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le Jeudi 18 août 2011 16:25 Francophonie

Éducation en français Une victoire francophone portée en appel

Éducation en français Une victoire francophone portée en appel
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Le gouvernement du Yukon interjette appel de la décision du juge Ouellette qui ordonne entre autres la construction d’une école secondaire francophone à Whitehorse.

Il n’a pas fallu attendre les trente jours après la déci­sion de la Cour suprême pour que le gouvernement du Yukon (GY) fasse valoir son droit de porter en appel l’ordonnance du juge Ouellette émise le 26 juillet 2011 dans le procès opposant la Commission scolaire fran­cophone du Yukon (CSFY) et la Procureure générale du Territoire du Yukon.

« Nous sommes en désaccord avec les conclusions du juge, tant sur les faits que sur les questions de droit », fait savoir Me Maxime Faille qui représente le gouvernement territorial. L’avocat explique que l’ap­préciation des faits et de la preuve de la part du juge n’est pas cohérente avec la preuve qui a été présentée. De plus, le gouvernement yukonnais remet en cause l’impartialité du juge Ouellette, et s’en remet donc à un panel de trois juges de la Cour d’appel pour vérifier ses dires résumés par Me Faille : « certains facteurs, selon nous, laissaient croire à l’existence d’une appréhension réelle de partialité de la part du juge ».

Au lendemain de la décision, André Bourcier, le président de la CSFY, se réjouissait que le poids de la balance ait pesé en faveur de la commission. « On est extrêmement heureux, c’est un grand jour pour les Franco-Yukonnais ainsi que pour tous les francophones au Canada. Le juge a reconnu les droits en éducation des francophones et nous a donné raison sur la plupart des points que l’on a fait valoir en Cour ».

Un parallèle sous la même latitude

Immanquablement, la commission scolaire fran­cophone des Territoires du Nord-Ouest (CSF TNO) a elle aussi réagi avec enthousiasme à l’annonce du jugement Ouellette, alors qu’elle attend en ce moment une décision sur sa propre cause juridique l’opposant au gouvernement ténois. « Cette décision favorable à la CSFY nous réjouit, car même si nos deux causes sont différentes, elles s’appuient sur la même jurisprudence. Et en se basant sur cette jurisprudence, le juge Ouellette a donné raison à la commission scolaire francophone du Yukon », de commenter la présidente de la CSF TNO, Suzette Montreuil.

Pourtant selon l’analyse du juge Ouellette, un point crucial que l’on retrouve dans les deux causes ne soulève aucune jurisprudence antérieure. « Il n’existe pas de jurisprudence portant directement sur le droit de gérer les admissions dans une école de la minorité sous l’art. 23 de la Charte », peut-on lire dans la décision du 26 juillet dernier.

Dans le jugement rédigé en français, le juge de la Cour suprême du Yukon ordonne que « reviennent à la CSFY le contrôle et la gestion en ce qui concerne l’ad­mission des ayants droit et non-ayants droit ». Le juge Ouellette estime cette décision conforme aux propos de la Cour suprême dans l’arrêt Arsenault-Cameron. Ce faisant il donne le droit de contrôle et de gestion en ce qui concerne les admissions, et qualifie par conséquent que tout règlement en vertu de la Loi sur l’éducation (du Yukon) limitant ce droit est inconstitutionnel.

Inconstitutionnel, c’est exactement le qualificatif que la CSF TNO espère voir attacher à la directive minis­térielle imposée par le gouvernement ténois en 2008. Cette dernière prescrit le ministre de l’Éducation ténois comme l’ultime juge pour décider de l’admission dans les écoles francophones d’enfants de parents n’ayant pas de droit en vertu de l’article 23 de la Chartre des droits et libertés. Sachant éperdument que la juge char­gée du procès ténois a répété à maintes reprises durant les audiences de l’automne 2010 que les deux causes étaient distinctes, Mme Montreuil ne s’accorde aucun commentaire quant à l’issue du jugement à venir. Elle laisse simplement tomber que « toute victoire franco­phone est bonne à prendre ».

Pas dans deux ans

Dans l’analyse de son jugement, le juge Ouellette explique que le GY est responsable de l’éducation de tous les enfants au Yukon, peu importe s’ils fréquentent l’école francophone ou anglophone, et conclu que le GY serait en mesure d’entreprendre la construction d’une école secondaire dont les coûts ne dépasseraient pas les 30 millions de dollars! Il ordonne ainsi que GY accorde le budget en capitalisation nécessaire pour l’agrandissement, sur le terrain existant de l’école Émilie Tremblay (EET), afin d’accueillir jusqu’à 150 élèves de la 7e à la 12e année et cela d’ici deux ans. Le juge de première instance indique que « la détermination des espaces requis doit se faire en fonction du nombre de personnes qui fréquenteront éventuellement l’EET (320 à 400 dont 90 à 150 au secondaire), et non le nombre actuel (184) ». Ce point irrite particulièrement le gouvernement yukonnais qui a tout le temps défendu l’agrandissement de ces installations scolaires « là où le nombre le justifie ». Selon Me Faille, l’ordonnance fait fi de ce critère qu’il estime essentiel à l’application de l’Article 23.

Pendant la période de construction, le juge impose au GY de fournir à l’ÉET deux classes portatives pour accueillir une classe au primaire et une autre au secondaire, ainsi qu’un accès équitable à un local à Whitehorse pour les arts industriels traditionnels.