le Samedi 19 avril 2025
le Vendredi 28 avril 2000 0:00 | mis à jour le 20 mars 2025 10:35 Politique

Toute la vérité exposée Retraités de la mine Giant

Toute la vérité exposée Retraités de la mine Giant
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Don McNenly n’en revenait pas lorsqu’il a ouvert une lettre envoyée par la firme Morneau Sobeco au mois de février. Elle lui annonçait que la compagnie Royal Oak Mines, l’ancien propriétaire de la mine Giant, a sous-financé le fonds de pension des employés pendant de nombreuses années. Résultat : après avoir travaillé plus de 32 ans à la mine, son chèque de pension mensuel a été coupé de 25 pour cent à partir du premier avril et son revenu chuterait de 1 100 dollars à 850 dollars par mois.

Pour M. McNenly, comme beaucoup d’autres retraités, la coupure a fait mal. Certains pensionnaires gagnent dorénavant moins de 350 dollars par mois et parmi eux, on retrouve des employées ayant travaillé plus de 35 ans à la Giant Mine. Les autres personnes affectées sont les veuves des retraités ainsi que les employés licenciés de la mine.

Le 29 février dernier, une dizaine de retraités se sont réunis à l’hôtel de ville de Yellowknife pour annoncer leurs plans pour contrecarrer la coupure. C’est à cette réunion que Mary Kosta a annoncé qu’elle entamait une grève de la faim afin de manifester contre la manière dont les pensionnaires ont été traités. Cette grève a duré 22 jours. D’autres retraités, y compris Don McNenly, ont ensuite menacé de suivre l’exemple de Mme Kosta si leurs allocations mensuelles étaient réduites. Ils ont participé à des grèves de la faim rotatives d’une durée de 24 heures.

La deuxième partie de la campagne des retraités s’est amorcée au début du mois de mars. Mary Kosta affiche une pétition sur Internet et, en quelques jours, récolte plus de 300 signatures. Un regroupement de citoyens se réunit à Yellowknife et fait circuler une pétition exigeant des changements à la Loi sur les faillites et l’insolvabilité et à la Loi sur les normes de prestations de pension. Les demandes ne s’arrêtent pas là : une demande d’indemnité de départ pour les employés de la mine Giant est incluse dans la pétition.

Cette dernière était destinée à la Chambre des communes et devait être présenté par un député. Le regroupement s’est heurté à un obstacle. La représentante pour Western Arctic, Ethel Blondin-Andrew, a refusé de remettre la pétition puisqu’elle est membre du Cabinet. Elle a déclaré qu’elle ne pouvait pas critiquer le gouvernement qu’elle représente. Une décision devait être prise. La pétition serait-elle présentée au Parlement par un libéral ou un membre de l’opposition ? Finalement, les retraités ont choisi le critique du travail du NPD, Pat Martin, afin que leurs plaintes ne passent pas inaperçues. Il a indiqué aux membres de la Chambre que les employés de la Giant ont subi une injustice fondamentale. Lors d’une entrevue, il a même suggéré que les anciens dirigeants de la mine devraient être poursuivis en justice s’ils ont commis un crime. Les propos de M. Martin soulignent son indignation à propos du contenu d’une preuve de créance déposée par l’office du surintendant des institutions financières en juillet 1999 en Ontario. La preuve indique qu’une ordonnance a été envoyée à Royal Oak Mines le 31 mars 1999, demandant à la compagnie de rembourser 284 000 dollars plus 12.41 pour cent d’intérêt au fonds de pension. Ce montant a été utilisé pour acheter des parts dans la compagnie.

Royal Oak a déclaré faillite quelques jours après l’envoi de la preuve de créance. Le receveur de Royal Oak, Price Waterhouse Coopers, a indiqué que la preuve n’est pas sa responsabilité.

Plusieurs retraités n’étaient pas au courant de la preuve que l’Office a déposée en leur nom. « On a appris cette histoire seulement après avoir reçu l’avis nous indiquant que nos chèques seraient coupés », a indiqué le retraité Kurt Lehnigher. L’histoire de la preuve ne s’arrête pas là. D’autres fonds de pension appartenant aux travailleurs de la compagnie Royal Oak Mines sont également sous-financés, selon un document du Syndicat national des travailleurs et des travailleuses de l’automobile. Les montants s’élèveraient aux alentours de 2.2 millions de dollars et affecteraient particulièrement les employés des mines dans la communauté ontarienne de Timmins.

La députée Blondin-Andrew a indiqué que le problème du sous-financement du fonds de pension des retraités de la mine Giant est loin d’être unique au pays. Le problème prend de l’ampleur au niveau national. « Il existe six autres cas où des employeurs ont omis de financer les fonds de pension de leurs travailleurs », a-t-elle indiqué.

Pour Mary Kosta, la solution est simple : « Il faut que le gouvernement fédéral change les lois afin que de tels incidents ne se reproduisent plus ».

Madame Blondin-Andrew a indiqué qu’il serait préférable d’apporter des changements aux lois, comme l’exigent les retraités. Elle admet toutefois qu’apporter de telles modifications est un défi de taille. « La Loi sur les faillites est malheureusement faite pour les compagnies », a-t-elle souligné. Entre-temps, le vérificateur du fonds de pension des employés de la mine Giant, Morneau Sobeco, poursuit son enquête sur la manière dont l’argent a été dépensé. Les résultats devraient être disponibles vers la fin du mois. Le président du Syndicat national des travailleurs et des travailleuses de l’automobile, Buzz Hargrove, a annoncé lors de son passage à Yellowknife que les avocats du syndicat examinent la possibilité de déposer des plaintes contre les anciens dirigeants de Royal Oak Mines. Les retraités et les femmes des employés licenciés de la mine ont également laissé entendre qu’ils pourraient déposer une plainte auprès de la Gendarmerie royale du Canada.

Aux dernières nouvelles, les retraités ont demandé à la Trilon Corporation, le créditeur principal de Royal Oak, de niveler le fonds de pension. Le président-directeur général de la compagnie a indiqué que cette demande serait présentée aux actionnaires. Ce geste est le premier qui a pour but de faire intervenir une entreprise autre que le gouvernement dans le litige.