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le Jeudi 2 septembre 2021 16:21 | mis à jour le 20 mars 2025 10:41 Politique

Élections fédérales et organisations ténoises

Élections fédérales et organisations ténoises
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À l’aube des élections fédérales, Média ténois a demandé quels enjeux importaient à des organisations autochtones, économiques ou francophones. Compte-rendu.


Nation dénée

Avant de parler d’enjeux électoraux, le chef de la Nation dénée, Norman Yakeleya, prend le temps d’envoyer ses prières aux Ténois touchés par la récente éclosion de COVID et de mentionner que son équipe travaille sans relâche pour soutenir les collectivités. « Notre priorité numéro un, c’est la santé et la sécurité de notre peuple », dit-il. « La pandémie a exposé encore plus les inégalités », ajoute le chef. Il donne en exemple Colville Lake, où il y a près de 80 cas de COVID : « Il n’y a pas d’infirmières à temps plein, on y manque de logements et les enfants sont supposés retourner dans une école surpeuplée ! »

« Pour les élections, ce qui importe, c’est la réconciliation, enchaine-t-il. On espère que celles-ci marqueront un tournant décisif, que le Canada va implanter des politiques et des lois fortes qui vont respecter les droits des Autochtones sur leur propre territoire. » Il suggère d’ailleurs la création d’un « ministère de la Réconciliation » dont un groupe de travail « corrigera les erreurs du passé ».

La découverte de restes d’enfants enterrés sur des sites d’anciens pensionnats autochtones est une « terrible évidence d’anciennes politiques qui ont dévasté les Autochtones, poursuit-il. Le Canada doit reconnaitre ses torts envers les Premières Nations ». Il croit par ailleurs que la voie de la réconciliation passera par une relation de travail directe entre le fédéral et les gouvernements autochtones, sans le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest. « Les gouvernements autochtones doivent former un nouvel ordre de gouvernement. C’est l’objectif principal des Dénés : pouvoir déterminer notre propre futur, faire nos propres lois et gérer nos propres affaires. Les jours du gouvernement colonial du GTNO achèvent. »

Finalement, alors que sa propre organisation a reporté ses élections à cause de la pandémie, il se désole que le gouvernement libéral ne se soit pas retenu. La propagation du variant Delta dans le pays l’inquiète. « On avait besoin d’un gouvernement qui travaillait main dans la main avec tous. C’est la mauvaise action au mauvais moment. La maison est en feu, ce n’est pas le temps de tondre le gazon ! »

L’Association des femmes autochtones du Canada

« Toutes nos demandes tournent autour de la réconciliation, dit la directrice générale de l’Association des femmes autochtones du Canada, Lynne Groulx. On a besoin d’une vraie réconciliation avec des mesures concrètes, pas juste des promesses. » Elle identifie quelques catégories. D’abord, qu’Ottawa donne enfin suite aux « 231 appels à la justice » de l’Enquête nationale sur les femmes et les filles autochtones disparues et assassinées (ENFFADA). « On a besoin de femmes aux tables décisionnelles et de ressources pour la guérison, dit-elle. Il faut que cette violence chronique prenne fin. » Il faut aussi, enchaine-t-elle, s’attaquer aux problèmes de base de droits de la personne, comme l’accès à l’eau, à un logement ou à l’Internet, dans les communautés autochtones. Elle martèle, par ailleurs, l’importance que les femmes autochtones puissent participer à l’économie et aient accès à un partage équitable de la prospérité.

Selon la directrice générale, le fait que les yeux de la communauté internationale aient été braqués sur le Canada à la suite des découvertes de dépouilles près d’anciens pensionnats autochtones est une bonne chose. Et une honte pour le Canada. « Tout ça traine depuis très, très longtemps. Que le monde réalise qu’il y a eu un génocide, ça met de la pression. Cette découverte a aussi choqué les non-autochtones qui réalisent ce qui s’est passé dans les écoles résidentielles. On n’est pas le seul pays où il y a eu une colonisation, mais on est un leadeur dans les droits de la personne. On pourrait être le premier pays à résoudre des questions coloniales qui ne l’ont pas été, ni au Canada ni ailleurs. »

Et ce ne sont pas les recommandations qui manquent, rappelle-t-elle, en parlant des rapports de la Commission royale sur les peuples autochtones, de la Commission de vérité et réconciliation ou de l’ENFFADA. « J’ai de l’espoir, mais ça prend des actions concrètes », dit celle dont l’organisation talonnera le parti élu pour obtenir des résultats.


