L’année 2021 aura été riche en émotion pour les élus de la capitale des Territoires du Nord-Ouest.
Thomas Ethier – IJL – Territoires
Des milliers de personnes ont manifesté au printemps 2021 dans les rues de Yellowknife, en hommage aux victimes des pensionnats indiens. C’était après une éclosion majeure de COVID-19 qui aura paralysé une partie de la capitale, frappée à nouveau quelques mois plus tard par le variant Delta.
Malgré les drames et l’adversité, certains dossiers de longue date, voués à changer la face de Yellowknife, ont atteint leurs paroxysmes au cours de ces derniers mois. Les conflits de valeur au sein du conseil municipal auront toutefois attiré beaucoup d’attention, semé l’émoi et une certaine division.
Médias ténois a revisité les grandes lignes de cette année mouvementée avec la mairesse de Yellowknife, Rebecca Alty.
Médias ténois : Qu’est ce qu’on retient de cette année ? Quels ont été les enjeux et les accomplissements de la capitale ?
Rebecca Alty — Des projets majeurs ont débloqué cette année. On pense au chantier du futur centre aquatique qui, après six ans de démarches, pourra aller de l’avant. Le nouveau règlement de zonage, sur lequel nous travaillons depuis trois ans, a également passé l’étape des consultations publiques, et sera soumis au vote du conseil cet hiver.
Nous avons également reçu un bon montant du programme du gouvernement fédéral pour la construction de logements. Nous avons confié un montant à l’organisme Home Base qui a pu loger huit personnes à Yellowknife. Nous avons également beaucoup travaillé avec la Première Nation des Dénés Yellowknives, pour créer une stratégie commune de développement économique.
Mt : Vous avez manifesté en juin 2021 aux côtés des résidents autochtones après la triste découverte sur site de l’ancien pensionnat de Kamloops. Qu’est-ce qui a évolué cette année, à vos yeux, dans les rapports entre résidents autochtones et non autochtones ?
RA — Les résidents autochtones connaissent déjà l’histoire. Cet été, ce sont les personnes non autochtones qui ont été surprises. Il y a maintenant six ans que la Commission de vérité et réconciliation du Canada a soumis ses recommandations. Le gouvernement des TNO a enfin déposé son Appel à l’action cette année. Je crois qu’on accorde beaucoup plus d’attention à ces enjeux, les Canadiens en apprennent beaucoup plus à propos de l’histoire du pays et j’espère que nous en poursuivrons l’apprentissage l’an prochain, pour mieux savoir comment nous pouvons améliorer ces relations.
Mt : Le sujet de la COVID-19 s’impose toujours. Yellowknife a subi deux éclosions majeures au cours des derniers mois. Après deux ans de pandémie, comment s’en tire notre économie ?
RA — C’est difficile. Certaines entreprises ont connu leurs meilleures années. Pour d’autres, comme les restaurants, c’est beaucoup plus difficile. Nous avons un haut taux de vaccination, nous commençons à ouvrir petit à petit. J’espère que nous pourrons continuer à réouvrir en 2022, en nous assurant de penser d’abord à la santé des résidents, puis en espérant que l’économie puisse rebondir.
Mt : Le Budget municipal 2022, adopté en fin d’année, inclut une augmentation d’impôts plus élevés qu’à l’habitude, en plus d’une série de grands projets d’infrastructure. Allons-nous nous remémorer de l’année 2022 comme celle du début du futur Yellowknife ?
RA — Il faut garder en tête que peu de bâtiments ont été construits au cours des dernières années. Nous avons les mêmes dépenses, mais pas de nouveaux propriétaires pour payer des impôts et faire en sorte de diminuer la charge fiscale générale des résidents. De nouveaux projets d’habitation sont tout de même allés de l’avant au cours de la dernière année, autour d’infrastructures existantes, ce qui évite d’avoir à développer les services, construire des rues et augmenter les couts pour les contribuables.
Mt : La municipalité compte attirer plus de résidents et d’entrepreneurs à Yellowknife. Qu’est-ce qui va les attirer dans les prochaines années ?
RA — Certains projets, espérons-le, vont poursuivre leur développement. Par exemple, la future université polytechnique attirera des étudiants, tout comme certains projets miniers prometteurs qui ont le potentiel d’attirer des travailleurs. Les négociations en cours avec les Premières Nations Akaitcho pour l’obtention d’un gouvernement autonome sont également en cours. La mise sur pied de ce nouveau gouvernement entrainera une création de postes à Yellowknife. Ce sont de grands projets, mais, pour cela, il faut bâtir des maisons. Si les futurs étudiants n’ont pas de maisons où habiter, ils ne resteront pas à Yellowknife.
Mt : Parlons maintenant du climat au conseil municipal. Certains conseillers sont allés très loin en matière de liberté d’expression l’automne dernier. À quoi doit-on s’attendre lorsque les conseillers devront débattre d’autres questions difficiles ?
RA — Nous avons beaucoup parlé cet automne de l’importance de réfléchir aux impacts de nos mots avant de nous exprimer. Est-ce que c’est vraiment ce que je voulais dire ? Est-ce là une bonne comparaison ? Je crois que les conseillers ont vraiment réfléchi cet automne et vont continuer l’an prochain. Nous allons aussi suivre une formation de sensibilisation aux réalités culturelles autochtones.
Vous savez, on change beaucoup avec les années. Une chose dite il y a 10 ans n’est peut-être plus acceptable aujourd’hui. Elle ne l’était pas non plus il y a dix ans, mais, aujourd’hui, les gens réfléchissent davantage, et reconnaissent que ce n’est pas acceptable. Or, ça prend du temps pour intégrer ces principes et changer sa façon de s’exprimer. J’espère qu’en 2022, nous allons prendre le temps de réfléchir, d’apprendre et de changer. Je pense que nous devons prendre une pause et réfléchir avant d’émettre un commentaire. Je crois que c’est une chose que tout le monde a apprise cet automne.
Mt : Pour terminer, madame la mairesse, j’aimerais vous poser la même question que l’an dernier. Ayant grandi à Yellowknife, qu’est-ce qui vous a marqué cette année, qu’avez-vous observé en vous promenant dans votre ville ?
RA — En ce moment même, je regarde le parc Somba K’e par la fenêtre de mon bureau, et ça me fait beaucoup réfléchir. C’était un simple stationnement, et lorsque nous avons décidé de transformer le terrain en parc, au cout d’un million $, certains résidents ont dit que c’était stupide et qu’on gaspillait l’argent. Le conseil municipal a décidé d’aller de l’avant. Aujourd’hui, ce parc contribue beaucoup à la qualité de vie des résidents.
Je réfléchis beaucoup aux projets qui pourraient améliorer notre qualité de vie. En 2021, nous avons bâti une immense aire de jeux accessible pour les jeunes. Ça apporte beaucoup aux résidents, surtout en ces temps de pandémie. Personnellement, j’ai passé presque l’entièreté des deux dernières années à Yellowknife sans en sortir !