Malgré les préoccupations soulevées par l’industrie de la construction et plusieurs députés de l’Assemblée législative, le Cabinet a décidé, le jeudi 19 août dernier, de procéder avec l’application de la nouvelle Politique d’aide aux entreprises. Cette Politique vise à favoriser l’octroi des contrats gouvernementaux aux entreprises du Nord. C’est le ministre des Ressources, de la Faune et du Développement économique, Jim Antoine, qui en a fait l’annonce le 15 août dernier. La nouvelle Politique devrait entrer en vigueur le 15 octobre.
En août 2002, le ministre avait présenté une révision de la Politique d’aide aux entreprises. Celle-ci incluait des seuils d’ajustement applicables aux entreprises du Nord qui soumissionneraient sur un projet. Ainsi, un contrat en biens profiterait d’un ajustement de 15% pour le contenu du Nord, à lequel on ajoute 5% pour le contenu local. Ces 20% s’appliquent aux premiers 25 000 dollars. Ce même 20% s’appliquera aux contrats en matière de service, mais jusqu’à un maximum de 100 000 dollars. Enfin, le montant maximum sur lequel l’ajustement s’appliquera pour les contrats en construction est de un million de dollars.
La nouvelle Politique ne s’appliquera dorénavant qu’aux ministères gouvernementaux et à quelques agences gouvernementales spécifiées. « La Politique ne s’appliquera plus aux autorités en matière de santé et de logements, aux commissions scolaires, ainsi qu’aux communautés et aux municipalités », a fait savoir le ministre Antoine lors de la conférence de presse du 15 août. La Politique qui entrera en vigueur cet automne contient aussi une nouvelle définition du contenu ténois, la définition d’une entreprise admissible (qui paie l’impôt sur le revenu des corporations aux Territoires du Nord-Ouest et qui se soumet à la Loi sur les cotisations sociales des TNO), des mesures administratives renforcies et un mécanisme formel de traitement des plaintes.
Pour la députée Sandy Lee, membre du Comité permanent sur la responsabilité et le contrôle des finances publiques, « le gouvernement n’a fait aucun changement. La nouvelle proposition est la même. Je me demande pourquoi le Cabinet n’a pas attendu un nouveau gouvernement et un nouveau mandat ». Celle-ci dénonce aussi le fait que le Cabinet ne semble pas savoir combien la nouvelle Politique coûtera au gouvernement, ou combien d’argent sera épargné. « Nous avons commencé à mettre des mécanismes en place pour surveiller les coûts du PAE. Il y a des estimations, mais elles demeurent générales », de mentionner le ministre Antoine, qui ajoute que « l’intention de la mise en œuvre de la Politique est d’y incorporer les préoccupations soulevées lors des consultations ».
La manière avec laquelle le Cabinet a fait l’annonce de cette décision laisse la député Lee perplexe. Selon elle, les membres du Comité permanent sur la responsabilité et la gestion des finances publiques « ont raisonnablement assumé que le ministre referait une révision du dossier et qu’il reviendrait avec quelques changements. Mais aussi, qu’il parlerait aux membres du Comité. Nous voici avec cette annonce à la mi-août, un vendredi matin, sans préavis du tout, et il sait que tout le monde est parti. Le Comité se rencontre la semaine prochaine. Il aurait été facile, pour le ministre, de se faire ajouter à l’agenda pour nous dire quels changements il ferait, ou bien pour nous dire qu’il irait de l’avant avec cette proposition ».
Du côté de l’Association de la construction des Territoires du Nord-Ouest, on voit cette annonce comme « une gifle au visage pour les députés et les comités permanents qui s’étaient fait dire que ça n’arriverait pas », selon Keith Houghton, directeur à l’Association et président du comité sur la PAE. Ce dernier rappelle que le ministre Antoine s’était levé en chambre, au cours de la session de mars, pour dire que le Cabinet n’irait pas de l’avant avec cette Politique.
Selon lui, « les changements qui ont été faits ne sont pas progressifs du tout. En fait, ils sont vraiment régressifs. Ces plafonds protégeront les gros contractants généraux et désavantageront les plus petits entrepreneurs et les sous-contractants ».
M. Houghton explique que le contractant général sera en mesure d’utiliser les ajustements dans ses propres travaux, ce qui lui permettra d’aller dans les marchés du Sud lorsque viendra le temps de distribuer les sous-contrats. « Ce sont les mêmes conditions qu’il y a 20 ans. À cette époque, le gouvernement avait décidé que c’était injuste et a changé de Politique. Maintenant, on revient à la même chose », dit-il. M. Houghton admet que très peu de choses peuvent être faites pour renverser la situation. « L’Assemblée siègera une autre fois d’ici les élections et nous essaierons de rassembler tous les intervenants et de faire pression sur les députés pour qu’ils amènent le Cabinet à expliquer pourquoi il tourne en rond. Ensuite, nous attendrons pour voir ce qui arrive à l’élection », mentionne-t-il.