Le député Yvon Godin dépose une plainte contre Patrimoine Canadien.
Cette année, le financement nécessaire à la programmation de base de l’Association franco-culturelle de Yellowknife (AFCY) a commencé à être déboursé au mois de juin. Alors que ce premier 25 pour cent des contributions de Patrimoine canadien était attendu au mois d’avril, ce sont trois mois où le directeur général de l’AFCY a eu à jongler avec ses ressources pour assurer le début des activités de cet organisme sans but lucratif.
« Ils mettent six mois à évaluer un projet qui va nous permettre de fonctionner. Normalement, dans le meilleur des mondes, on reçoit notre 25 pour cent au mois d’avril. À la fin mars, je n’ai pratiquement plus d’argent et l’Association roule grâce à des levées de fonds et à l’argent des ventes de sirop et de gilets. Cette année, je l’ai reçu le 12 juin! Je peux te dire que j’ai fait de la gymnastique pour survivre les mois d’avril, mai et juin », s’exclame Roland Charest.
Le directeur de l’Association, dont le mandat est de promouvoir des activités socio-culturelles en français dans la capitale ténoise, se dit pourtant heureux cette année de ne pas avoir eu a avancer de l’argent afin de garder son personnel comme il a dû le faire dans des années antérieures.
Pour le second vice-président du comité permanent des langues officielles (LANG) à la chambre des communes, c’était de trop. Yvon Godin a en effet déposé une plainte au commissaire aux langues officielles du Canada. La plainte a été accueillie la semaine dernière. Il dit avoir appris l’an dernier, lors d’une réunion de la Fédération culturelle canadienne-française, que plusieurs de ses organismes ont recours à leur marge de crédit pour payer leurs employés ou leur loyer.
« Ça ne date pas d’hier, c’est une réalité des minorités francophones, mais également de la minorité anglophone au Québec. Les organismes ont peur des représailles face à leur bailleur de fonds, c’est pourquoi j’ai décidé de placer la plainte personnellement. J’ai donc demandé au commissaire aux langues de faire son enquête pour que cette histoire soit réglée une fois pour toutes, car ce n’est pas juste depuis que les conservateurs sont au pouvoir que c’est comme ça, avant c’était pareil sous les libéraux. […] C’est un scandale, pour moi ce n’est pas une bonne ligne de conduite pour assurer la promotion du bilinguisme au pays », s’insurge le député néo-démocrate qui se réjouit que Graham Fraser se penche enfin sur ce problème. Selon lui le nombre de demandes proposées à Patrimoine canadien n’est pas un facteur, car chaque région possède son bureau. Il prétend de plus, que les délais des contributions concernent le financement pour la programmation de base, donc des programmes répétitifs qui sont nécessairement connus du ministère et dont le chèque pourrait être prêt à poster dès l’adoption des budgets. Finalement, Yvon Godin montre du doigt le ministère fédéral ajoutant que « la paperasse pourrait être un tant soit peu allégée, quoiqu’elle demeure importante pour bien questionner les organismes sur les nouveaux programmes mis en place. Cela reste essentiellement une question de meilleure coordination à Patrimoine canadien ».
Les formalités écrites semblent bien être un point crucial dans les relations organismes-Patrimoine canadien. Pour le directeur de la Fédération franco-ténoise (FFT), Léo-Paul Provencher, « il y a de l’abus quelque part ». Ce dernier avance que récemment Patrimoine canadien a exigé une nouvelle politique qui oblige la FFT à déposer des projections budgétaires possiblement chaque mois. Selon lui, son équipe de travail ne fera que remplir des rapports. « Je sais bien que l’on peut faire des projections régulièrement, mais quand ces budgets dépendent de financements qui tardent à êtres déboursés par le gouvernement, ça va devenir un casse-tête », tranche-t-il.
Pourtant, des améliorations sont à noter du côté de l’AFCY. Cette année Roland Charest n’aura que deux rapports biannuels à fournir à Patrimoine canadien. « Auparavant je devais soumettre quatre rapports, et à chaque révision de ces rapports, je recevais une contribution. Cette année au mois de juillet, j’ai reçu 65 pour cent de mon financement dans un second versement. Il va me rester un autre dix pour cent à aller chercher à la fin de l’année fiscale », de se réjouir Roland Charest.
Selon M. Godin, s’il est reconnu que le gouvernement viole la Loi sur les Langues Officielles, le commissaire va tout d’abord recommander que le gouvernement la suive. Si le gouvernement ne s’applique toujours pas, le commissaire aura la capacité selon son mandat d’amener le gouvernement devant la cour et de le forcer à respecter la Loi.
Ajout de dernière heure :
Des commentaires de Patrimoine canadien concernant le versement de leurs contributions dans la région des Prairies et du Nord ont été récoltés peu avant la clôture de notre maquette. Voici le détail de certaines réponses fournies :
Questionné s’il existait quelconque calendrier pour débourser les contributions aux organismes, le ministère répond : « Il n’existe pas de « calendrier de versements » régissant l’analyse des dossiers soumis à Patrimoine canadien et les versements qui pourraient en découler. Il n’y a que des dates limites pour soumettre un dossier dans le cadre d’un exercice financier annuel donné ». La gestionnaire aux services de communication ajoute « Patrimoine canadien étudie chaque demande avec rigueur de manière à s’assurer que les impôts des contribuables sont investis à bon escient. Tous les efforts sont mis en place pour traiter les demandes dans un délai rapide, mais la diligence dans la gestion des fonds publics exige temps et effort ».
Finalement, en ce qui a trait à la plainte du député Godin, Patrimoine canadien affirme qu’il a été informé par le Commissaire aux Langues officielles que ce dernier enquêtera sur ce sujet. Patrimoine canadien collaborera pleinement à cette enquête.