On reproche communément aux grands manufacturiers automobiles américains de s’être traîné les pieds pour avoir continué à construire des véhicules énergivores en complicité avec les pétrolières pendant que le reste du monde devait s’adapter au nouvel environnement énergétique.
Les plans de retraite, bénéfices et compensation faisaient le bonheur du syndicat ainsi que de la direction. Les travailleurs plus âgés ne se sont pas réentrainés, la qualité a généralement décliné et le nouveau sang s’est vu systématiquement bloqué par la vieille garde. Les récentes années de « vaches grasses » ont vu ces manufacturiers empirer leur arrogance au point de tous voir leurs représentants se rendre récemment sur leur jet personnel pour aller quémander leur « bailout » à Washington.
Ne devrait-on pas se demander si notre diffuseur public a similairement failli de s’adapter au nouvel environnement médiatique? Outre quelques derniers dinosaures, l’auditoire ne consomme en effet plus son précieux temps à la télévision ou à la radio en temps réel. La prochaine génération illustre remarquablement la tendance. Et le diffuseur public continue à produire la grande majorité de ses contenus sur la base de ces anciens médias incapables de véritablement prendre ce tournant internet.
Les chaînes généralistes sont pourtant périmées et l’usager branché choisit dorénavant ses contenus de façon très sélective. Un environnement web 2.0 lui permettra de s’engager s’il le désire avec des gens intéressés par ces contenus spécifiques. Des outils ouverts de diffusion, de partage et d’accès aux contenus tels YouTube et Facebook agiraient-ils comme les voitures japonaises versus les domestiques?
Les travailleurs plus âgés du diffuseur public, protégés par leur syndicat, ne se sont pas mis à jour en termes de nouvelles pratiques médiatiques et répètent les mêmes trucs depuis une éternité tout en imposant leurs vieilles pratiques à la relève avec le plein accord de la direction. Le nouveau sang s’est vu systématiquement bloqué, sinon coupé, comme contractuel.
Il semble tout à fait inacceptable qu’un travailleur des médias en 2009 ne tienne pas de blogue, qu’il soit animateur, annonceur, journaliste ou même réalisateur. Et cela représente la règle parmi la grande majorité du personnel du diffuseur public en milieu minoritaire, là où les problèmes d’adaptation au nouvel environnement sont les plus flagrants.
Qu’est-il donc arrivé au diffuseur durant ces dernières années de « vaches grasses »? L’internet (et dépenses associées) y a été encore plus centralisé! La production de contenus s’est accrue sur la base de la télévision et de la radio. On y voit toujours des webmestres qui ont peine à produire plus d’une ligne de texte pour décrire et diffuser les contenus télévision/radio alors que le terme webmestre a à peu près disparu dans le monde réel. Les mécanismes de rétroaction, de partage et de diffusion RSS web demeurent complètement inutilisés en milieu minoritaire.
La réflexion du comité parlementaire du patrimoine canadien portant sur le rôle du diffuseur public au XXIe siècle a été monopolisée par le cancer et la complicité des groupes d’intérêt habituels implacables à tout véritable changement. Plus de 200 pages de verbiage inutile maintenant oublié sur les tablettes ont été produites à grands frais.
Le seul rôle retenu pour le diffuseur public était celui « d’établir un protocole d’entente » pour son propre financement, en évocation à l’arrogance de ces représentants venus quémander leur « bailout » à Washington sur leur jet personnel. Le contexte minoritaire n’y avait pas même été mentionné!
Comment donc faire réfléchir les participants à une industrie, telle l’industrie automobile nord-américaine, quand elle ne s’adapte pas à un nouvel environnement? Nous entrons de toute évidence dans une période de « vaches maigres ». Le diffuseur public ainsi que la société desservie pourraient-ils en sortir en meilleure santé en agissant adéquatement cette fois-ci?
Réjean Beaulieu, Vancouver, C-B
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