Au début du mois, le gouvernement fédéral a rendu publiques ses réactions aux 49 recommandations d’un rapport du Comité permanent des Affaires étrangères intitulé Le Canada et l’univers circumpolaire qui avait été déposé au Parlement en avril 1997. La plupart des recommandations de ce rapport initial ont été retenues par le gouvernement à l’exception d’une proposition audacieuse à l’effet de démilitariser l’Arctique.
« Si l’Arctique était démilitarisé, il serait plus difficile, voire impossible, pour nos militaires d’assurer (la défense du pays) et les Forces armées canadiennes seraient incapables de mener des opérations propres à garantir notre souveraineté territoriale », peut-on lire dans le document fédéral.
Le Gouvernement du Canada y réitère ses priorités pour les régions arctiques, soit principalement l’environnement et le développement durable. Si on parle souvent de l’accumulation de contaminants dans l’habitat arctique, le public est généralement moins informé sur la menace alarmante que représentent les dépotoirs de bâtiments nucléaires dans les installations portuaires russes.
D’après des recherches récentes, il semble que cette contamination radioactive n’ait pas pénétré dans les eaux canadiennes mais constitue une menace directe pour les pays circumpolaires limitrophes de la Russie.
D’autre part, d’après un reportage de Radio-Canada Nord, Glen Koda, chercheur au Centre d’océanographie physique côtière de Virginie a détecté récemment dans la région de Resolute Bay des sédiments radioactifs dans la glace d’une importante intensité, de 10 à 100 fois le niveau normal de radioactivité. Koda croit que ces sédiments proviennent de rivières russes qui se déversent dans l’Océan arctique et non des dépotoirs de la mer du Nord. Si ces sédiments à la fonte des glaces se déposaient sur les bancs de moules, il faudrait en interdire la cueillette, a déclaré le chercheur.
Cette menace de pollution nucléaire en provenance de la Russie constitue donc une des grandes priorités canadiennes en matière d’environnement arctique.
L’autre grande priorité canadienne au Nord concerne le développement durable. Voilà pourquoi le Canada s’est fait l’hôte des 8 nations circumpolaires regroupées dans le Conseil de l’Arctique, cette semaine à Whitehorse au Yukon. Plus de 250 participants se sont rencontrés du 11 au 14 mai dernier pour planifier le développement de l’écotourisme, l’accès au micro-crédit, la formation professionnelle, la promotion de l’industrie culturelle et l’utilisation des ressources non renouvelables dans les régions nordiques.
Même si le Canada souhaite conserver l’initiative sur les questions circumpolaires, il maintient toujours le cap de l’austérité budgétaire et particulièrement en ce qui concerne le programme canadien d’Étude du plateau continental polaire (Polar Continental Shelf Project). Le ministre canadien des Affaires étrangères, Lloyd Axworthy a clairement affirmé que les niveaux de financement ne seraient pas augmentés ni pour le soutien à la recherche sur le terrain, ni pour la formation de scientifiques spécialisés sur le Nord.
Les milieux scientifiques canadiens se disent alarmés par cette absence d’engagement concret de la part du gouvernement canadien par rapport à la recherche scientifique arctique comme en témoigne cette entrevue avec Peter G. Johnson, le président de l’Association universitaire canadienne d’études nordiques, publiée dans L’Aquilon du 10 avril dernier. M. Johnson y évoquait la situation où le Canada ne se donnait même plus les moyens de suivre les recherches entreprises par d’autres pays dans l’Arctique.