Martin Murray traverse le Grand lac des Esclaves, soit une aventure de 243… 242 km.
Il lui a fallu onze jours pour faire sa traversée solo sans assistance. Martin Murray vient de réaliser une randonnée en ski de fond sur la glace du deuxième plus grand lac des Territoires du Nord-Ouest (d’une superficie de 27 200 km2), en trainant deux luges utilitaires en plastique. Parti de Hay River, il s’est dirigé vers Fort Résolution (106 km), a campé aux abords de Egg Island et a fait cap sur Yellowknife (137 km). 136 km finalement, car le 10 mars, lors de sa dernière journée, l’aventurier franco-ontarien ayant accompli une étape de 36 km pour arriver à Yellowknife à 20 h 45, a accepté de monter dans l’auto de son comité d’accueil à 1 km du bout de la route de glace entre Dettah et la capitale ténoise.
Attablé dans le confort d’une maison, Martin Murray parle de l’humidité comme d’une maladie contagieuse alors qu’il raconte son aventure avec le sourire. L’humidité, quelque chose qui s’attrape et rend la vie plus difficile. « Tu veux contrôler la sueur. Tu ne veux pas contaminer tes mitaines, tes chaussettes, tes bottes, ton sac de couchage », explique-t-il en décrivant que lorsqu’il reprenait son effort après une pause, il avait froid, parce que la température de son corps avait baissé. En quête d’un équilibre thermique, il repartait avec des mitaines plus épaisses, qui lui réchauffaient les doigts jusqu’à temps qu’il ressente un sentiment de transpiration, c’était alors le temps d’enlever ces mitaines et de mettre des gants plus minces. « Après cet ajustement, j’étais parti. Et c’est la même chose avec mon manteau, ma veste coupe-vent et ma veste polaire. » Pour les pieds, c’était d’abord une chaussette de polypropylène, puis un sac de plastique pour confiner la sueur plus un bas d’isolation plus épais, et finalement le feutre et la botte. « Après les trois premiers jours, j’ai eu des ampoules sur le haut des orteils dû au feutre. Et un après-midi j’ai ôté les bas de polypropylène, mis un bas plus fin et le problème a été réglé. Je suis content, car je n’ai pas eu d’ampoule sur les talons, c’est ce qui est le pire. »
Tel un explorateur, Murray répète qu’il faut savoir reconnaitre le problème, car tout événement a un effet domino : « si tu ne l’identifies pas, ça va empirer, mais si tu es capable de savoir pourquoi ça n’a pas bien été ou pourquoi ça va mal, tu peux faire une correction de la situation. » Il confesse qu’il n’a pas vraiment vécu de situation d’urgence, même s’il a mis le feu dans sa tente un matin. Il ne s’est pas senti seul, il n’a pas eu peur, mais a eu deux moments d’anxiété qui ont été déclenchés par la difficulté qu’il avait parfois à s’orienter. « C’est la déception de ne pas aller dans la bonne direction, contre le froid et le vent, et l’accumulation de petits détails qui n’allaient pas bien. »
Cette expédition, il la préparait depuis un an, simplement pour savoir où il se situait dans ce sport. Le trek : la randonnée en ski de fond avec du camping. « Un sport que je pratique depuis 2003. C’était pour savoir où est-ce que j’en étais par rapport à mon niveau sportif. Depuis 2008 que je n’avais pas fait de grosse expédition, à part une centaine de kilomètres par année sur le lac Abitibi. » Une expédition qu’il ne voulait pas faire tout seul, mais qui finalement s’est soldée par un accomplissement solitaire. « Ça aurait été le fun d’avoir un compagnon de randonnée, pour l’expérience sociale, la complicité, et la camaraderie. J’avais invité des amis, mais si tu attends pour les autres, tu ne peux pas toujours faire ce que tu veux. Et puis l’aventure solo a l’avantage que tu peux avancer à ton rythme. Ce qui était bien pour moi, car je ne me suis pas vraiment entrainé avant l’expédition. La réalité est que je me reposais quand je finissais de travailler. »
Attiré par les grands espaces, le blanc du sol et le bleu du ciel, Martin Murray reste toujours avec des rêves polaires. Que ce soit le pôle Sud ou le pôle Nord, il reste plusieurs défis qu’il voudrait entreprendre.