À la suite d’une conversation avec Richard Goulet, du comité linguistique du Programme de contestation judiciaire, la présidente de l’APADY, Yvonne Careen, annonce que son organisme devrait recevoir 5000 $ pour procéder à une étude sur les possibilités de recours judiciaire dans le dossier de l’agrandissement de l’École Allain St-Cyr.
C’est l’avocat Roger Lepage qui verra à effectuer cette étude. « Mon mandat serait d’étudier le dossier pour savoir si l’École Allain St-Cyr, telle qu’elle existe présentement, répond à l’article 23 de la Charte canadienne des droits et libertés, en ce sens que la minorité francophone de Yellowknife a un accès à l’éducation en français aux niveaux primaire et secondaire, tel que garanti par la Charte », explique-t-il.
M. Lepage s’attend à ce que son avis juridique soit livré d’ici la fin du mois d’août. « Mon étude serait de regarder si le lieu physique répond aux exigences de l’Article 23 et de donner un avis juridique à l’Association à savoir s’il y a matière à poursuite contre le gouvernement des TNO pour bâtir une école adéquate », de poursuivre le juriste.
Une fois l’avis juridique de M. Lepage obtenu, l’APADY prendra une décision quant à une éventuelle poursuite contre le gouvernement territorial. « Tout va dépendre de l’étude de Me Lepage. Il va discuter avec l’APADY pour nous dire ce qu’il en est. Nous, on va consulter la Fédération Franco-TéNOise pour avoir son opinion. Finalement, c’est Roger Lepage qui déterminera si nous avons une cause ou non », de signaler celle qui croit que le fait d’obtenir 5000 $ du Programme de contestation judiciaire « veut dire qu’ il y a quelqu’un qui croit qu’on a peut-être quelque chose en main qui nous permettrait d’accéder à l’égalité ».
Dans son argumentation, Mme Careen cite le rapport intitulé Vision 20/20, préparé par Marquis Bureau pour le compte de la Commission scolaire francophone de division. En page 55 du document, on retrouve une citation de la commissaire fédérale aux langues officielles, Dyane Adam, qui mentionne que « l’action judiciaire demeurera nécessairement un des principaux piliers de réalisation des droits scolaires ».
Dans la même page du document, la présidente de l’APADY souligne aussi qu’on y établit que, selon une étude de Normand Frenette et Saeed Quazi, de l’Institut des études pédagogiques de l’Université de Toronto, « qu’en milieu minoritaire, c’est l’offre de services d’éducation en français qui crée la demande, et non l’inverse ». « Si le chiffre magique de 135 élèves est ce que le gouvernement attend, on va attendre beaucoup plus longtemps que 2006-2007 et l’APADY n’est pas prête à attendre si longtemps que ça », de poursuivre Mme Careen.
Le président de la CSFD, Jean-François Pitre, a déjà laissé entendre, au cours d’une réunion publique des commissaires, que si une poursuite devait être intentée, l’objectif de 2006-2007 devrait nécessairement être oublié, ce à quoi Mme Careen s’objecte. « Selon toutes les recherches effectuées et les contacts que j’ai établis, nous ne devrions pas nous rendre en poursuite. Ça devrait se régler bien avant ça. Alors si l’on peut faire avancer le projet et la structure avant d’atteindre le nombre magique de 135, qu’on le fasse », dit-elle.
Même son de cloche du côté de Roger Lepage. « Ce ne sont pas du tout des craintes justifiées. À mon avis, en droit constitutionnel, si le besoin est présent, il faut que le gouvernement le respecte et il faut qu’il fasse la construction (de l’école). Le fait qu’une procédure judiciaire ait été intentée n’est pas une raison pour que le gouvernement retarde la mise en œuvre de ses obligations constitutionnelles. Au contraire, ça devrait forcer le gouvernement à regarder à la loupe pour voir si, véritablement, il y a un besoin et que l’on accélère le processus de construction », argue-t-il.
Du côté de l’Association des parents francophones de Yellowknife, la présidente, Diane Marsh, dit s’inquiéter de la situation. « J’ai su que l’APADY demandait le 5000 $ lors d’une réunion de la commission scolaire. On pense que la CSFD prend les bonnes démarches pour avoir l’agrandissement et le gymnase le plus rapidement possible parce qu’elle sait que la communauté et l’école en ont besoin. On croit qu’une poursuite pourrait nuire à ces démarches. Nous avons une inquiétude à ce niveau », a-t-elle fait savoir. Cette dernière admet aussi que l’effet contraire peut se produire et que l’initiative aide à faire accélérer le dossier au gouvernement territorial.
Pour Roger Lepage, « il n’est pas nécessaire que la minorité francophone soit unanime pour faire valoir ses droits ». Celui-ci cite le cas Doucet-Boudreau, en Nouvelle-Écosse, alors que deux parents ont obtenu la construction de cinq écoles secondaires homogènes francophones, malgré l’opposition de la commission scolaire francophone de l’endroit. « Au point de vue juridique, pourvu qu’il y ait un parent ayant-droit qui ne soit pas satisfait de ce qui se passe en terme de gestion scolaire ou de lieu physique approprié, cette personne a le droit d’intenter des mesures judiciaires ».