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le Vendredi 20 juillet 2001 0:00 | mis à jour le 20 mars 2025 10:35 Santé

Coeur de porc Forum sur la xénotransplantation

Coeur de porc Forum sur la xénotransplantation
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Santé Canada interroge le public : devrait-on lui donner le feu vert pour qu’il autorise des essais cliniques sur la xénotransplantation ? Un groupe témoin de 23 personnes a donné son opinion sur le transfert de cellules, de tissus et d’organes d’animaux lors du sixième et dernier forum pancanadien organisé par Santé Canada, qui s’est tenu les 5 et 6 juillet dernier à Yellowknife. L’ABC de cette pratique médicale encore non reconnue au Canada a été abordé par la délégation composée de membres de l’Association canadienne de santé publique et de spécialistes en médecine, éthique, question légale et protection des animaux.

La pénurie d’organes humains et les progrès de la médication anti-rejet suscite depuis une dizaine d’années un intérêt grandissant pour la xénotransplantation. Le phénomène n’est pourtant pas nouveau. Les valves cardiaques et l’insuline de porc sont utilisées en médecine depuis plusieurs années pour traiter des malades. Repousser les limites de cette pratique soulève toutefois des questionnements.

« Certains spécialistes craignent le transfert de virus de l’animal à l’humain », explique le Dr Thérèse Leroux, du Centre de recherche en droit public. « Ce phénomène s’est déjà vu, avec le transfert du virus du VIH du singe à l’humain. » Le porc, qui se présente comme un animal aux avantages substantiels pour la médecine par sa multiplication nombreuse, son élevage rapide et peu coûteux, est porteur du virus PERV, ou rétrovirus endogène du porc. « Endogène signifie que le virus est dans la cellule », indique Thérèse Leroux. « Détruire le virus revient à détruire la cellule porcine, ce qui rend l’opération impossible. » Comme le rappelle la chercheuse, certaines souches d’influenza à l’origine d’épidémies survenues au cours du siècle dernier proviennent du porc. Dépister les virus chez l’animal peut réduire les risques, encore faut-il que ces virus soient connus des chercheurs.

Cette inquiétude s’est également fait sentir auprès des gens qui ont assisté à la consultation publique. « Il y a trop de risques de maladies pour l’homme », raconte Liz Bailey-Hopf, bénévole à l’Association des femmes autochtones des T.N.-O. Celle qui a représenté, avec trois autres personnes, les nations autochtones, est catégorique : elle ne se prêterait pas à l’exercice. « Dieu a fait l’être humain comme il est. Je crois que nous sommes fait pour vivre sur la terre et mourir comme nous avons été créés. »

Un point de vue éthique qui motive également les groupes de défense des animaux. Afin de diminuer les risques de rejets des organes du porc, l’animal pourrait être élevé avec des gènes humains, ce qui en ferait un animal modifié génétiquement. Une pratique que le Conseil canadien de protection des animaux surveille de près. « L’environnement consacré à l’élevage doit être éloigné de tout contaminant, en évitant toutefois de placer l’animal en quarantaine. », explique Julie Griffin, directrice des lignes directrices de la xénotransplan-tation du Conseil canadien de protection des animaux. « Il ne faut pas que les manipulations causent des malaises ou de la souffrance aux animaux. »

Le Dr Leroux fait remarquer que la question a plusieurs angles. « Tout n’est pas tout noir ou tout blanc. Un transplanteur pourrait être enthousiasmé par cette innovation, tout comme un patient qui, face à ce choix, va peut-être décider de tenter sa chance. »

Avec la crise du sang contaminé et la maladie de la vache folle en Europe, le public est plutôt réfractaire à ce type d’expérimentation, comme l’indique Thérèse Leroux. « Il est encore prématuré de dire où l’on se situe. Il y a différentes prises de position. » Santé Canada poursuit sa récolte d’avis du public via son site Internet, à l’adresse www.xeno.cpha.ca.