Chambre de commerce des TNO

L’économie sera l’enjeu principal de cette élection, croit la directrice générale de la Chambre de commerce des TNO, Renée Comeau. « C’était l’un des 5 principaux enjeux en 2019 et ça a empiré. Depuis la COVID, on est englué dans une économie zombie où la grande majorité des entreprises survivent à cause d’initiatives fédérales. En plus, il y a un manque criant de main-d’œuvre. »

Selon elle, les enjeux économiques de base pour cette élection sont les mêmes qu’en 2019. La pandémie, qui s’est pointée moins de 5 mois après les dernières élections fédérales, n’a pas permis de progresser sur ces questions, croit-elle. Elle énumère la lourdeur bureaucratique, le cout de la vie et les couts liés à l’exploitation d’une entreprise. « À travers tout le Canada, c’est aux TNO où les couts pour exploiter une entreprise sont les plus élevés. C’est un élément dissuasif immense ! Il y a aussi une règlementation excessive et des problèmes résidentiels à tous les niveaux. Il n’y a juste pas assez de bâtiments et de locaux disponibles. Ça fait en sorte que c’est très difficile pour les entreprises de démarrer, de croitre et donc d’attirer des employés aux TNO. »

La directrice générale est optimiste que le parti élu, peu importe lequel, fera tout pour relancer l’économie. La Chambre de commerce prépare d’ailleurs un débat entre les candidats qui portera sur des questions économiques. Celui-ci aura lieu virtuellement le 9 septembre, en soirée. Résidents et électeurs sont invités à envoyer leurs questions à la Chambre de commerce d’ici là.


CDÉTNO

La crise de la COVID-19 a particulièrement touché les communautés francophones en situation minoritaire, soutient le directeur général du Conseil de développement économique des Territoires du Nord-Ouest (CDÉTNO), François Afane. « Les entreprises francophones œuvrent le plus souvent dans le domaine du tourisme, qui a été presque entièrement décimé, et, aussi, dans le domaine des services comme la restauration et la vente », dit-il. Le CDÉTNO, organisme sans but lucratif, met tout en œuvre pour stimuler le développement économique et l’employabilité des francophones ténois, que ce soit par le recrutement, l’immigration ou l’entrepreneuriat.

Avec ces « besoins criants en matière de relance économique, dit-il, il est impératif que le gouvernement fédéral soutienne les efforts de reconstruction et œuvre au bienêtre des communautés francophones ». Il est d’avis que la modernisation de la Loi sur les langues officielles demeure un enjeu important, alors que le projet de loi est mort au feuilleton avec la prorogation du gouvernement. « Est-ce que la nouvelle Loi va fournir des appuis constitutionnels qui seront garantis aux francophones en matière d’économie ? », questionne-t-il. Quel que soit le parti élu, il se dit prêt à collaborer afin de tout mettre en œuvre pour relancer l’économie de la communauté francophone des TNO.

 

Fédération franco-ténoise

La Fédération franco-ténoise identifie trois enjeux majeurs à l’aube des élections fédérales : la modernisation de la Loi sur les langues officielles, un plan de relance pour la francophonie et le financement d’un centre communautaire, avance sa directrice générale, Linda Bussey.

La modernisation de la Loi sur les langues officielles est en effet loin d’être réglée : le projet de loi déposé en juin est mort au feuilleton avec la prorogation du Parlement, et les élections chamboulent la suite. « On mettait énormément d’espoir dans ce projet de loi. Même si ce que les libéraux avaient mis sur la table n’était pas parfait, il y avait des bons points. Et si les conservateurs sont élus, ils voudront probablement l’adapter à leur façon. Ça risque d’être très, très long avant que la modernisation soit faite, au moins une autre année, même si les libéraux sont réélus », se désole-t-elle.

Il faut également un plan de relance pour la francophonie, poursuit celle qui sortait d’une réunion avec la Fédération des communautés francophones et acadiennes du Canada au moment de l’entrevue avec Médias ténois. Tout comme la Fédération, elle est d’avis que la pandémie a fragilisé la francophonie et la dualité linguistique au pays. « Il faut plus de soutien à la main-d’œuvre francophone et aux postes bilingues aux TNO, plus d’investissement auprès d’entrepreneurs francophones et davantage de projets en petite-enfance pour que les jeunes s’initient au français dès que possible », dit-elle.

Finalement, elle affirme qu’elle attend depuis huit mois une réponse du gouvernement canadien pour un centre communautaire. « Bâtir un lieu de rassemblement plus solide, fort et reconnu, où nous afficherons notre propre identité, aidera à relancer la vitalité de notre communauté », dit-elle. « Je demande au gouvernement 8 370 000 $ et j’aimerais avoir un suivi là-dessus ! »