Tradition et modernisme se côtoient dans la région de Kugluktuk, au Nunavut. Du 8 au15 mars dernier, douze rangers de Kugluktuk ont enseigné des techniques de survie à 72 militaires de la réserve qui, de leur côté, ont partagé leurs connaissances balistiques et stratégiques avec les forces armées du Grand Nord. L’armée canadienne a fait du nord du 60e un terrain de prédilection pour entraîner à la dure les militaires de la réserve et de la force régulière, avec la collaboration des rangers canadiens. La Défense nationale a atteint ses objectifs : assurer la présence de l’armée dans le Grand Nord et entraîner des réservistes, pour qui cette expédition dans les grands froids étaient la première.
Le déploiement du camp s’est étendu sur plusieurs kilomètres, à une vingtaine de minutes de motoneige de la communauté de Kugluktuk. Lors du passage de l’Aquilon, les militaires exerçaient le tir sur une cible fictive, tirée par une motoneige. Le site, déployé au grand vent, n’offrait aucune protection face au froid extrême de cette journée typique de l’hiver septentrional. Le mercure a frôlé les – 60 degrés Celsius.
Le réserviste des sentinelles de la Garde, Yannick Caron, participait pour la première fois à un exercice du genre dans le Grand Nord canadien. « Quand on gravit des échelons dans l’armée, c’est une expérience de plus à notre actif », a indiqué le jeune homme de 20 ans, ajoutant que la préparation à cet exercice a été très longue.
La survie a probablement été le principal défi à surmonter. Même chaudement habillé, le froid traverse les vêtements qui, une fois humides, ne sèchent pas. Le sergent-major de l’exercice, Michel Larocque, l’un des seuls membres des forces régulières sur place, a supervisé les troupes de réservistes provenant majoritairement de l’Ontario. Il a raconté que soulager ses besoins devient toute une épreuve quand la peau, au contact avec le froid, peut geler en quelques secondes. La technologie a quand même allégé la rigueur de l’aventure. Des tentes et des cabanes en toile ont isolé les troupes du vent glacial. « Un militaire doit être prêt à opérer dans tous les genres de conditions extrêmes, comme la jungle, le désert et les régions de froid extrême comme l’Arctique canadien », a mentionné l’homme originaire d’Ottawa. Même avec le visage cagoulé, le militaire laisse transparaître sa joie de vivre cette expérience à travers les épaisseurs de l’hiver. « J’ai adoré côtoyer les Inuits et j’ai beaucoup appris d’eux. Les gens de Kugluktuk ont été très chaleureux avec nous », a-t-il ajouté.
Les rangers ont montré aux réservistes à faire de la pêche sur la glace, à construire des abris temporaires et à chasser. L’un des dirigeants de l’exercice a d’ailleurs indiqué que ces connaissances étaient fort utiles pour le soldat en situation de conflit armé. « Cette expérience leur servira toute leur vie, explique le porte-parole de l’armée, Brian Martin, que ce soit lors d’une activité de chasse en famille ou lors du déploiement d’une mission de paix ». Le sergent-major Larocque est du même avis. « J’ai appris plein de petits trucs, conseils qui m’ont rendu la vie plus facile dans ces conditions difficiles, raconte-t-il. Les rangers nous ont refilés plusieurs conseils et ont été des guides hors pair. Nous avons formé une équipe. On dormait ensemble, on mangeait ensemble. Ils ont été des mentors, des experts sur la vie et la survie dans les conditions de l’Arctique », affirme le sergent-major, qui ajoute le Grand Nord à ses expériences qui comprennent le désert Mojave des États-Unis et la jungle de l’Amérique du Sud.