La pandémie a ralenti les travaux de construction de la mosquée et affecté la campagne de collecte de fonds.
La communauté musulmane de Yellowknife se tourne maintenant vers le sociofinancement.
Le Centre islamique de Yellowknife a lancé, le 21 avril dernier, sa première collecte de fonds en ligne pour financer en partie la construction d’une mosquée dans la capitale. La pandémie l’a forcée à se tourner vers cette source alternative de financement et a retardé le projet.
Le précédent lieu de culte des musulmans de Yellowknife a été établi il y a quelque 25 ans dans une maison mobile. Elle datait de 1967, construite sur des fondations en bois et sur un terrain inégal. « Elle était dans un piteux état », dit le président du Centre islamique ISNA de Yellowknife, Nazim Awan. Craques dans les murs, dans le plancher et dans le toit, par lequel s’infiltrait l’eau lors de la fonte printanière et des jours de pluie.
Les réparations ne suffisaient plus. La nécessité de construire à neuf, et plus grand, s’est imposée. Un terrain adjacent a été acheté. La maison mobile a été démolie durant l’été 2019. Le terrain a été préparé et nivelé et la fondation terminée en novembre 2019. Des activités de financement étaient prévues. La nouvelle mosquée devait être construite afin d’ouvrir en 2021. Mais la pandémie a tout chamboulé.
« On a été incapable d’aller chercher le financement comme prévu, dit Nazim Awan, car la plupart des activités en personne n’étaient plus possibles. »
Le Centre islamique de Yellowknife fait partie de l’Islamic Society of North America – Canada (ISNA). L’équipe du siège social, situé à Mississauga, devait, entre autres, recueillir des fonds grâce à des évènements et des déplacements organisés dans d’autres centres islamiques à travers le Canada, que ce soit à Vancouver, Montréal, Toronto, Calgary ou Edmonton, explique-t-il.
Autre écueil : l’équipe de construction, fournie par un partenaire, compte plusieurs non-résidents des TNO. Avec les restrictions imposées sur les voyages, tout s’est compliqué, dit-il.
Tant le financement que les travaux accusent ainsi du retard.
Selon Nazim Awan et des personnes témoignant dans une vidéo mise en ligne avec la campagne de financement, la communauté souffre beaucoup de l’absence de ce lieu de partage depuis la démolition de la maison mobile.
En attendant la construction de ce nouveau toit, les musulmans de Yellowknife se retrouvent dans un espace commercial loué, près du bar Monkey Tree, dans le quartier Range Lake. « On n’y fait que les prières, rien d’autre, c’est très limité », affirme Nazim Awan.
Tout ce qui gravite autour d’un lieu de culte manque : activités éducatives, cercles d’études, rencontres entre familles ou entre jeunes. « Une mosquée, c’est plus qu’un endroit de prières ; c’est un lieu où l’on apprend, où l’on enseigne, où l’on partage, où l’on s’entraide et se soutient, dit-il. On y est tous comme des frères et sœurs et c’est important aussi pour les jeunes. »
Le Centre islamique espère désormais ouvrir la mosquée à « l’automne 2022 ou à l’été 2023 », dit son président. Une mosquée qui, selon leurs prévisions, coutera autour de 2,2 millions $.
La communauté musulmane a débuté avec quelques familles en 1992 et compte aujourd’hui près de 600 personnes, estime le Centre islamique de Yellowknife. Ils souhaitent construire une mosquée dont la salle principale des prières sera en mesure d’accueillir 350 personnes. Que les fidèles soient sunnites ou chiites, tous les courants de l’islam ont toujours été bienvenus dans leur lieu culte.
« Ça fait quelques années qu’on a en tête de construire une mosquée, qu’on planifie et fait des designs, mais ça n’avait pas encore marché, affirme Nazim Awan. Cette fois-ci, on progresse, mais l’année 2020 a été complètement perdue. »
Avec la campagne de financement en ligne, le Centre islamique de Yellowknife espère amasser 100 000 $. Pour chaque tranche de 2 $ recueillie, l’organisme Islamic Relief Canada va verser 1 $, ce qui pourrait porter le montant total à 150 000 $, s’ils atteignent leur objectif.
En date du 4 mai, une soixantaine de personnes avaient donné quelque 12 000 $. La campagne est en ligne jusqu’au 30 mai.
L’organisme Islamic Relief Canada, qui fournit surtout de l’aide d’urgence aux communautés frappées par des catastrophes, a choisi d’épauler, il y a quelques semaines, la construction de la mosquée à Yellowknife. « Ils nous ont contactés en avril », rapporte le directeur régional pour l’ouest du Canada de l’organisme, Omar Taliani. « Ça allait de soi pour nous de participer au financement, dit-il. Une mosquée, c’est le centre d’une communauté, son tissu social. On reçoit nous-mêmes du soutien grâce aux mosquées, ici, au Canada, et en investissant dans des endroits qui investissent en nous aussi, on redonne à la communauté. »
La fondation Zubaidah Tallab, organisation islamique de charité basée au Manitoba et derrière la construction des mosquées d’Inuvik et d’Iqaluit, a aussi participé. Elle « a fourni l’équipe et aidé à la construction, mais leur financement est minimal », rapporte Nazim Awan.
« Des donateurs se sont également engagés à financer du matériel de construction pour la mosquée », poursuit Nazim Awan. Certains sont de Yellowknife et d’autres de l’extérieur. Il n’a pas donné de détails à leur sujet, disant que ceux-ci ne désiraient aucune reconnaissance.
« La construction d’un centre islamique est très sentimentale, rappelle celui qui est originaire du Pakistan. Tout le monde en veut une partie. Le Prophète dit que si on bâtit une maison pour Allah ici, alors un endroit similaire nous attendra au paradis. Les gens sont motivés à participer à la construction d’une mosquée ».
Sur les 2,2 millions nécessaires pour la construction, Nazim Awan estime que plus de 400 000 $ ont déjà été dépensés et que la communauté détient encore 200 000 $ de fonds. « Il manque 1,6 million $. Nous ne sommes pas près de notre but, mais ça progresse », dit-il.
« En général, constate le directeur régional pour l’ouest du Canada de l’organisme Islamic Relief Canada, vu que beaucoup moins de gens se sont déplacés dans les mosquées cette année, il y a eu beaucoup moins de dons. »
Nazim Awan espère qu’un essoufflement de la pandémie permettra de réaliser des collectes de fonds, comme initialement prévu, dans des centres islamiques à travers le Canada.