Annoncée la semaine dernière par le gouvernement fédéral puis par celui des TNO, l’arrivée du nouveau médicament contre la COVID-19 produit par les laboratoires Pfizer, le Paxlovid, marque une nouvelle étape dans la lutte contre la pandémie.
Lambert Baraut-Guinet
IJL — Réseau.presse – L’Aquilon
Efficace pour limiter le développement des formes graves de la maladie, ce nouveau traitement est en passe d’être distribué à travers les territoires et les provinces pour limiter l’afflux de patients dans les services de réanimation. Quelque 30 000 doses auraient d’ores et déjà été reçues par le gouvernement fédéral, si l’on en croit le communiqué de presse publié le lundi 17 novembre. Quelque 120 000 doses devraient suivre d’ici la fin mars, sur le million de traitements commandé au total par le gouvernement. Si la stratégie de proposer un traitement médical à la maison, comme c’est le cas du traitement de Pfizer, s’avère une excellente nouvelle, le faible nombre de doses acheminées dans les territoires à faible population laisse entrevoir certaines limites.
Une stratégie gouvernementale floue
Dans une notice sur la stratégie à adopter quant à la prescription de ce traitement, le gouvernement propose trois principales recommandations : proposer le médicament en premier lieu aux personnes âgées ou immunodéprimées susceptibles de contracter des formes graves ou de ne pas répondre correctement aux autres traitements potentiels ; approvisionner rapidement les collectivités isolées ne disposant pas des infrastructures ou personnels nécessaires à la prise en charge de formes graves ; et renforcer la politique de test pour réussir à administrer le traitement dans la période de cinq jours où il demeure efficace.
Ces trois recommandations laissent entrevoir la limite d’un traitement médicamenteux certes efficace et facile à prendre, mais relativement complexe à prescrire, cher et offert en quantité restreinte. Comme le souligne la Dre Emily McDonald, de l’Université McGill et co-autrice de l’étude ayant menée à la validation du Paxlovid en tant que traitement contre les formes graves de la COVID-19.
« Il faudrait que le médicament soit déjà sur place, dit-elle. Le gouvernement fédéral devrait expédier des doses aux différentes collectivités éloignées, et à l’avance, mais comme il s’agit d’une pilule, c’est plus pratique que d’autres traitements qui doivent être conservés dans la glace ou qui sont par exemple sensibles à la température. Mais il faut aussi avoir accès aux tests. Cela n’a pas de sens d’avoir accès au médicament dans une région où l’on n’a pas accès aux tests. »
Opérant uniquement lorsqu’administré dans les jours qui suivent le diagnostic de la COVID-19, soit par un test positif, soit lors de l’apparition de symptômes, le nouveau traitement devra donc être prêt à l’emploi là où les tests pourront être réalisés en quantité suffisante.
À l’heure actuelle, nos questions adressées à l’administration de la santé des TNO à propos de la stratégie précise de distribution et d’administration sont restées sans réponse. Dans un échange la semaine dernière, le gestionnaire des communications de l’administration de la santé, David Maguire, a expliqué la distribution du traitement. Celui-ci serait envoyé à des plateformes régionales à partir desquelles il pourra être distribué au besoin dans les collectivités.
Un défi logistique alors que, comme nous l’explique la Dre McDonald, ce sont dans ces localités, ne disposant souvent pas d’infrastructures hospitalières suffisantes, que le médicament pourrait faire une réelle différence.
« Les collectivités comme celles des TNO devraient avoir un accès prioritaire aux médicaments, même s’ils sont compliqués à prescrire en raison des interactions médicamenteuses. [Ces interactions] peuvent être résolues en téléphonant à un pharmacien ou à un spécialiste. C’est assez facile à gérer. Et comme il s’agit d’un comprimé, il est facile à administrer dans des endroits reculés, contrairement à certains autres traitements qui sont administrés par voie intraveineuse et nécessitent un centre spécialisé. L’accès au Paxlovid pourrait être très bénéfique pour les régions isolées. »
Un traitement destiné aux personnes à risque, principalement non vaccinées
La métaanalyse publiée par l’Université McGill a comparé les effets de neuf traitements sur des bénéficiaires à risque de développer des formes graves de la COVID-19. La vaccination réduisant drastiquement le risque d’aggravation de la maladie en cas d’infection, ces études ont été majoritairement réalisées sur des patients non vaccinés, une faible minorité étant composée de personnes ne développant pas assez d’immunité contre le virus malgré la vaccination.
Les effets du traitement de Pfizer sur une population vaccinée sont difficiles à anticiper, comme l’explique la Dre McDonald : « Nous ne savons pas s’il [le nouveau traitement] sera efficace pour les personnes vaccinées à risque. Il aura un certain effet, car nous savons comment il fonctionne, mais nous ne savons pas s’il sera aussi efficace. »
D’autres médicaments à considérer
Le faible nombre de doses de Paxlovid disponibles combinées aux contraintes de sa prescription et de sa distribution amène notamment la Dre McDonald à souligner que d’autres traitements médicamenteux se montrent intéressants.
La Fluvoxamine par exemple est un antidépresseur déjà présent en quantité dans les pharmacies à travers le Canada. Bien que moins efficace que la pilule de Pfizer pour prévenir le développement de forme grave de la COVID-19, elle permettrait tout de même de réduire de 25 % le risque d’hospitalisation (contre 85 % pour le Paxlovid). Comme nous l’explique la Dre McDonald, il faut utiliser tous les moyens médicamenteux disponibles pour traiter les bénéficiaires à risque.