La Fédération franco-ténoise s’engage à soutenir les régions
Si le Forum communautaire de la francophonie, qui se tenait le 12 avril, a été un succès dans la détermination de la communauté d’aider les petites régions, elle aura aussi été un échec en matière de participation citoyenne, un objectif secondaire de cet exercice. Son point saillant aura donc été l’engagement pris par les organismes présents à trouver un financement pour les agents communautaires en région.
Les citoyens et les organismes francophones étaient invités au Days Inn de Yellowknife le 12 avril dernier afin de faire une mise à jour du Plan de développement global (PDG) 2010-2015. Dans les grandes lignes, le PDG ciblait quatre chantiers comportant chacun des enjeux, des objectifs et des stratégies pour les atteindre. Le premier objectif était la croissance de la population francophone aux Territoires du Nord-Ouest, avec une amélioration de sa capacité de rétention. Le second était un meilleur accès aux services, programmes et infrastructures. Enfin, on avait identifié un plus grand rayonnement de la communauté francophone et de sa culture, et une amélioration du leadership et de la capacité organisationnelle.
Si l’ensemble des organismes francophones de Yellowknife, du delta du Mackenzie, de Fort Smith et de Hay River était présent, aucun citoyen ne s’est présenté au Forum. Qui plus est, l’animateur de l’événement, Pierre Bourdeau, du Centre canadien de leadership en évaluation (CLÉ), a avancé qu’en l’absence d’une évaluation intérimaire du PDG et d’objectifs quantifiables, il était improbable d’en faire une évaluation ayant une quelconque valeur scientifique. Le président de la Fédération franco-ténoise (FFT), Richard Létourneau, a corrigé le tir en affirmant qu’il y a eu un autre Forum vers 2012, mais qu’il n’y a pas peut-être pas eu de rapport sur cette réunion. Pour cette raison et pour d’autres, comme la formulation bancale des énoncés dans le test d’autoévaluation, beaucoup de personnes ne pouvaient répondre à la grille d’autoévaluation en 12 points. Le taux d’abstention varie entre 9 % et 27 %. Ce qui ne signifie pas pour autant que l’exercice consultatif aura été inutile.
Démographie et rayonnement culturel
Lors du Forum, il a été affirmé que la population francophone avait augmenté de manière proportionnelle et absolue entre 2006 et 2011 aux Territoires du Nord-Ouest. Sa composition aurait évolué, les Québécois diminuant au profit des Néobrunswickois, de gens d’origine européenne et africaine. Immigration TNO fera une pochette d’accueil à l’intention des immigrants et termine actuellement son plan stratégique. Les participants au Forum ont énoncé l’idée qu’il serait avantageux de faire mieux connaître l’idée que le gouvernement a l’obligation de fournir des services en français, par exemple par le biais d’un portail franco-ténois plus élaboré.
En ce qui a trait à la rétention de la population, elle n’est pas très bonne, selon Richard Létourneau, mais s’est améliorée à Yellowknife grâce aux structures d’immigration et d’éducation. « La rétention dépend principalement de l’emploi, a affirmé la directrice générale du Conseil de développement économique des TNO (CDÉTNO), Anne-Christine Boudreau. Nous pouvons l’influencer, mais pas la contrôler. » Le CDÉTNO questionne ses employés qui quittent leur emploi pour connaître les raisons de leur départ. Les participants au Forum ont convenu que ce questionnement devrait être étendu à l’ensemble de la communauté franco-ténoise et le CDÉTNO a accepté de coordonner l’information.
Les participants ont globalement constaté que l’offre culturelle francophone a augmenté au fil des ans et qu’elle rayonne davantage. L’Association franco-culturelle de Yellowknife et sa directrice générale Pascaline Gréau ont d’ailleurs reçu des félicitations pour leur travail, notamment de la part de la présidente de la Commission scolaire francophone des Territoires du Nord-Ouest, Suzette Montreuil.
Programmes, structures et cohésion
Les représentants des organismes ont convenu en grande majorité que les programmes et services se sont améliorés depuis 2010. Selon Richard Létourneau, la création du Secrétariat aux affaires francophones est un exemple de réussite. Pour le directeur de ce dernier, Benoît Boutin, les organismes francophones sont aujourd’hui mieux connus au gouvernement territorial. « Avant, a-t-il dit, le CDÉTNO, c’était du chinois, on ne le connaissait que dans un ministère. Aujourd’hui, on sait c’est quoi. » N’empêche que peu avant le forum, une rencontre a eu lieu avec tous les coordonnateurs des services en français des différents ministères du GTNO… et la rencontre s’est déroulée en anglais. « La majorité de ces coordonnateurs ne parlent pas français, a observé le directeur général de la FFT, Jean de Dieu Tuyishime. »
Pour ce qui est des infrastructures, les participants ont évoqué la disponibilité à Yellowknife, à la suite du transfert des responsabilités, de locaux du gouvernement fédéral. Mais encore faut-il ensuite les soutenir. « La question des infrastructures devrait être mise en attente jusqu’au prochain plan quinquennal, a soutenu le directeur de Radio Taïga et de L’Aquilon, Alain Bessette, à tout le moins jusqu’à ce que soit réglée devant la Cour la question des agrandissements à Boréale et Allain St-Cyr. »
La cohésion entre les organismes francophones a été améliorée; on songera à l’organisation du souper de Noël et à celle, plus imposante, de la visite de La Petite Séduction. Pascaline Gréau a tout de même souligné les inutiles doublons dans les services jeunesse et immigration offerts par les organismes. Il a été convenu d’élaborer à court terme un calendrier commun pour les intervenants.
En région
La difficile survie de la francophonie en périphérie ténoise a maintes fois été évoquée dernièrement. En raison des changements de politiques à Patrimoine Canada, l’embauche d’agents culturels n’est plus financée; il n’y a donc plus d’employé à Hay River et à Fort Smith, et celui d’Inuvik ne travaille que 10 heures semaine.
« Nous ne recevons plus d’argent, de dire l’ex-présidente de l’Association franco-culturelle de Fort Smith (AFCFS), Marie-Christine Aubrey, et nous avons brûlé nos bénévoles. Si nous n’étions pas là, Mathieu Doucet (ancien employé de l’AFCFS) et moi, tout tomberait. » « Ça ne sert à rien de mettre de l’argent pour des activités culturelles où les gens ne viennent pas, a énoncé un Mathieu Doucet dépité. L’homme est aujourd’hui directeur général du Northern Life Museum. Si les activités ne se passent pas à l’école, ça ne fonctionne pas. Mais Patrimoine Canada ne finance pas ce créneau. » Cette assertion a reçu l’assentiment du président de l’Association franco-culturelle de Hay River, Justin Carey.
Le président de la Fédération franco-ténoise (FFT), Richard Létourneau, a engagé son organisme à mettre de l’argent sur la table à court terme pour l’embauche d’agents culturels à temps plein dans les trois régions et la location d’un bureau. Il a demandé aux autres organismes francophones territoriaux d’en faire tout autant. Ceux-ci se réuniront « au cours des prochains mois » pour trouver une solution, quitte à faire des coupes dans d’autres enveloppes budgétaires. Les sommes de 240 000 $ puis de 350 000 $ ont été évoquées. Aucun terme n’a été fixé; on a parlé de 2016, puis d’une échéance plus rapprochée.