« Ce n’est pas sécuritaire pour une Autochtone de parler. » – Nola Nallugiak
Les pensionnats amérindiens, la colonisation, la peur et les préjugés : tels sont les sujets qui ont été traités le 5 décembre à l’école K’alemi de N’dilo, lors du premier de trois séminaires de la série Vérités qui dérangent et nouvelles relations. Cette série est la prémisse de la venue l’événement Walking with our sisters en janvier prochain.
La rencontre de vendredi avait pour but de discuter des façons de rendre la collectivité plus sécuritaire. On voulait également assurer une meilleure compréhension des racines de la violence aux Territoires du Nord-Ouest, notamment pour les nouveaux venus.
Une des participantes du panel, Lila Erasmus, a violemment critiqué l’image des femmes autochtones véhiculée par les médias lorsqu’il est question, comme récemment, de disparitions et d’assassinats. « La plupart d’entre nous ne sont pas dans la rue et ne consomment pas d’alcool ou de drogue, scande-t-elle. Nous avons des femmes instruites avec des doctorats. D’ailleurs, Loretta Saunders, une Inuk qui a été assassinée, avait un doctorat. Ce n’était pas une femme à risque. »
Lila Erasmus a avancé l’hypothèse que la femme de 26 ans aurait pu être assassinée pour avoir dénoncé les injustices contre les femmes autochtones. Cette idée que la dénonciation de la situation est dangereuse devait plus tard être corroborée par la directrice de l’Association des femmes autochtones des Territoires du Nord-Ouest, Nola Nallugiak : « Ce n’est pas sécuritaire pour une Autochtone de parler. Une femme qui écrivait sur les femmes disparues a été tuée. »
D’après Lila Erasmus, si un tel drame arrivait à un autre groupe de la société, comme des avocats ou des agents de la GRC, il y aurait un tollé. « Là, il n’y en a pas. Le message qu’on nous envoie, c’est : nous ne sommes pas importantes. Il faut que ça change. »
Colonisation et acculturation
La destruction de la culture dénée et les processus violents d’assimilation ont été dénoncés par des membres de l’assemblée.
« L’Église a brisé notre culture, a décrié Lisa, mais on ne parle jamais de ça. Elle nous a dit que l’Esprit n’était pas en toute chose, qu’il ne fallait par toucher aux tambours. »
Muriel a longuement raconté les privations, la tristesse et les punitions reçues durant ses neuf années dans un pensionnat. Elle a parlé des enfants qui y sont morts, de leurs parents qui ne les ont jamais revus. « Je ne veux plus voir de femmes gelées, de femmes assassinées, s’est-elle exclamée. Je veux que mes petits-enfants vivent une vie sécuritaire. Le Nord a besoin d’aller chercher des professionnels dans le domaine de la santé. »
À quelques reprises, les intervenants ont effleuré la notion de l’impact des statistiques. « Elles font que les gens se sentent mal plutôt que forts », a déploré Pertice Moffitt, attachée à l’Institut de recherche Aurora.
Enfin, en son nom personnel, un agent de la GRC a déclaré que les gens de son corps de métiers n’étaient pas étrangers au sort des femmes autochtones. Il a évoqué avec tristesse une femme du Nord du Manitoba pour laquelle il avait de l’admiration et qui a été assassinée à Vancouver.
Le second séminaire aura lieu le 3 janvier à Prince-de-Galles. Walking with our Sisters est une installation itinérante commémorative de 1 808 dessus de paires de mocassins destinée à rappeler le sort des femmes autochtones disparues et assassinées. L’installation sera à Yellowknife du 9 au 24 janvier.