général Patrick Arsenault souligne que le projet vise à renforcer les liens entre les deux villes. « Mieux comprendre ces réalités est essentiel pour soutenir la vitalité francophone », note-t-il.
