Le budget fédéral 2011 déposé mardi par le ministre des Finances ne rencontre pas les attentes des partis d’opposition. Aux Territoires du Nord-Ouest, libéraux et néo-démocrates sont déjà prêts pour des élections au début du mois de mai.
Une heure après que le gouvernement Harper a déposé, ce mardi 22 mars, son budget 2011-2012, le député néo-démocrate du Western Arctique affirmait déjà qu’il voterait contre cette proposition. « Ce budget conservateur ne fait que miroiter les demandes précises que nous avions faites à ce gouvernement minoritaire. Leurs engagements sont inadéquats », juge Dennis Bevington, qui rappelle que les demandes totalisaient un appui de deux à trois milliards de dollars et visaient principalement à bonifier de 800 millions de dollars le Supplément de revenu garanti (SRG) pour les aînés et à doubler le Régime de pensions du Canada. « Les conservateurs sont arrivés avec un programme qui donne 300 millions de dollars aux aînés dans l’ensemble du pays. Ils ont ajouté des choses qui s’élèvent peut-être à 800 millions au total », calcule-t-il.
« Dans les prochaines semaines, c’est une certitude que le Nouveau Parti démocrate n’accordera pas sa confiance au gouvernement », de déclarer le député Bevington, qui reprend le signal lancé par son chef de parti lors d’une conférence de presse suivant le budget, sur le pas de la Chambre des communes.
Sans l’appui d’un des trois partis de l’opposition (le Parti libéral et le Bloc Québécois ayant déjà dit qu’ils rejetaient ce budget), le gouvernement minoritaire conservateur a peu de chances de survivre à cette semaine parlementaire et des élections pourraient se dérouler dès l’un des deux premiers lundis du mois de mai.
Aux Territoires du Nord-Ouest, le candidat libéral se dit prêt à cette éventualité. « Mon équipe et moi, nous nous préparons à une élection, en fait, nous sommes prêts », déclare Joe Handley. Ce dernier affirme soutenir la position de son parti par rapport au budget, même s’il avouait mardi ne pas connaître les détails de cet énoncé économique. « Ce n’est pas un budget pour les gens », clame l’ex-premier ministre des Territoires.
Une route vers l’océan
Le ministre des Finances, Michael Miltenberger, a été le premier représentant du gouvernement territorial à commenter le budget fédéral. Lors de la conférence de presse, le ministre ténois a qualifié le document de son homologue fédéral comme étant un « budget statu quo », étant donné le déficit national. M. Miltenberger a souligné qu’un élément se démarquait pour les TNO au sein des différentes annonces de ce budget. « La route pour Tuk nous intéresse particulièrement », annonce-t-il.
Ce budget 2011 prévoit en effet le versement de 150 millions de dollars en cinq ans pour la construction d’une route quatre saisons qui relierait Inuvik à Tuktoyaktuk. Le ministre ne veut toutefois pas se réjouir tout de suite quant à la concrétisation du premier versement, prévu en 2012-2013, de ce gouvernement qui voit l’occasion de rejoindre les rives de l’océan Arctique par l’extension de la route Dempster. « Le budget est là et c’est ce sur quoi les députés vont voter. C’est très hypothétique en ce moment à savoir si le prochain gouvernement honorera cet investissement », dit-il, en mentionnant que cette contribution financière ne couvrira pas la totalité des coûts de ce projet estimé à 230 millions de dollars.
Cette position n’est pas partagée par le député actuel qui insiste pour faire valoir tout le travail qu’il a effectué dans le dossier de cette route arctique. « J’ai travaillé pour assurer cet appui pour la route entre Inuvik et Tuktoyaktuk durant toutes mes années au parlement. Je suis donc content de voir que ces dollars sont mis en évidence et je vais être heureux de voir ces fonds investis une fois les élections terminées. »
Pour le candidat de l’opposition officielle, le ton est différent. Il affirme n’avoir aucune confiance en le gouvernement actuel. « Je ne suis pas certain que [les conservateurs] mettront l’argent dans ce projet. Peut-être vont-ils le faire, pour bien paraître. Nous avons tellement été induits en erreur que je ne pense pas que beaucoup de résidents du Nord croient vraiment ce qu’ils avancent », argumente Joe Handley, visiblement en mode électoral.
