Ses mains enfilent habilement la fine lanière de cuir entre les trous afin d’assembler ce qui deviendra une sacoche de cuir. Irvin a une passion pour la peau. Qu’elle soit souple, rigide, rugueuse ou délicate, il possède tous les outils nécessaires pour la travailler et lui donner une seconde vie. Arrivé au Canada à l’age de quatre ans, Irvin est originaire de la Pologne. Il a grandi au Manitoba. Ses parents ne parlaient pas l’anglais, mais lui interdisaient de parler polonais ou allemand, les langues de son pays natal. » Mes parents voulaient que nous apprenions la langue du pays. Et aujourd’hui, je ne parle qu’une seule langue alors que ma mère en parle sept ! « , avoue Irvin, avec un soupçon de regret dans la voix. Il a pris des cours de français pendant des années, mais de son propre aveu, n’a pas de don pour les langues. Il s’est cependant servi de ses connaissances en français en une occasion. Il travaillait avec des gens dans une petite communauté, et la plupart conversaient dans leur langue natale. Sentant que son ami et lui étaient le sujet de discussion, ils se mirent à baragouiner en français. Le groupe les regarda, intrigué. Une douce vengeance [pas méchante] !
C’est lorsqu’il était étudiant qu’il entra en » contact » avec le cuir. » Un ami était venu habiter avec moi pendant un mois et demi. À son départ, il m’a laissé quelques outils et des morceaux de cuir « , raconte Irvin. » La suite, ça fait partie de l’histoire « , lance-t-il en riant. Il faisait la tournée des pubs, se promenant de table en table avec ses ceintures et ses bracelets. » Habituellement, tout était vendu à la fin de la soirée. Je savais que je ne souffrirais pas de la faim grâce au cuir. »
» Les premiers explorateurs fabriquaient des canots avec des peaux. Si ça n’avait pas été de la fourrure et du cuir, les humains ne seraient pas de ce monde « , soutient Irvin.
Le créateur utilise cette peau si précieuse et la transforme en ceinture, en vêtements, en portefeuille, en bijouxŠ » J’aime la versatilité du cuivre. Chaque pièce est unique ! Si tu peux imaginer quelque chose, ça peut se faire en cuir « , lance-t-il. Par contre, le dessin est la partie la plus difficile. Il faut parfois recommencer plusieurs fois. » La plupart de mes créations semblent ordinaires à l’achat, mais avec l’usure, le cuir brille et s’assouplit. »
Quant il ne s’enferme pas dans son minuscule local chargé d’outils et de peaux, Irvin travaille comme fonctionnaire. Il avoue cependant ne pas être un bon employé. » Je n’aime pas avoir de restrictions. La vie est trop courte « , déclare-t-il. Avant de travailler au sein du gouvernement, il a été enseignant dans plusieurs réserves et communautés autochtones, une expérience qu’il a fortement appréciée. » Je crois que je ferais un bon ermite ! J’aime ma compagnie et celle de ma femme ! », ajoute-t-il, en riant.