le Vendredi 30 mai 2025
le Dimanche 27 avril 2025 12:14 Société

Appel à une mobilisation locale face à la crise du logement

Rob Warburton interpelle le public avec énergie lors de sa conférence sur le logement, jeudi 17 avril, au Centre d’accueil des visiteurs de Yellowknife. — Photo Cristiano Pereira
Rob Warburton interpelle le public avec énergie lors de sa conférence sur le logement, jeudi 17 avril, au Centre d’accueil des visiteurs de Yellowknife.
Photo Cristiano Pereira
Avec une pénurie de logements locatifs, des terrains vacants qui stagnent et un cout élevé de l’expansion urbaine, Yellowknife est à la croisée des chemins. Le conseiller municipal Rob Warburton en a fait la démonstration lors d’une conférence engagée et participative, plaidant pour des solutions locales, accessibles et durables.
Appel à une mobilisation locale face à la crise du logement
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« Ce n’est pas un problème temporaire, c’est une crise structurelle. » Devant une salle attentive réunie au Centre d’accueil des visiteurs, ce jeudi 17 avril, Rob Warburton n’a pas tourné autour du pot. Dès les premières minutes de sa conférence publique organisée par le Club Rotary, il a décrit une réalité alarmante : un taux d’inoccupation de seulement 1,9 %, des offres d’emploi refusées faute de logement, et un marché locatif contrôlé par de grandes compagnies extérieures. « Deux infirmières ont refusé une offre d’emploi cette semaine, faute de logement », raconte-t-il.

Conseiller municipal, mais aussi entrepreneur social engagé, Rob Warburton connait de près les défis liés au logement à Yellowknife. Cofondateur de CloudWorks, une entreprise locale qui propose des espaces de travail, de cohabitation et de logement adaptés aux réalités du Nord, il milite depuis des années pour l’accessibilité immobilière. En plus de gérer des projets d’aménagement, il a siégé à de nombreux conseils locaux, du développement touristique à la lutte contre l’itinérance.

Pour lui, c’est précisément le fossé entre les décisions politiques et la réalité du terrain qui l’a poussé à s’engager en politique. « Beaucoup de règlements sont rédigés par des gens qui n’ont jamais construit une maison ni risqué leurs économies », souligne-t-il. Selon lui, cette méconnaissance crée des règles inadaptées et freine l’élan de celles et ceux qui veulent bâtir. Il plaide pour une approche plus pragmatique, ancrée dans l’expérience et ouverte à la diversité des projets : « Le système est conçu pour des professionnels, mais ce qu’il nous faut, c’est un système qui aide aussi les citoyens ordinaires. »

La solution passe par les forces vives locales. Il raconte comment certains citoyens choisissent d’investir dans leur communauté plutôt que dans les marchés boursiers, comme cet ingénieur qui construit des quadruplex ou ces propriétaires qui transforment leur sous-sol en logement locatif. « Si 20 Yellowknifiens ajoutent chacun une unité dans leur cour arrière ou leur maison, ce serait comme construire un immeuble d’appartements par an », fait-il remarquer, soulignant que ces initiatives ne nécessitent aucune nouvelle infrastructure.

Mais les outils pour favoriser ces initiatives restent trop peu connus ou difficiles d’accès. M. Warburton plaide pour un « guichet unique » d’accompagnement. « Il faut des ateliers, du mentorat, un vrai accompagnement. On ne peut pas juste dire aux gens d’engager un architecte et de se débrouiller. »

On entend beaucoup les retraités propriétaires. On entend peu les gens qui courent entre deux emplois pour payer leur loyer. Et ça fausse la représentativité des débats.

— Rob Warburton

La conférence a aussi exploré la dynamique sociale de l’ensemble résidentiel. M. Warburton a expliqué la différence entre les « NIMBY » (Not In My Backyard) et les « YIMBY » (Yes In My Backyard), soulignant que les opposants à de nouveaux projets sont souvent très présents et organisés, alors que les personnes touchées par la crise – familles nombreuses en appartement, jeunes travailleurs, locataires précaires – n’ont pas le temps ou la motivation de se rendre aux réunions du conseil.

« On entend beaucoup les retraités propriétaires. On entend peu les gens qui courent entre deux emplois pour payer leur loyer. Et ça fausse la représentativité des débats », note-t-il.

Le public a pris une large part dans la seconde moitié de la conférence. Une citoyenne a exprimé son intérêt pour construire une petite maison dans sa cour, mais a souligné les limites techniques liées aux terrains sur lit de roc. Un autre a demandé pourquoi il était si difficile de trouver les bonnes informations pour profiter des subventions existantes. 

L’entrepreneur a reconnu la complexité du système : « Il y a plein de programmes, mais ils sont éparpillés entre les niveaux de gouvernement. Même moi, je dois tout compiler pour y voir clair. »

D’autres questions ont porté sur les règles de construction, les évaluations immobilières injustes, ou encore la taxation des terrains vacants. « La majorité des terrains vides appartiennent à des Yellowknifens », a-t-il expliqué. « Il faut des incitatifs pour les vendre ou les développer. Sinon, ils restent inactifs, et ça nuit à toute la ville. »