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le Vendredi 15 juillet 2005 0:00 Politique

Le Deh Cho accepte l’offre du Canada

Le Deh Cho accepte l’offre du Canada
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Trente et un million et demi de dollars, c’est à ce compte que s’est réglé, cette semaine, le différend entre les Premières nations du Deh Cho et le gouvernement canadien.

À l’automne 2004, le Deh Cho a déposé deux poursuites judiciaires contre le Canada. La nation dont le territoire est situé au sud-ouest des TNO accusait les fédéraux de l’avoir exclue du processus de révision du Projet gazier du Mackenzie, dont 40 % du tracé scinde son territoire ancestral. Faute de revoir en entier le processus qui, selon eux, brimait leurs droits constitutionnels, le Deh Cho réclamait deux sièges sur la Commission d’examen conjoint et un droit de veto sur le projet.

Conformément à l’entente survenue lundi dernier, rien de tout ça ne leur est accordé. En ratifiant cette entente, le peuple de la grosse rivière (en déné « deh cho ») accepte de se conformer aux règles du processus de révision, c’est-à-dire qu’elle devra s’en remettre aux audiences publiques pour faire connaître sa position sur le mégaprojet gazier.

« Le Canada aura le dernier mot », a commenté le négociateur du ministère des Affaires indiennes et du Nord Canada, Tim Christian, lors d’une conférence téléphonique. Dans le dossier du pipeline, l’obligation du Canada envers les premières nations du Deh Cho se résume à considérer leurs intérêts dans la prise de décision.

« Advenant que le Deh Cho nous présente des motifs de préoccupation raisonnables, le ministère des Affaires indiennes considèrera l’option de les atténuer », a indiqué le négociateur fédéral.

En outre, le Deh Cho s’engage à ne plus intenter de recours judiciaire contre le Canada qui soit « susceptible de retarder ou d’interrompre indûment l’exécution du Projet gazier du Mackenzie ». Une trêve légale de cinq ans est prévue dans l’accord.

En contrepartie, les Autochtones obtiennent des sous. Le gouvernement canadien leur versera des indemnités qui totalisent 31,5 millions de dollars.

La part du lion de cette cagnotte servira au « développement économique » des Premières nations. Quinze millions iront tout droit dans la constitution d’un « fonds de capital économique ». L’entente ajoute que cette somme devra être considérée comme un premier versement, quand sera venu le moment de conclure une entente sur les revendications territoriales et l’autonomie gouvernementale du Deh Cho.

Dix millions et demi de dollars serviront à aider le Deh Cho dans ses négociations concernant le « Processus Deh Cho », les revendications territoriales de la nation. De part et d’autres, on estime qu’une entente à ce sujet pourrait survenir d’ici cinq ou six ans. Hormis les Déné tha, au nord de l’Alberta, le Deh Cho est la seule nation dont le territoire est situé sur le tracé du gazoduc à ne pas avoir conclu ses revendications territoriales

Le reste, six millions de dollars, permettra au Deh Cho de « participer aux mécanismes d’évaluation environnementale et d’examen réglementaire du Projet gazier du Mackenzie », l’objet même de la dispute. Chacune de ces sommes sera répartie sur trois ans et engage le gouvernement dès le présent exercice financier.

Épine

Ce dénouement à la satisfaction des deux parties retire une épine dans le pied du camp favorable au gazoduc.

« Cette poursuite créait des incertitudes quant à la réalisation du projet, déclare Tim Christian. C’est un obstacle de surmonté. »

Bien que, dans les deux camps, on assure que les pressions exercées par Imperial Oil et les autres promoteurs du Projet gazier du Mackenzie n’ont pas influencé ce dénouement relativement hâtif, la pétrolière mieux connue sous le nom d’Esso ne cache pas sa satisfaction. « Nous percevons cela comme un premier pas encourageant », affirme Hart Searle, un porte-parole d’Imperial.

Il ne faudrait cependant pas croire que le Canada et les autres promoteurs du projet sont au bout de leurs peines. Par voie de communiqué, le grand chef des Premières nation du Deh Cho, Herb Norweigian, a précisé les limites du présent règlement. « [L’entente] ne suppose pas que les Premières nations Deh Cho sont pour autant d’accord avec le projet. Des négociations très difficiles nous attendent avec les compagnies pétrolières qui veulent avoir accès à nos terres », a annoncé celui qui considère que l’accord est « juste et équitable ».

Ajoutons enfin qu’en mai, une autre nation susceptible d’être affectée par le projet gazier a intenté, à son tour, un recours judiciaire contre le Canada. Les Déné tha, dont le territoire ancestral chevaucherait en partie le territoire Deh cho, invoquent des motifs similaires à ceux qui animaient, jusqu’à cette semaine, leurs cousins du Nord.