À la suite de son passage dans l’Arctique, notre premier ministre Justin Trudeau nous laisse beaucoup de questions. Dans le monde de la diplomatie, il n’y a ni hasard ni coïncidence.
La veille de sa première rencontre avec M. Trump, nouveau président américain, notre premier ministre, en revenant d’Iqaluit, a fait escale à Yellowknife. Au mois de décembre, la veille du départ de la Maison-Blanche du président sortant, M. Obama, M. Trudeau entérinait avec lui un moratoire sur le développement dans l’Arctique.
Au milieu d’un nombre important de questions politiques d’intérêt national, M. Trudeau nous fait quand même quelques révélations. D’abord, nous dit-il à l’occasion de sa rencontre du matin avec le grand public, en réponse à Darrel Nasogaluak, maire de Tuktoyaktuk, l’enjeu écologique dans la région prédomine sur les questions économiques pour lesquelles, tente-t-il de nous rassurer, « en travaillant ensemble nous nous assurerons que d’autres portes s’ouvriront ».
Il fait part aussi, à la suite d’une question subsidiaire sur le développement du Nord, de l’importance des infrastructures de transport entre nos collectivités, sans être vraiment précis et sans bien sûr s’engager.
Par ailleurs, lors d’une conférence de presse un peu plus tard dans l’après-midi, il nous fait une révélation marquante, d’autant plus qu’elle n’était pas vraiment à sujet : l’approche de son gouvernement sur la souveraineté canadienne dans l’Arctique ne doit plus se faire sur des bases militaires, mais sur l’intégrité sociale et économique des populations locales.
Alors, posons-nous des questions, et surtout la plus évidente : quel avenir pouvons-nous anticiper dans une région si critique, et que l’on sentirait brusquement tant isolée, sinon tant abandonnée, et pourtant si sollicitée?
Car dans le monde du libéralisme mondial qui se fragmente entre une nouvelle Chine hégémoniste que l’on savait nombriliste, un inimaginable rapprochement des sœurs traditionnellement ennemies qu’étaient les États-Unis et la Russie, et l’impensable morcellement de l’Union européenne, le Conseil de l’Arctique, qui regroupe Canada, États-Unis, Russie et pays européens scandinaves, avec comme membres observateurs non plus seulement France, Allemagne, Italie, Japon, Corée du Sud, Pays-Bas, Pologne, Singapour, Espagne et Royaume-Uni, mais nouvellement, depuis 2013, Chine et Inde, devient soudainement le seul forum paisible et progressiste pour les questions écologiques, climatiques, humaines, scientifiques et du droit international – où les couteaux tirés entre tous ces intervenants se rangent pour que se tendent les mains entre sciences et consciences.
Qui plus est, l’Arctique est la seule région avec sa contrepartie, l’Antarctique, où les enjeux de l’explosion démographique globale n’ont pas mise.
Dans cette optique, notre région pourrait-elle alors voir son économie passer de l’exploitation des ressources naturelles à celle d’un tourisme de haute diplomatie internationale; son besoin d’équipement, de celui de transport industriel utilitaire à celui d’un urbanisme de villégiature de luxe?
Rappelons que la première salve de cette politique fiction fut en fait lancée avec le choix d’Iqaluit pour la réunion des ministres des Finances du G7 en février 2010. Appelons ça « guise de réponse ».