Par voie de communiqué, le premier ministre ténois a tenu à officialiser cette promesse budgétaire en soutenant que cet engagement fédéral démontrait bien que « d’investir dans les besoins d’infrastructures nordiques pouvait encourager le rétablissement économique et la construction de la nation ». « La construction de cette route entre Inuvik et Tuktoyaktuk soutiendra la souveraineté, le développement de l’industrie gazière et pétrolière, et d’autres occasions économiques dans cette région, pour les TNO et le Canada », suggère Floyd Roland.
Un budget électoral
Mardi, lors de son allocution devant la Chambre des communes, le ministre Flaherty défendait d’ores et déjà son budget et ne laissait aucun doute sur son point de vue aux allures de slogan : « Des impôts bas pour stimuler la croissance et l’emploi ».
« Notre plan ne dit pas oui à toutes les demandes, il ne comporte pas de nouvelles dépenses astronomiques parce que ce n’est pas cela le leadership. Le leadership c’est de trouver un équilibre parmi les besoins. C’est de continuer à mettre l’accent sur notre priorité numéro un : assurer notre rétablissement économique en créant des emplois et du développement, maintenant et dans les années futures », annonçait-il.
Concernant le Nord, les différentes initiatives avancées par le gouvernement touchent plusieurs secteurs de la société. Pour l’industrie, le prolongement d’un an du crédit d’impôt temporaire de 15 % pour l’exploration serait accordé aux entreprises minières. Ces dernières continueraient ainsi à transférer des dépenses fiscales liées à l’exploration à des investisseurs qui pourront ensuite déduire ces dépenses dans leur revenu imposable.
En santé, les médecins de famille qui viendront pratiquer en régions éloignées verront une réduction sur le montant de leur prêt d’études pouvant atteindre 40 000 $ et le personnel infirmier choisissant ces régions verra ses prêts étudiants fédéraux réduits jusqu’à concurrence de 20 000 $.
En éducation, un montant de neuf millions de dollars sur deux ans servirait à élargir l’offre de programmes pour l’éducation des adultes dans les territoires.
Pour les communautés autochtones, ce sont 22 millions de dollars sur deux ans qui aideraient les collectivités à s’assurer que leurs réservoirs de carburant respectent les normes de sécurité environnementale. De plus, huit millions de dollars sur deux ans seraient alloués à la promotion des technologies d’énergie propre dans les collectivités autochtones.
Le Chef national de l’Assemblée des Premières Nations a tout de suite rétorqué que ces annonces ne satisfaisaient pas les attentes des Premières Nations. « Nous sommes plutôt soumis à des allocations arbitraires qui ne sont pas régies par un plan d’ensemble et qui ne répondent pas à nos besoins pressants et urgents. Dans ce budget axé sur la stabilité, nous ne discernons toujours pas d’approche stable et durable et nous allons continuer à promouvoir un plan pour le progrès placé sous l’impulsion des Premières Nations », a réagi Shawn Atleo, en insistant que l’écart entre les Premières Nations et le reste de la population canadienne se creusait.
Au moment de mettre sous presse, l’éventualité d’une élection semble inévitable alors que le gouvernement a avisé les partis de l’opposition qu’il ne comptait pas négocier d’amendement au budget. De plus, le Parti libéral a annoncé qu’il présenterait, ce vendredi, une motion de défiance contre le gouvernement pour reconnaître que ce dernier a porté outrage au Parlement.
Concernant les autres candidats ténois pour cette 41e élection canadienne, le Parti conservateur a rétorqué à L’Aquilon qu’il n’avait aucune déclaration à faire concernant l’identité de son candidat officiel alors que le Parti vert affiche sur son site Internet qu’Eli Purchase, né au Nunavut, demeure son candidat pour ces probables élections printanières.