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le Jeudi 19 novembre 2015 11:44 | mis à jour le 20 mars 2025 10:39 Santé

Dualité linguistique De nouveaux espoirs en santé publique

Dualité linguistique De nouveaux espoirs en santé publique
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Le gouvernement de Justin Trudeau propose un virage législatif sur des questions sensibles de santé et de sécurité en tenant compte de l’opinion, de droits et d’évidence. Cette approche informée et compréhensive n’est pas étrangère en milieu minoritaire.
Au lendemain des élections fédérales, les 16 membres de la Société santé en français (SSF) recevaient de l’Agence canadienne de santé publique du Canada une demande de rencontre pour discuter de collaborations possibles. Coïncidence?
C’est une bonne nouvelle pour un réseau qui concentre une part de ses activités sur la prévention des maladies chroniques, troubles mentaux, dépendances et de l’obésité. Et en particulier pour le Réseau de santé en français de la Saskatchewan, qui dirige depuis 2010 le seul projet financé par l’agence au sein du réseau.
« On est des champions de santé primaire, explique la présidente Anne Leis. On est engagés depuis 2010 dans le contrôle de l’obésité chez les jeunes. » Avec un budget de 1,6 million de dollars (2013-2017) de l’Agence, Départ Santé encourage l’activité physique et la saine alimentation dans les centres de petite enfance et les prématernelles. 
Le RSFS gère la composante francophone du projet, en collaboration avec des dizaines de partenaires, dont la province, des administrations de santé, des écoles et des universités. « On a développé un protocole de nutrition pour les jeunes, en lien avec les parents. On a mis en place une évaluation très rigoureuse de l’initiative. Grâce à notre projet, note la présidente, on a d’excellentes relations avec l’Agence. »
D’où vient ce nouvel intérêt pour les communautés francophones? « L’Agence a financé des projets dans le passé, précise Anne Leis, mais elle ne connaît pas bien le milieu minoritaire. Son absence de collaboration avec les communautés de langue officielle a été critiquée par le commissaire aux langues officielles dans son rapport de 2013-2014. »
Les membres de la SSF sont financés par Santé Canada pour améliorer l’accès aux services en français, la qualité des programmes et la sécurité des patients. Ils visent aussi la prévention des dépendances dans le cadre d’une stratégie en santé mentale.
L’organisme a présenté en 2012 ses orientations devant la Commission nationale sur la santé mentale, en collaboration avec ses membres en Saskatchewan et dans l’Est de l’Ontario. Intitulé Favoriser le rétablissement dans sa langue, le document vise l’habilitation des communautés et des ressources humaines.
« En santé mentale, soutient Anne Leis, on parle automatiquement d’abus et de dépendance de tabac, d’alcool et de drogues. On a des liens avec un organisme qui a développé une formation de premiers soins en santé mentale. On est les premiers à l’offrir. On apprend comment référer devant le risque de suicide. »
La SSF s’est attaquée depuis sa fondation aux barrières linguistiques aux premières lignes : la santé primaire. Le directeur général, Michel Tremblay prévoit que, selon les nouvelles priorités fédérales, certaines initiatives de la SSF seront davantage appuyées.

Un nouveau modèle de soins

La collaboration avec les provinces sera renforcée, croit-il, ce qui permettrait une amélioration des services en français. La SSF voit des portes s’ouvrir pour « un nouveau modèle de soins pour les communautés francophones.

« C’est une étude qu’on attend, explique le gestionnaire. Il est question de centres qui seraient orientés vers la santé publique. L’idée est de créer des milieux où on cherche des solutions en amont et non en aval. » Le modèle privilégie la participation communautaire et l’engagement des citoyens, par exemple dans la prévention de maladies et de dépendances.

La SSF ne s’est pas prononcée sur les enjeux de drogues illicites, de prostitution et d’aide médicale à mourir qui dominent le programme national. Mais il est possible qu’elle se présente à des audiences publiques ou devant des comités parlementaires, estime Michel Tremblay.

« Ça va dépendre de la volonté du réseau. On pourrait le faire si on voit quelque chose qui touche nos dossiers. Sur l’aide médicale à mourir, il y a une échéance en février pour changer la loi. Pour nous, obtenir un consentement éclairé, ça demande que les médecins et la personne qui demande l’aide se comprennent. C’est une question de sécurité. »

Depuis dix ans, le gouvernement conservateur à Ottawa a défendu une approche moraliste sur ces trois questions. Mais la nouvelle administration libérale entend rafraîchir les lois dans une perspective de santé et de sécurité publique.

Il s’agit d’évacuer du code criminel certaines pratiques stigmatisées et de les recadrer entre dans le respect des droits constitutionnels. C’est l’approche fondée sur la Charte canadienne des droits et libertés qui a guidé la Cour suprême du Canada lors de récentes décisions.