Le gouvernement prévoit des surplus de 200M$ dans son premier budget d’après le transfert des responsabilités.
Le ministre des Finances, de l’Environnement et des Ressources naturelles, Michael Miltenberger, a rendu publique le 6 février sa proposition de budget des Territoires du Nord-Ouest pour 2014-2015, un budget qui, dit-il, témoigne d’un équilibre entre la discipline budgétaire et les priorités urgentes de la présente Assemblée législative.
Le gouvernement s’attend à avoir des dépenses de 1,65MM$ et des revenus de 1,85MM$, donc un surplus de 200M$. Ce surplus servira en partie à financer l’investissement de 230M$ dans les infrastructures publiques, dont 70M$ pour la route reliant Inuvik à Tuktoyaktuk et 59M$ pour des remplacements et des rénovations dans les établissements de santé.
Le budget global suggéré pour les dépenses liées au transfert des responsabilités est de 59M$. 27M$ de cette somme serviront à gérer le nouveau ministère de l’Administration des terres. Un autre 27M$ sera investi ans les initiatives prioritaires comme la lutte contre la pauvreté, l’aide au développement de l’enfance, la toxicomanie la Stratégie sur les possibilités économiques, la Stratégie de développement des minéraux et le Plan énergétique. Côté revenus, le budget 2014-2015 ne propose pas de nouveaux impôts.
On estime qu’à compter de 2014-2015, les recettes d’exploitation annuelles des ressources naturelles seront de 120M$. Il faut toutefois noter que 50 % de cette somme sera contrebalancée par la formule de financement des Territoires et que 25 % du montant restant — environ 15$M — sera distribué aux gouvernements autochtones. Il était prévu initialement qu’un autre 5 % ira au Fonds du patrimoine. Le gouvernement s’est cependant ravisé et ce sera 25 % qui sera affecté au Fonds du Patrimoine.
La dette projetée est de 624M$ en 2013-2014 et de 658M$ en 2014-2015, ce qui laissera une marge de 142M$ pour d’éventuels emprunts. Toutefois, le gouvernement territorial désire augmenter sa capacité d’emprunt jusqu’à 1,68MM$, principalement pour relier les systèmes hydroélectriques du lac Snare et de la rivière Talston avec le Sud, rénover l’Hôpital Santon et construire un tronçon de route entre et Wrigley et Norman Wells. « Si nous voulons grossir, a souligné le ministre des Finances Michael Miltenberger, nous devons aussi avoir la capacité d’emprunter afin de faire des investissements stratégiques. »
Fonds du Patrimoine
Dès le dépôt du budget, la députée de Frame Lake, Wendy Bisaro, s’était révoltée contre le maigre 5 % de redevances placé dans le Fonds du Patrimoine. « Tous les députés qui ne sont pas dans le Conseil exécutif, dit-elle, favorisent un chiffre de 25 %. » C’était aussi le cas de Daryl Dolynny, député de Range Lake. « Nous sommes très désappointés, souligne-t-il. Le gouvernement veut dépenser cet argent en infrastructures alors que nous voulons le garder pour le futur. Michael Miltenberger dit que son 5 % résulte d’une consultation. Mais il n’a été que dans six municipalités, et seulement 80 personnes se sont rendues à consultations. Quel pourcentage de la population cela représente-t-il? » Selon le député, le montant placé dans le Fonds du Patrimoine pourrait faire partie d’une négociation plus globale dans les prochaines semaines. Ces deux députés auront donc réussi à forcer le gouvernement à faire volte-face sur cette question.
La volonté du gouvernement territorial d’augmenter d’un milliard de dollars sa capacité d’emprunt fait également des remous. « Nos capacités d‘emprunt ont besoin d’être augmentées, concède Wendy Bisaro, mais à ce niveau? Ajouter à la rénovation de l’Hôpital Stanton, qui coûtera quelque chose comme 350M$, le raccord de Snare et Talston, c’est beaucoup, alors que nous n’avons pas de nouvelles sources de revenus. »
La députée de Frame Lake est favorable aux projets hydroélectriques du gouvernement, mais n’est pas convaincue qu’ils valent les investissements demandés, d’autant plus que le gouvernement n’a pas présenté de plan d’affaires pour prouver que ces investissements seraient rentables. « Et pouvons-nous, demande-t-elle, produire de l’électricité pour moins cher que, par exemple, la Saskatchewan? » L’autre problème qu’elle fait ressortir du budget est l’absence de véritables nouveaux revenus, hormis les ressources naturelles. « Nous avons besoin de trouver de nouveaux revenus, affirme Wendy Bisaro, nous dépendons tellement du fédéral. Ça aurait pu être des taxes, ça aurait pu être une augmentation des redevances sur les ressources naturelles. »
De faux surplus?
Daryl Dolynny avance une lecture radicale et très critique du budget proposé par Michael Miltenberger. « Le budget nous est bien présenté, dit-il, il donne l’illusion que nous sommes dans une bonne santé financière, mais en fait nous sommes proches du mur d’inquiétude. Le gouvernement parle d’un surplus de 200M$, mais nous avons déjà alloué 230M$ pour les infrastructures l’an dernier. Ce n’est pas un surplus, c’est une dette. » Le député de Range Lake fait également observer que si l’Assemblée législative accorde au gouvernement le droit de demander au fédéral d’augmenter sa capacité d’emprunt, celle-ci sera passée en deux ans de 500M$ à 1,8MM$. « J’appuierais cette demande si je croyais que ça peut fonctionner, explique-t-il, mais emprunter un milliard quand la population décroit et que l’exploitation minière stagne, c’est vraiment risqué. J’aime l’idée de relier les systèmes hydroélectriques et de vendre de l’électricité, mais peut-on se le permettre? Tu croîs quand tu peux te permettre de croître. »