Les députés ont encore le temps de débattre avant d’adopter l’imposant budget territorial consacré aux projets d’infrastructures du territoire. À entendre les premières réactions à l’Assemblée législative, le vote ne sera pas unanime.
Pour une seconde année consécutive, en affichant des prévisions s’élevant à 502 millions $, le budget en immobilisation proposé par le GTNO pour l’année fiscale 2022-2023 est le plus élevé jamais présenté à l’Assemblée législative des Territoires du Nord-Ouest. Selon les premières réactions entendues en chambre, certains députés y voient de judicieux efforts vers la reprise économique des collectivités. D’autres déplorent des dépenses qu’ils jugent à la fois démesurées et mal priorisées.
Ce budget en immobilisations n’inclut que la portion des dépenses que le GTNO souhaite consacrer l’an prochain aux projets d’infrastructure du territoire, portion qui sera greffée cet hiver au prochain Budget territorial. Ce document sera soumis au vote des députés d’ici la fin de la présente session de l’Assemblée législative, en décembre. Du montant total de 502 millions $, 216 millions $ proviennent d’une contribution du gouvernement fédéral.
Environ 60 % de ce budget préliminaire, soit près de 300 millions $, est alloué au ministère de l’Infrastructure, montant qui sera consacré notamment au développement du réseau routier dans la vallée du Mackenzie, ou encore à l’expansion du réseau hydroélectrique Taltson. Au moment d’imprimer ces lignes, la ministre de l’Infrastructure, Diane Archie, devait comparaitre devant un comité de l’Assemblée législative, pour présenter les détails de ces grands chantiers.
Des réactions adverses
Déposé le 26 novembre en Chambre, le document a reçu un accueil mitigé de la part des députés. Certains déplorent des dépenses jugées exagérées pour les routes du territoire, dépenses qui, par ailleurs, occultent selon eux l’enjeu de pénurie de logements qui sévit à travers le territoire. Certaines députées se sont, pour leur part, réjouies de l’apparition prochaine de ces futurs chantiers, qu’elles jugent nécessaires à la reprise et au développement économiques des collectivités.
« Je suis en fait heureuse que d’importants investissements soient mis de l’avant en infrastructures, a affirmé la députée de Great Slave, Katrina Nokleby, après avoir entendu les arguments adverses de ses collègues. Une chose que fait le gouvernement lorsque l’économie va mal, c’est de construire des infrastructures. C’est une manière de garder les gens des TNO à l’emploi pour un bon moment, alors que la COVID-19 rend notre avenir incertain. Notre avenir économique, en particulier. »
« Je dois dire que je ne suis pas nécessairement d’accord avec les commentaires de mes collègues, a par la suite indiqué la députée de Thebacha, Frieda Martselos. De nouvelles infrastructures signifient de nouvelles activités pour les gouvernements autochtones et le secteur privé. C’est la voie à suivre. Je suis tout à fait d’accord avec les commentaires de la députée de Great Slave. »
Dépenses exagérées, mauvaises priorités
Deux députés ont déploré que trop d’argent soit consacré à la construction de nouvelles routes, et pas assez pour s’assurer de fournir des habitations adéquates aux résidents des collectivités. Un montant de 10,6 millions $ est alloué, dans ce budget préliminaire, à la Société d’habitation des TNO, qui administre les dépenses gouvernementales liées, notamment, à la construction et à la rénovation de logements.
« J’ai voté contre le dernier budget d’immobilisation, et j’ai la même intention pour celui-ci », a déclaré le député de Frame Lake, Kevin O’Reilly, en ouverture du débat. Ce dernier déplore une mauvaise allocation des fonds, en soulignant que l’accès au logement figure parmi la liste de priorités établies par la 19e Assemblée législative. « Cent-cinquante-millions $ dans ce budget sont consacrés aux routes, et ce budget n’affiche que des dépenses de 10,6 millions $ pour le logement, alors qu’il s’agit d’une priorité de cette Assemblée. C’est complètement déséquilibré », juge-t-il.
M. O’Reilly déplore par ailleurs que le GTNO dépense encore une fois au-dessus de ses moyens, et dit craindre que les Ténois ne croulent sous les dettes accumulées auprès du gouvernement fédéral. « Nous ne sommes plus seulement au bord d’un précipice fiscal, nous sommes en ce moment au-dessus du précipice, a-t-il illustré. Je crois que nous dépensons trop d’argent en infrastructure. Nous nous endettons plus rapidement que tous les gouvernements avec lesquels j’ai siégé dans cette Assemblée. »
Le député de Yellowknife Nord, Rylund Johnson a repris les points soulevés par son collègue. « Le logement est une priorité de cette Assemblée. Et seulement deux pour cent [de ce budget] servira à bâtir de nouvelles maisons. Je ne peux concilier ce fait avec les priorités politiques de cette Assemblée », a-t-il indiqué. Au printemps 2021, après le dépôt du Budget territorial 2021-2022, les deux députés avaient vertement critiqué l’ampleur des dépenses proposées par le ministère des Finances.
Dépenses judicieuses et nécessaires
La députée de Great Slave s’est, pour sa part, réjouie des investissements prévus pour le réseau routier, dont les chantiers apporteront, selon elle, de l’emploi, des contrats et des ressources dans les collectivités. Mme Nokleby a relevé l’absence de route permanente dans certaines régions, une réalité qui, selon elle, affecte en fin de compte le prix du logement. « En ayant des routes pour déplacer plus facilement les matériaux, il sera plus facile de bâtir des maisons à long terme », a-t-elle résumé.
Mme Nokleby a également dit craindre de voir disparaitre les routes de glace en raison des changements climatiques. « On ne veut pas être assis ici dans vingt ans, sans routes de glaces, en se disant que nous aurions dû construire des routes il y a vingt ans », a-t-elle indiqué. Katrina Nokleby a auparavant occupé le poste de ministre de l’Infrastructure au sein du GTNO.
Le député de Hay River Sud, Rocky Simpson, s’est porté à la défense du budget. « Je suis d’accord, vous savez, nous avons besoin de logements, mais ces logements ne sauraient être le seul projet du gouvernement, a-t-il indiqué. Ceci doit être pris en main par le secteur privé, par les gouvernements autochtones et par des dépenses en infrastructure qui permettent l’embauche de résidents du Nord. […] J’espère que [les ministres des TNO] vont parler à leurs homologues fédéraux, pour s’assurer que nous ayons l’argent pour payer tout cela. »